Au début des années 1980 : stupeur totale ! une équipe occulte d'inconnus payés par une agence de pub fabriquent de toute pièce une femme pseudo-rebelle qui s'adresserait personnellement aux passants pour les avertir de ses actions de déshabillage à venir. Une strip-teaseuse raccoleuse s'affiche hors des bars spécialisés avec un look "nature" à la Uschi Obermaier mais qui vous fixe en rigolant droit dans les yeux (U.O. ne rigole sur aucune de ses photos pour le magazine allemand "twen" (1959-1971).
La femme "libérée" de 1968 pervertie en femme publique de papier est née.
Eric Hélias, codirecteur de création de l'agence Young & Rubicam
dit de cette opération : "C'est la pub parfaite" (lire ici).
Le 31 août 1981, dans les rues de Paris et de 6 villes de province (de plus de 500 000 habitants), 900 grandes affiches 4 par 3 sont collées à une hauteur qui empêche absolument d'échapper au regard scrutateur de l'exhibitionniste de papier et de ces avertissements datés.
La publicité fait de la publicité pour la publicité en inventant le concept de la strip-teaseuse amatrice qui aguiche la population comme si cette population était tout entière un homme et de plus un intime.
La femme des mouvements de libération de la femme des années 60/70 est kidnappée et mise au turbin et nous assistons à à la plus grande truanderie psychologique de toute l'histoire du patriarcat.
À l'époque, des associations montent au créneau. A Lille, l'association "Du côté des femmes" dépose plainte pour "outrage aux bonnes mœurs, atteinte à la dignité des femmes et incitation au voyeurisme". Le 5 septembre, le tribunal de Lille condamne l'afficheur à recouvrir partiellement ou totalement les affiches, à l'initiative de Pierre Mauroy, alors maire de la ville.
A Paris, l'association "Choisir la cause des femmes", dirigée par Gisèle Halimi, tente en vain de convaincre l'Assemblée Nationale de la nécessité de voter une loi antisexiste. Yvette Roudy, alors ministre socialiste des Droits de la femme, s'insurge dans les médias contre ce qu'elle considère à juste titre être "une instrumentalisation du corps de la femme et une atteinte à sa dignité". Et Pierre Berville, le directeur artitisque de la campagne de réagir : "...Myriam est un pur produit de 1968 (sic), elle a une relation parfaitement saine avec son corps, la nature, un rapport totalement déculpabilisé à la nudité... Son côté sportif, mince et musclé désamorce tout le côté douteux, voire "glauque", qui pourrait être reproché à l'affiche".
Bien entendu, il ne parle pas des "promesses" que fait par affiche interposée le "pur produit de 68" parce que dénuder une femme à la vue de tous pour un produit publicitaire même si ce produit publicitaire est la publicité elle-même est déjà du sexisme en soit, mais nous faire croire que cette femme n'est pas dénudée par la publicité, que c'est elle qui fait de son plein gré l'annonce et le geste, est du sexisme masqué en soit-disant "féminisme" ou le "rapport déculpabilisé à la nudité" selon le jargon soixante-huitard utilisé par le responsable de ce coup fumant a été compris ou fait semblant d'avoir été compris comme une sorte de prostitution "nature" sans maquillage et hauts talons. Car ce n'est pas "l'érotisme" que les vrais féministes remettent en cause mais le fait que la liberté de se dénuder soit confisquée à des fins mercantiles.
Dans cette publicité l'action topless au lieu de transmettre un message de liberté transmet un message de sujétion consentie impliquant toutes les femmes !
La libération serait maintenant la prostitution sous une forme "plus proche de la nature".
Une autre personne qui n'a rien compris aux réactions des féministes, c'est le modèle nu Myriam Szabo, petite amie du photographe qui a posé pour cette affiche et a permis au pubeux qui employait son bien-aimé de gagner des fortunes considérables :
Interviewée dans de nombreux magazines, notamment VSD, à ceux qui lui demandaient s'il elle n'avait pas honte d'avoir posé nue, elle répondait cette phrase : "L'obscénité n'est pas dans l'image mais dans l'œil de celui qui regarde".
L'obscénité n'est pas dans l'image, non, chère Myriam, mais dans le fait d'avoir offert sa nudité sans autre but que de faire gagner de l'argent à un annonceur.
D'avoir galvauder sa nudité. De lui avoir enlevé sa subversivité en échange d'une somme d'argent. En un mot de l'avoir bel et bien prostituée. Voilà où est l'obscénité.
Car l'intention de la société Avenir était de démontrer à ses clients qu’il est possible de poser une affiche en quelques heures, puis d’en changer si on le souhaite tous les deux jours. La campagne Myriam a largement débordé sa cible composée alors de 4500 publicitaires français et de leurs annonceurs, puisqu’en septembre 1981, elle avait déjà rapporté près de 300 000 euros de retombées presse.
Car la publicité se définit elle-même comme une entreprise prostitutionnelle. Ici un article sur le plus "
Et cette "obscénité" dont parle notre agnelle blanche, une fois administrée impunément et de force, va entraîner une avalanche d'autres obscénités plus terribles pour la femme les unes que les autres via la publicité et tout ce qui s'y apparente.
(Alors il est normal que les groupes féministes de Paris se posent aujourd'hui la question du bien fondé de montrer ses seins pour la cause féministe comme le font les Femen d'Ukraine qui n'ont pas 30 ans de milliards de "campagne Myriam" dans la tête).
Pour clore cette retrospective une fausse pub empruntée à Emelire :
ou mes seins....
Ajout du 2.10.12 : pour voir jusqu'où on en est arrivé dans la maltraitance du corps des femmes aujourd'hui, ne manquez pas les pubs trash publiées par Sophie Gourion ici
Ajout du 2.10.12 : pour voir jusqu'où on en est arrivé dans la maltraitance du corps des femmes aujourd'hui, ne manquez pas les pubs trash publiées par Sophie Gourion ici