Au festival de Cannes 2012, en dehors des scouts/guerriers/militants/militaires/policiers/gangsters/chasseurs et autres panoplies de Zorro/AlCapone pour petits garçons qui s'ennuient à la récré, deux films ont été sélectionnés sur le sujet de la prostitution. L'un est qualifié par le site Review de film dépassé par un cinéaste dépassé : c'est Like Someone in Love de l'iranien Kiarostami. Mais un machiste qui se respecte ne va pas laisser à la porte un cinéaste de 71 ans n'ayant plus rien à transmettre que ces rêves de séduire une (belle) vingtenaire asiatique, tout de même ! Peut-être...si elle n'a pas le sou et qu'elle est obligée de se prostituer et qu'elle admire l'érudition (le héros est vieux et traduit du latin), alors elle tombera (qui sait ?) amoureuse du bonhomme malgré son grand âge ? On dirait le genre de films que ce font dans leur tête ceux qui veulent absolument croire au père Noël jusqu'à leur dernier souffle.
Mais qui est-ce que ça intéresse ????
Surtout que l'on a rarement vu une jeunesse tomber amoureuse d'un grand-père encore moins après que celui-ci l'ait payé pour une passe. Mais passons, car c'est dépassant.
Le second montre une prédatrice de petits jeunes. On remarquera le contraste. Convoiter une jeune fille est humain si l'on est un (très) vieil homme et d'ailleurs y a des filles qui aiment, convoiter un jeune garçon est abject si l'on est une vieille femme (qui plus est, grosse) et là y a pas de garçon qui aime (déjà dans les peintures ci-dessus du XVIe/XVIIe les mises-en-scène étaient claires). La prostituée doit donc être heureuse d'intéresser sexuellement un grand-père, un prostitué intéressant une vieille femme c'est franchement dégueulasse. Et pour que le message passe mieux, le cinéaste autrichien Seidl place le tout sur fond de colonialisme : une blanche au Kenya. A croire que ce qu'il montre est la norme. Et pas l'inverse (le blanc qui abuse de la pauvreté des femmes aussi bien blanches que noires que jaunes, vertes, bleues ou mordorées quelque soit leur âge et du berceau à la tombe c'est si rare, n'est-ce pas). Ce film étant le premier d'une trilogie sur le même thème, on n'a pas fini de ne voir QUE des femmes-bonbons ou des femmes-repoussoirs (Blanche-Neige et sa belle-mère) sur les écrans et au festival de Cannes.
Parions que l'un de ces deux films remportera la palme ? Car à quoi sert cette palme sinon à faire la publicité d'un film de propagande machiste ? On est loin du temps (2004) où l'on récompensait un Michael Moore pour son playdoyer contre la guerre...(car il est évident que la guerre est une valeur machiste). (Encore un lien ici).
Néanmoins, il semble qu'il y aurait un léger progrès dans la perception de la prostitution. Au XVIe siècle, certain.e.s propageaient encore l'idée que : contrairement à l'homme [qui] ne naît pas homme mais le devient (dixit Erasme), la prostituée naîtrait prostituée.
La preuve ces (certes) humoristiques et ingénieux vers de l'un des plus profiliques versificateurs de la Renaissance française :
D'Alix
Cy gist (qui est une grand perte)
En Culetis la plus experte,
Qu'on sceut jamais trouver en France:
C'est Alix, qui des son enfance,
Quand sa Nourrice l'alectoit,
Dedans le Berceau culetoit:
Et de trois jusques à neuf ansAvec Garsons petitz enfans
Alloit tousjours en quelque coing
Culeter au Grenier au Foing.
Et à dix ans tant fut culée,
Qu'en culant fut depucelée.
Depuis grosse Garce devint,
Et lors culetoit plus que vingt.
En apres devint toute Femme,
Et inventa la bonne Dame
Mille tourdions advenans
Pour culeter à tous venans.
Vray est, quand plus n'eut Dent en gueulle,
Elle culeta toute seulle:
Mais affin que le Monde vist
Son grand Sçavoir, elle escrivit
Ung beau Livre de Culetage
Pour ceulx, qui estoient de grand aage:
Et ung aultre de Culetis
Pour ceulx, qui estoient plus petis.
Ces Livres feit en s'esbatant,
Et puis mourut en culetant.
Encor dit on par grand merveille,
Que si on veult mettre l'Oreille
Contre la Tumbe, et s'arrester,
On oirra ses Os culeter.
Clément Marot
Illus. : (Quentin Massys Couple impareil et Goltzius Le jeune homme et la vieille (Musée de la Chartreuse de Douai))
HEUREUSEMENT LA VIE EST AILLEURS ET
merci aux plus jeunes hommes qui viennent d'adresser à Jean-Luc Ayrault une lettre ouverte contre la prostitution: Car si certains septuagénaire friqués se font des films que l'ont ne veut pas voir mais qu'ils nous obligent à voir, la relève masculine ne marche pas forcément dans leurs traces et le BONHEUR (GLÜCK) pourrait bien un jour ressembler à ceci :
Un JEUNE mec qui en ayant eu assez de ces vieux cochons qui tuent l'amour vient de tuer l'un d'entre eux (billet précédent). L'affiche d'un film qui aurait un effet nettement moins libérateur s'il n'y avait pas ce perpétuel festival de la couille en France ainsi qu'une gerbante culture de la prostitution partout dans le monde.
Toujours le double standard très net entre ce que la société permet aux hommes et ne tolère pas chez les femmes pour le même comportement ! Et très étonnants ces vers de Clément Marot ! Je partage.
RépondreSupprimerSorry, j'ai complètement oublié : Merci pour les liens ;))
RépondreSupprimerhttp://www.lalibre.be/debats/opinions/article/740157/cannes-la-braguette-le-festival-et-ses-hommes.html
RépondreSupprimerUn article de Nadine Plateau dans La Libre Belgique d'hier, encore une réaction au titre éloquent !
en même temps, le film qui a eu la palme n'est pas tout à fait ce que tu décris... des vieux, oui... Emmanuelle Riva, Jean-Louis Trintignant. Ni l'un ni l'autre ne semblent se nourrir de chair fraîche. Et point de prostitution. Merci Nanni.
RépondreSupprimerMerci Hypathie. Quand ils ne tolèrent pas l'intolérable, ce n'est jamais chez eux. Autrement dit la poutre de la traite internationale des filles de tous âges et de toutes couleurs n'est rien contre la paille de la cliente blanche de prostitués noirs.
RépondreSupprimerA Tania : super article, merci Tania. Je ne connaissais pas cette chanson de Ferré. Dans l'article, elle oublie juste de dire que le festival va préférer de la médiocrité masculine qui privilégie le discours masculin plutôt que de la médiocrité féminine qui donnerait sa vision féminine du monde. Car dans ce festival il y avait apparemment un maximum de films très nuls (à ce que j'ai lu un peu partout).
A lucia mel : ils ont eu chaud aux fesses et ont donné la palme à Hanecke qui la mérite certainement car c'est un très grand cinéaste (je l'apprécie beaucoup) et il n'est pas sexiste pour un sou.
Il valait mieux pour eux parce que si en plus ils avaient donné la palme à des super ringards sexistes (même jeunes, la ringardise n'étant pas vraiment une question d'âge), ils se seraient définitivement discrédités
à la face du monde.
Cela dit si on cherche bien c'est quand même une histoire de femme déglinguée. Mais au moins ca reflète la réalité.
On est encore loin de la super héroine qui sauve le monde :)
Moi ce qui m'a énervé (en plus de l'absence de femmes) c'est cette culture de la prostitution dont on a franchement marre. Déjà que les femmes croient être obligées de s'habiller comme des prostituées et que la prostitution n'arrête pas de contaminer la vie des autres femmes (et fillettes) au lieu que l'on s'emploie à l'éradiquer, pas la peine d'en rajouter sous couvert d'"art" !
Qu'est-ce que veut dire "Merci Nanni" ?
Il semblerait que les observateurs aient trouvé le festival en demi-teinte, euphémisme pour désigner une sélection plutôt médiocre dans l'ensemble. Les critiques du film "Sur la route" le chef d'oeuvre de Kerouac en témoignent : plate adaptation illustrative. D'ailleurs Gilles Jacob commence à faire un début d'autocritique dans le Monde : http://www.lemonde.fr/festival-de-cannes/breve/2012/05/27/quelle-place-pour-les-femmes-a-cannes-suite-et-fin_1708058_766360.html
RépondreSupprimerEspérons que l'année prochaine, on verra des mises en scène de femmes !
A Hypathie : merci pour l'article. J'en retiens qu'ils cherchent désespérément des films de femmes. Super, Mais il faudrait qu'ils arrêtent de chercher des films de femmes qui ressemblent à des films d'hommes ou qui vont dans le sens de leur grosse mégalo (ou méga-mégalo) ! Là j'imagine que ça coince trop pour y arriver.
RépondreSupprimer@Euterpe : d'accord avec toi, et, malheureusement, pas seulement au cinéma... la "culture de la prostitution" a pignon sur rue... Merci Nanni, c'était parce qu'il avait été le Président d'un jury qui avait choisi un film (d'accord aussi que les femmes cinéastes en ont été écartées)loin de ces schémas que tu dénonces (ou le plus loin possible). Trintignant, Riva. Hiroshima, mon Amour... le retour.
RépondreSupprimerA lucia mel : lis ceci : http://sandrine70.wordpress.com/2012/05/28/cannes-le-palmares-ou-lentre-soi-dun-tout-petit-groupe-ferme-dhommes/#comments
RépondreSupprimerje crois que je reviens sur ce que j'ai dit sur Haneke...