sont des sorcières autrefois brûlées.
Géographie de la "sorcellerie" dans l'ancien temps : surtout le Nord, La Lorraine, l'Est, le Languedoc et le Sud-Ouest. Selon R. Muchembled, le centre de la France était bien tenu en main par la royauté, ainsi le pouvoir devait être étendu où il ne se trouvait pas encore : dans la périphérie du royaume. Les persécutions devaient servir à faire comprendre aux populations QUI dirigeait le pays. Devant les résistances rencontrées, la procédure démonologique aidait les administrateurs à fabriquer des coupables ; en ce sens, la sorcière était devenue un bouc émissaire dont le supplice devait empêcher les adversaires du pouvoir central à persévérer dans leur indiscipline. La chasse aux sorcières a permis de cristalliser sur les sectateurs du démon la notion de déviance par rapport aux normes sociales nouvelles que l'on voulait instaurer. Les élites culturelles imposaient, par le biais des bûchers, le respect de ces normes. Les paysans se savaient coupables de pratiquer parfois des rites de guérison et de protection défendus, ainsi, pour ne pas être accusés de sorcellerie, ils s'efforcaient de se différencier des sorciers et une atmosphère d'inquiétude permanente pesait sur les villages.
Les persécutions concernaient surtout les femmes : 82% des accusés dans le Nord. En tant que filles d'Eve, elles représentaient celles à cause de qui la mort était entrée au monde. Les élites de l'époque craignaient les femmes et notamment leur activité sexuelle supposée ; de ce fait les procès de sorcellerie avaient une dimension sexuelle très importante, les juges tentaient toujours de faire avouer aux suspects la copulation satanique dans ses moindres détails : le " sexe du démon était froid et faisait froid à l'intérieur".
Sur 155 cas étudiés, 105 se sont avérés être des femmes dont 32 de plus de 50 ans alors que 7 suspectes seulement avaient moins de 20 ans, une enfant de 8 ans et 2 adolescentes de 13 ou 14 ans.
Les magistrats étaient hantés par l'idée de la sexualité, de la mort et de la décrépitude, c'est pourquoi, la sorcellerie unissait, ici, les thèmes du diable, de la vieillesse féminine et du meurtre. Or les vieilles femmes étaient les dépositaires privilégiés des croyances populaires, elles transmettaient les connaissances et recettes anciennes lors des veillées villageoises, ou directement aux enfants des deux sexes qui leur étaient confiés durant les premières années de leur vie. Les chasseurs de sorcières voulaient surtout exterminer ces vieilles femmes qui pouvaient nuire au développement du christianisme épuré. Les sorcières étaient considérées par les élites culturelles et sociales comme des reliques anachroniques d'un temps païen ainsi que des freins à la diffusion de l'orthodoxie et de la morale nouvelle, et pour finir comme des concurrentes de tous ceux qui cherchaient à modifier la culture populaire traditionnelle. Le mouvement de la chasse aux sorcières venait du "haut", et était entretenu par la théorie démonologique mais diffusé grâce à une partie des ruraux qui adhérait à la persécution.
Ceci est un extrait résumé de la thèse de Karine Mrugala portant sur le livre de Robert Muchembled "La sorcière au village XVe-XVIIIe siècle" (Gallimard/Juillard 1991).
Aujourd'hui, les vieilles femmes ne peuvent plus transmettre de connaissances anciennes dans un monde où l'industrie technoscientifique impose sans relâche de nouvelles normes de société. D'autre part, elles sont, incessamment sollicitées par les médias pour se prêter à la course à la jeunesse éternelle et sont sommées de faire l'effort de ne jamais paraître vieille ou le moins possible. Si elles se retrouvent parquées dans un asile pour vieillards, c'est qu'elles auront échoué.
Là où, dans l'Ancien Régime on eut recours à un prétendu "commerce avec Satan" pour arracher aux peuples "coupables" leurs traditions ancestrales, pour satisfaire à l'économie de marché mondialisée, le XXe siècle a pu éradiquer au moyen de la télé, du cinéma, de la pub et des médias ce qu'il restait de savoirs, de coutumes populaires et de patois régionaux de ces temps-là .
Et en 2010 comme en 2012, les "nouveaux" boucs émissaires de la résistance qui durcit contre cette économie mondiale chaque jour plus catastrophique pour la planète entière, sont, quel hasard !, les tsiganes (ou Rroms) réfractaires à la sacro-sainte "intégration". Ne songez donc pas à vivre dans une roulotte en vous passant du fratas technoscientifique obligatoire sans quoi on brûlera...vos affaires. On a compris entre temps que démunir entièrement les gens était plus sournois donc plus efficace que de les tuer.
C'est Victor Hugo qui nous salue.
Retour à la case de l'innocente Esmeralda qui n'a rien fait que d'être libre ce pourquoi elle doit finir pendue comme sorcière dans le roman "Notre-Dame de Paris".
(Quant aux Pussy Riots accusées de pousser des cris "contre nature" dans une église, elles ont bien entendu le grand tort de ne pas s'appeller les "Dick Riots", on l'avait compris).
Esméralda n'est pas brûlée mais pendue (ce qui explique qu'on retrouve son corps enlacé avec celui de Quasimodo d'ailleurs) :)
RépondreSupprimerJe regardais hier les infos à la télévision (une fois n'est pas coutume) et j'ai entendu la fameuse rengaine sur l'intégration des Roms. Ah ma brave dame, il FAUT qu'ils s'intègrent, ces gens. Il FAUT qu'ils aient un travail bien COMME IL FAUT...
Or plus j'y réfléchis, plus il me semble que ce n'est pas ce que veulent les Roms. C'est bien, c'est mal, ça nous dérange peut-être, mais il me semble que ce peuple ne souhaite pas "s'intégrer".
ah oui c'est vrai, j'ai oublié donc je vais écrire "pendue comme sorcière" :) vu qu'elle était quand même accusée de sorcellerie.
SupprimerOui, moi aussi ça m'énerve. On nous oblige tou.te.s à vivre de la même façon et si tu choisis de ne pas faire comme tout le monde, tant pis pour les malheurs qui pourraient, "par hasard", t'arriver.
À Berlin, une association dite "d'intégration" (des Turc/que/s à Berlin) vend des T-shirts humoristiques avec l'inscription dans le dos "je suis un.e étrange(è)r.e qui refuse de s'intégrer". J'en ai acheté un pour une copine française.
En plus, les femmes de plus de 50 ans ne peuvent plus procréer : pour une société patriarcale dont les habitudes marchandes sont basées sur l'échange des femmes (ou des chèvres, vaches, ou tous animaux de rapport), elles ne sont plus productives, donc on peut/doit s'en débarrasser ! Tu as raison de souligner que les vieilles femmes sont détentrices de savoirs et que les empêcher de le transmettre est une perte sèche pour les générations futures.
RépondreSupprimerPour les Rroms, j'entends en ce moment en France que seulement 150 professions leur sont réservées ! Pour un pays qui donne volontiers des leçons de morale au monde entier, franchement, ça la fout mal !
En fait, la culture du jeunisme s'avère être un excellent moyen de contrôler en permanence la population. Les savoirs actuels ne proviennent plus QUE DE L'INDUSTRIE !
SupprimerC'est fortement pensé, non ?
On devrait redonner de la place, et pas seulement pour les Rroms, aux anciennes professions artisanales. Mais cela ferait concurrence au monopole industriel, bien sûr.
On est donc bien tenu en main par l'industrie, il n'y a pas à dire.
Merci Emelire !:)
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