Finalement, j'ai retrouvé mon post perdu. Voilà ce qu'il disait : "il y a très longtemps que je n'ai plus posté quoi que ce soit ici et pourtant j'ai fait un certain nombre d'esquisse de posts mais je ne sais pas pourquoi je n'avais pas la motivation d'aller jusqu'à les publier.
Il est probable que ma nostalgie du XVIe siècle m'en a empêché. J'avais commencé ce blog en traitant de ce siècle-là et puis j'ai abordé petit à petit des époques plus contemporaines mais je ne m'y suis pas vraiment sentie dans mon élément.
Peut-être qu'un bout de mon âme en traversant le temps (si on croit à la persistance d'une âme qui traverserait le temps, idée à laquelle j'hésite à croire tout à fait) est resté obstinément attaché à cette période-là, va savoir.
En flânant sur internet, les soirs de janvier étant particulièrement longs et maussades, je suis tombée sur la bande-annonce de l'adaption cinématographique francaise de 2013 du Michael Kohlhaas d'Heinrich von Kleist, un auteur allemand bien connu. J'étais en train de consulter la filmographie de l'actrice Roxane Duran dont le visage m'évoque le mien, plus jeune, ce qui me trouble toujours un peu, j'ai alors lu qu'elle avait interprété le personnage de Marguerite de Navarre. Comme le film dans lequel ce rôle intervenait, portait le nom d'une nouvelle qui, je le savais, était censée se passer en Allemagne et même à Berlin nommé alors Cölln ainsi qu'ailleurs dans la Saxe, par exemple à Wittenberg, la ville de Luther, je me suis demandée ce que venait faire Marguerite de Navarre là-dedans. Je suis allée sur la page Wikipédia du film de Arnaud des Pallières pour en lire le synopsis. J'ai été surprise d'y apprendre que Marguerite de Navarre qui, je le savais pour avoir lu tout ce qui est parvenu jusqu'à nous sur le personnage, était une femme extrêmement empathique, soucieuse du peuple et de ses souffrances, devenait subitement une princesse impitoyable et même violente, n'hésitant pas à renvoyer au personnage principal, un homme du peuple, sa femme sous forme de cadavre sanguinolant. Je me suis interrogée sur le pourquoi d'un portrait aussi faux qu'horrible. Il y était mentionné que la co-scénariste s'appelait Christelle Berthevas et se faisait interviewer sur youtube à propos de l'adaption du Michael Kohlhaas livresque.
L'affaire est simple : Christelle Berthevas souhaitait "ramener des personnages féminins" parce qu'il n'y en avait pas dans le roman de Kleist. Cela part donc d'un bon sentiment et je ne peux que m'en réjouir. Elle a fait l'impasse sur les enfants mâles de Kohlhaas qui en avait plusieurs et fait porter le rôle de sa descendance par une petite fille qui personnifie du coup l'avenir du héros dont la vie s'achève brutalement. Excellente idée.
Mais elle ne dit rien du tout sur son choix de la reine Marguerite de Navarre, néanmoins il est facile de deviner dans les blancs ce qui s'est passé. En situant l'action en France, elle s'est simplement servie du nom d'une princesse d'époque pour remplacer le prince allemand de l'oeuvre de Kleist qui est d'ailleurs basé sur un fait divers lui-même abondament dénaturé par son auteur. Ce que les deux scénaristes ont maintenu de l'histoire, est que nous sommes en 1540 et en 1540, il y a Marguerite de Navarre qui respire quelque part en France.
Les bios de princesses n'étant pas enseignées, il nous reste les reines Catherine de Médicis et Marie-Antoinette, celles des grands troubles et bouleversements, guerres de religion pour l'une et Révolution pour l'autre, traînées dans la boue et diffamées à tout va et à qui on a un peu collé la responsabilité des bouleversements en question. Du coup, tout le monde a l'image plus ou moins inconsciente de femelles de haut rang: princesses, dauphines, reines ou duchesses super injustes et cruelles. Quoi de plus image d'Épinal franco-francaise que celle-là.
On veut féminiser les vieilleries littéraires trop machistes sans se rendre compte que l'on perpétue la misogynie autrement, je veux dire non parce que les femmes de pouvoir ne seraient jamais méchantes mais parce que l'on ne soucie pas de la personne féminine dont on a emprunté le nom. Pas un instant. Parce qu'il faut divertir. Parce qu'il ne faut pas approfondir les choses et que de cette facon, on rend toujours HOMMage aux hommes mais jamais aux femmes.
Marguerite de Navarre mériterait que soit dédié un film à son extraordinaire courage, sa grande popularité et sa profonde bienveillance. J'ajouterais que dans le passé de la France, il y a bien des réhabilitations à faire au féminin.
Mais pour cela, il faudrait cesser d'utiliser les grandes femmes de l'HIStoire comme stéréotype, prête-nom voire comme simple cintre de robes à vertugadin".
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