Après un périple en sac à dos d'une semaine de Berlin à Bruxelles à Paris à Pau à Canfranc (Espagne) puis de nouveau à Pau et à Paris me voilà de retour à Berlin.
Mis à part l'agression de la publicité sexiste qui est très violente dans le Paris under et overground comparée à toute autre ville à commencer par Bruxelles (où je n'ai pas vu de pub du tout dans le métro), j'ai été choquée par la manière dont on a présenté dans la capitale de la France les oeuvres d'Artémisia Gentileschi, c'est à dire sans évoquer son nom complet, ne conservant que son prénom.
Hormis le fait que cette affiche est superbe par le choix de ce détail du tableau où Judith (et sa servante) décapitent Holopherne, il y manque le nom complet de la peintresse.
Qui est "Artemisia" ? Une plante ? Un magasin bio ? Une marque d'équipement de chasse ?....
Il paraît qu'il ne faut pas confondre la fille avec son père...la bonne blague ! Qui donc connaît le père d'Artémisia Gentileschi ?
Et pourquoi ne pas plutôt réduire le nom de son père, moins connu qu'elle, en "Orazio" ?
Ai-je déjà vu une exposition de "Pablo" ? De "Salvador" ? D'"Edouard" ? D'"Eugène" ? D'Edgard" ?
Le seul peintre que l'on appelle parfois par son prénom est le plus connu de tous : "Leonard". Mais qui ne sait qu'il s'appelle "de Vinci" ?
Le nom de GENTILESCHI serait à ce point connu ?
Non. En réalité, on veut bien honorer une peintresse mais à condition de la réduire à son prénom afin que personne ne puisse la nommer communément.
Elle ne risque pas de parvenir à cette consécration de l'artiste dont le prénom est devenu superflu : Klimt, Beuys, Manet, Baselitz.... Pour les femmes, le superflu suffit. Alors qu'il est plus facile de retenir un prénom associé à un nom qu'un prénom seul, le film qui parle de la peintresse laisse également son nom aux orties : "Artémisia" sera son unique titre. De même avec "Séraphine" pour laquelle ni le film ni l'expo n'a retenu son nom "Louis" ni sa localisation "de Senlis".
D'ailleurs les oeuvres de Séraphine Louis sont également exposées au musée Maillol.
Un musée qui n'est, par dessus le marché, guère facile à trouver lorsque l'on n'est pas de Paris mais c'est une autre histoire....ou la même ?
C'est en visitant l'expo de gentileschi que je suis tombée sur les peintures de Louis, que j'ai trouvées incroyables. Ça méritait d'être dit (et je ne l'ai vu nulle part dans les journaux, bien que l'exposition aie eu un certain retentissement médiatique).
RépondreSupprimerA ko : mais moi pareil ! Heureusement que j'ai eu la curiosité d'aller jeter un coup d'oeil sur la collection permanente ! Sans quoi je serais tout bonnement passée à côté.
RépondreSupprimerLe film qui est dédié à Séraphine est superbe. Je ne vais que très rarement au cinéma pour ne pas faire la fortune de l'industrie du film , mais celui-ci m'avait beaucoup plu.
RépondreSupprimerA Fa# : très beau film, en effet. Le titre l'est nettement moins. D'un côté nous avons les titres de films : "Goya", "Klimt", "Rembrandt", "Modigliani", "Van Gogh" et de l'autre : "Seraphine", "Frida" et "Artemisia". Désolée mais on se moque très sérieusement de nous.
RépondreSupprimerJe reconnais qu'il est très difficile à nous les femmes de tracer notre chemin à égalité avec les hommes. Mais comment faire pour valoriser nos travaux, nos idées, nos convictions ? Quelles voies, quels procédés employer ?
RépondreSupprimerOn ne peut pas éternellement se contenter de dénoncer les manquements à notre égard. Il faudrait trouver une autre manière, douce , élégante et en même temps ravageuse dans le sens de convaincante.
Bref, comment s'imposer intelligemment ?
A Fa# : Oui, comment faire ? Nous ne pouvons rien faire de plus que ce que nous faisons déjà et sommes vouées à attendre le bon vouloir de ces messieurs qui ont le pouvoir de nous reconnaître comme leurs égaux ou non. Sans leur consentement nous sommes condamnées à râler éternellement. Il n'y a rien que nous n'ayons déjà fait pour les convaincre. Mais comme il n'y a pas plus sourd que celui qui ne veut rien entendre...
RépondreSupprimer"S'imposer intelligemment" voudrait dire que nous essayons jusqu'à présent de nous imposer idiotement. En fait, si j'étais provocatrice (ce que je suis bien un peu, je le reconnais), je dirais que la seule solution "intelligente" (ou pas) que nous n'ayons pas encore essayée est la violence. Pour le reste, tout a été fait.
Votre point de vue est pessimiste, je ne le partage pas , la violence n'est jamais une bonne solution pour attirer l'attention car en seconde lecture , elle nous dénigre. Je cherche ...le piège est d'imiter les gens de pouvoir, je cherche encore ....
RépondreSupprimer"je dirais que la seule solution "intelligente" (ou pas) que nous n'ayons pas encore essayée est la violence. Pour le reste, tout a été fait."
RépondreSupprimerI respectfully disagree. Vous pouvez essayer la violence si vous le souhaitez (bien que je sois personnellement dubitatif sur le résultat): sans volonté de prendre ce pouvoir et de l'exercer, comme tout pouvoir, en détruisant toute opposition, vous n'arriverez à rien.
On ne peut pas recevoir un pouvoir, on ne peut que le prendre. Quand on le reçoit, c'est une allégeance. Pas une libération.
Qu'est-ce qui bloque? Pourquoi les femmes n'ont-elles massivement pas la volonté de s'imposer à des postes de pouvoir? (grandes écoles, politique...) Parce qu'il y a conditionnement? Alors agissez sur le conditionnement... Tous les personnels politiques (masculins ou non) viennent d'une minuscule élite, les autres citoyens sont exclut de ce pouvoir. Pourquoi n'arrivez vous pas à infiltrer cette élite? Est-ce que cela a été essayé, vraiment?
le mouvement féministe, comme la plupart des mouvements de gauche par ailleurs, viennent de la société, pas du microcosme qui détient le pouvoir. C'est normal que ce soit dur d'y pénétrer. Comme toute conquête du pouvoir. Et après il faut le défendre.
Vous pouvez aussi militer via l'éducation: on est à la troisième génération post-68, pourquoi l'égalité, portée massivement par les femmes de cette époque, n'a pas eu d'effet dans l'éducation des garçons nés depuis?
Dans tous les cas ça demande une motivation et un sacrifice personnel, peut-être sur plusieurs générations.
A vous de voir si c'est la vie que vous souhaitez.
A Fa# : mon point de vue est carrément désespéré, dirais-je ! :) Cette allusion à la violence m'est venue en pensant à la formule de Benoîte Groult : "le féminisme n'a jamais tué personne, le machisme tue tous les jours". Nous priver de l'égalité est en soi une violence à laquelle nous répondons chaque jour par la non-violence.
RépondreSupprimerA Xav : je n'ai pas écrit qu'il fallait essayer la violence, j'ai écrit que nous ne l'avions jamais essayée, nuance.
Pour le reste nous n'avons pas le pouvoir d'aller plus loin que l'infiltration. Et encore il nous est presque impossible de le faire sans avoir été au préalable passées au scanner. La forteresse est très bien gardée. Et dès que nous nous infiltrons quelque part, le pouvoir mâle nous repère et nous éjecte.
Il est aussi difficile de se débarrasser d'une élite goinfre qui bouffe la laine sur le dos des pauvres que de venir à bout des brontosaures du machisme.
D'ailleurs ce sont plus ou moins les mêmes.
Vos conseils concernant une prise de pouvoir féministe, reviennent à ceux donnés il fut un temps aux ouvriers pour renverser la classe des patrons.
Les ouvriers épuisés, divisés et maintenus de force sous la botte ont eu si fort à faire pour se débarrasser de la tyrannie qu'ils n'y sont pas arrivés. Donc...voilà.
De mon point de vue le féminisme a besoin des hommes. Des hommes qui luttent à ses côtés. Des hommes comme Zeromacho et ce genre d'assoc' qui en ont marre de cette confiscation permanente par la couille de tout ce qui fait le sel de la vie.
@euterpe:
RépondreSupprimerSi vous me permettez une remarque: contrairement aux ouvriers, les femmes sont présentes dans toutes les couches sociales. C'est un atout que la classe ouvrière n'a jamais eu, par définition. Enfin, sur la violence, j'ignore totalement si cela peut-être efficace ou non. J'en doute aujourd'hui, mais je constate néanmoins que tous les avantages sociaux européens ont été acquis dans un contexte de forte violence (internationale ou civile) depuis 36 à 46 et jusqu'à la chute du mur. Depuis, nous avons eu ma retraite à 60ans et les 35 heures qui ont été fortement opposées par leurs adversaires. Le niveau de haine exprimé durant la campagne est caractéristique.
Coté luttes féministes, je constate que, malheureusement, au sein des classes dominantes, on trouve peu de femmes prêtes à s'engager pour une égalité réelle. Pourquoi? N'y a-t-il pas là une marge d'action possible?
Enfin, au niveau de la mobilisation possible, sans violence, si on prend les deux exemples de luttes non violente les plus célèbres du XXème siècle: Martin Luther King et Gandhi, il leur a fallu des années de mobilisation numériquement massive pour réussir. Cela a-t-il existé dans le mouvement féministe? (oui à l'époque des suffragettes, mais depuis?) Quel serait l'impact, croyez vous, d'un mouvement type "Occupy" d'un an ou deux uniquement composé de femmes?
Je n'ai pas de leçon à donner en la matière, je suis très mauvais en terme de militantisme. Je m'interroge simplement sur le fait de savoir si, réellement, tout a été tenté. Je crois qu'il faut surtout éviter de se faire accorder un droit. Il vaut mieux le prendre, c'est plus facile à défendre ensuite.
a Xav : on peut voir les choses autrement : les femmes ne peuvent vivre en autarcie et les hommes non plus. La classe ouvrière qui comprend des hommes ET des femmes, à la limite, si.
RépondreSupprimerIl est donc plus difficile de se battre contre son père, son fils, son frère, son mari que contre des étrangers.
Être "présentes dans toutes les couches sociales" dans ces conditions n'est pas un atout mais un inconvénient.
Quant aux classes dominantes les femmes y ont toujours été particulièrement aliénées. Pourquoi ? C'est là que vraisemblablement le machisme se montre le plus violent. Nos élites ont toujours été décalés. La femme du peuple a toujours été plus émancipée que la femme de l'élite. Par contre, elle a toujours été brutalement réprimée par l'élite...on n'en sort donc pas.
Quant aux suffragistes ("suffragettes" fut un nom donné par les hommes de l'époque acharnés à dénigrer le mouvement), elles se sont sacrifiées. L'une est morte sur le champs de bataille (Emily Davison). Les autres ont beaucoup pâti.
Cela veut dire qu'il faut lutter au prix de beaucoup de choses, et en définitive de sa vie, pour que les autres jouissent des avantages obtenus. C'est ce qu'ont fait Gandhi, Martin Luther King, Emily Davison, Olympe de Gouges et d'autres femmes que l'on n'honore bien sûr pas puisque c'est l'homme qui décide QUI doit être honoré...
Gandhi et Martin Luther King resteront dans la mémoire de l'humanité comme de grands hommes.
Il n'y a jamais de grandes femmes puisque...etc...
A Emelire : ah non, j'ai hésité mais ne l'ai pas pris.Mais cela ne m'étonne pas. Déjà, sur les panneaux et dans la bouche d'une conférencière qui faisait le guide pour un groupe, j'ai lu/entendu bien des choses énervantes.
RépondreSupprimerIl y a une insistance incroyable sur l'affect quand il s'agit d'une femme, le mot "passion" revient sans cesse (à commencer par l'affiche), alors qu'il y aurait eu beaucoup à dire sur le génie de son style, en particulier l'originalité de ses compositions et l'incroyable rendu des textures, en particulier des étoffes, mais cela semblait moins important que d'en tartiner un max sur sa vie privée.
De plus, la conférencière parlait de la violence et la cruauté de ses sujets, alors que le sujet Judith et Holopherne est un poncif de son temps, le genre de sujet que tous les peintre traitaient, Le Caravage en tête.