à la recherche des femmes perdues dans l'espace-temps et autres aventures...
jeudi 30 juin 2011
"Elle ne se gêne pas"
Me voici de retour de mon périple. Un grand merci en passant aux blogueuses Hélo et gloup qui m'ont hébergée lors de mes passages. C'était très très sympa et je suis très très ravie de les connaître pour de vrai maintenant !
Sur mon parcours, j'avais programmé la visite du château de Blois, et voilà qu'en traversant les salles, j'avise un groupe d'enfants menés par un guide. Curieuse de connaître sa présentation des objets exposés, je l'écoute, placée un peu en retrait de la petite troupe.
Les enfants lèvent de temps en temps le doigt pour poser une question : "Oui, jeune homme ?" répond le guide. Les filles également lèvent le doigt (du moins au début) mais je n'entendrai jamais aucun "Oui, jeune fille ?" (on remarquera que sans vêtements genrés, le guide ne pourrait filtrer ainsi les sexes. A méditer).
Nous entrons dans la "galerie de la reine" au parterre de carrelage bleu, jaune, noir et blanc dans laquelle se dresse un trône, un lit et une rangée de bustes d'hommes. La reine n'y figure pas. Il s'agit de son mari et de deux de ses fils.
Mais de quelle reine s'agit-il ? De Catherine de Médicis, bien sûr ! Celle que des circonstances inattendues ont placées à la tête du royaume de France et qui a beaucoup marqué le XVIe siècle comme nous le savons assez.
J'entends le guide parler de son influence sous le règne de Charles IX : "Catherine de Médicis, c'est une femme qui aimait beaucoup le pouvoir, alors c'est elle qui avait le pouvoir MAIS ELLE N'AVAIT PAS LE DROIT, hein, ELLE N'AVAIT PAS LE DROIT (il élève le ton et martèle son propos non sans un petit coup d'oeil inquiet de mon côté...a t-il senti le regard ironique dont je le couve ? En effet que ne précise t-il pas que les mâles se sont arrogés TOUT le pouvoir et cela malgré le fait que contrairement à cette femme "éhontée", ils détestent cordialement l'exercer? (c'est de l'ironie)) Elle ne se gênait pas !" ajoute t-il.
Nous nous arrêtons devant un tableau représentant une scène de danse : la volta où la femme est portée par son partenaire (pour effectuer un saut un peu rock'n roll). Le guide explique que la scène est un peu coquine, un peu grivoise (il articule le terme). "Qu'est-ce que ca veut dire grivoise?" dit un garcon. Pour le guide ce terme est clair : un peu osée, répond-il.
Nous entrons dans une salle couverte de monogrammes représentant un H et deux D entrelacés. Le guide explique aux enfants que le roi Henri II avait une favorite, c'est à dire une maîtresse, précise t-il mais je ne sais pas si les enfants (comme pour "grivoise") sont plus avancés, qui s'appelait Diane. De ce fait on aurait dit que le H et les deux D signifiaient Henri et Diane, ajoute t-il, mais ca voulait dire Henri Deuxième. Or à la mort de Diane, Catherine de Médicis, "elle ne se gêne pas" (textuel !), fait prolonger les extrémités des D par des boucles les transformant en "C" comme Catherine.
[N'était-elle pas la femme légitime d'Henri II ? En quoi "ne se gêne t-elle pas ?". N'est ce pas plutôt Henri II qui ne se gêne pas d'avoir une maîtresse ? Mais non. Nous sommes en France, pays des Mazarine Pingeot, des DSK, des "grivoiseries". Les femmes que ca gêne et qui le font savoir c'est elles qui "ne se gênent pas" !].
Nous arrivons devant une vitrine avec un petit portrait de Catherine de Médicis. Question d'un garcon : "C'est un homme ?". Sans doute est-il trop surpris de voir une femme à l'honneur après tout ce qui a été dit auparavant. "Quoi ? répond le guide étonné, non, c'est une dame". Là, je me flatte de penser que ma présence n'y est peut-être pas tout à fait pour rien car voilà le guide qui se lance dans une entreprise de réhabilitation de Catherine. Elle aurait été détestée pour n'avoir pris parti ni pour les catholiques ni pour les protestants et on lui aurait attribué le massacre de la Saint-Barthélémy alors qu'il n'était question que d'éliminer quelques têtes. Mais le voilà qu'il détaille, à dessein peut-être, la manière dont elle a été traitée "...alors on a dit que c'était une empoisonneuse, une mégère...". Le nom de "mégère" frappe l'un des garcons (les filles sont de plus en plus distantes) : "C'est quoi une mégère ?". Réponse : "C'est une femme méchante" (ah bah oui évidemment quelle question !).
On passe dans le "studiolo", une pièce toute tapissée de lambris dans lesquels sont aménagés des placards secrets et invisibles qui s'ouvrent au moyen d'un ingénieux mécanisme. On aurait dit à tort, explique le guide, que Catherine de Médicis, sa réputation d'empoisonneuse aidant, y aurait caché ses poisons. Un garcon demande pourquoi Catherine de Médicis se servait-elle de poisons. Pour éliminer ses ennemis, dit le guide, c'était courant au XVIe siècle. "Mais c'est débile !" s'écrie le même garcon ou un autre. Petite douleur au creux de l'estomac. Qu'un gamin d'école primaire se permette ce jugement à propos d'une grande reine du passé en dit long sur le sexisme ambiant. Il a bien compris que le guide n'a aucune estime personnelle pour cette femme qui d'après lui "ne se gêne pas", rappelons-le, et pense visiblement se mettre ainsi en valeur. D'ailleurs le guide et son sourire entendu quand il parle de la "non empoisonneuse" Catherine de Médicis, ne trompe personne.
Il se met,d'ailleurs encore, à parler de l'étage supérieur (au dessus du studiolo) que Catherine, "elle ne se gêne pas", précise t-il pour la 3e fois, se serait attribuée sans vergogne aucune, alors que cet étage royal aurait du revenir au roi. Une excuse quand même : il ajoute en souriant ironiquement qu'étant vieille elle avait besoin de plus de confort.
Bon finalement ma présence ne le gêne pas autant que je me l'étais peut-être un peu trop vaniteusement figuré.
Je passe sur sa description de Henri III à qui on prêtait des "moeurs un peu curieuses" (sic), "Quoi?" demande un garcon. "Des moeurs un peu curieuses !, articule t-il sans préciser, mais Henri III avait une femme, Louise de Lorraine. Puis il se ravise. Mais attention : en ce temps les princes et les princesses, ils ne se mariaient pas par amour, hein, mais pour la politique. Henri III et Louise de Lorraine c'était un mariage d'amour parce que Henri aimait éperdument Louise de Lorraine". Il ne précise pas si Louise de Lorraine l'aimait. Or elle n'avait rien à dire. On ne repousse pas un roi. Je précise que des fillettes écoutaient tout cela mais le guide ne se souciait pas de l'impact de ses propos sur elles puisque pour lui, elles étaient invisibles.
Le voilà décrivant la guerre des 3 Henri : Henri de Guise, Henri de Navarre et Henri III. La question d'éliminer ses ennemis par le poison ou par l'épée, peu importe, n'est plus un sujet de rigolade, parce qu'il s'agit ici d'hommes, 'tention.
"C'est Guise qui devient de plus en plus puissant, explique t-il. Henri III, la seule solution qui lui reste, c'est d'assassiner son rival (Henri III ce n'est pas Catherine l'imposteuse qui usurpe le pouvoir masculin et qui empoisonne, ce qui n'est pas très top. Henri est "dans son droit" lui. Donc : hop on trouve normal d'assassiner et pas un garcon ne moufte). Henri de Guise qui se croit puissant (malheur aux vaincus, hein, c'est bien fait pour lui) [vient au rendez-vous du roi sans se méfier].....le guide, les enfants et moi un peu en retrait entrons dans la chambre du roi où Guise est mort assassiné au pied du lit. Le guide tout sourire : "C'était la petite surprise".
Un garcon inquiet : "C'est le plus puissant qui est mort ?" (sous entendu : l'intérêt dans la vie d'un homme, le garcon l'a compris, c'est d'être LE PLUS puissant), "Oui répond le guide qui a très bien compris le sens de la question, mais la guerre continue, hein" (sous-entendu : ses amis vont le venger, d'ailleurs, salle suivante, s'étale sur le mur la scène de l'assassinat de Henri III par le moine Jacques Clément, un sbire des Guise. Ainsi, même mort, LE PLUS puissant triomphe. Quant aux femmes, elles n'ont pas le droit d'être puissantes et si elles le prennent c'est qu'elles ne se gênent pas voilà ce qu'auront appris les enfants ce jour-là).
A la fin de la visite, je m'approche des enfants et leur demande leur âge. "Dix ans" me dit un garcon. "Et en quelle classe êtes-vous ?" demandé-je à une fille : "en CM1", me répond-elle.
mercredi 15 juin 2011
Non inferiora secutus
J'en avais déjà parlé à propos de Thérèse d'Avila ici, au XVIe siècle, ce que l'on appelait Dieu ne se distinguait pas aussi radicalement qu'aujourd'hui de l'astre du jour et "Très-Haut" avait comme un air de synonymité avec "Soleil".
Dieu a pris la place du Soleil et la Science celle de Dieu. Depuis, le nucléaire est passé par là et la présomption (plus masculine que féminine) mortifère de se substituer à une force créatrice qui nous dépasse, cause bien du souci à l'humanité.
En attendant, donc, d'être tous irradiés par les effluves en provenance de Fukushima qui sont en train de se déposer partout dans les prés, je vais vous parler d'une fleur : le souci.
Claude Paradin, dans ses „Devises héroiques“ (1557) à propos du souci, qui, comme le tournesol, a la propriété de se tourner vers le soleil, rappelle les mots de Virgile „Non inferiora secutus“, Qui ne suit pas les choses inférieures (Énéide, VI, 170) et ajoute : „La feue Royne de Navarre, Marguerite de France, Princesse très illustre, portait la fleur du Souci en Devise qui est la fleur ayant plus d'affinité avec le Soleil que point d'autre, tant en similitude de ses rayons, ès feuilles de ladite fleur, que à raison de la compagnie qu'elle fait ordinairement, se tournant de toutes parts là où il va depuis l'Orient jusques en Occident, s'ouvrant ou se closant, selon sa hauteur ou sa basseur. Et elle avait telle Devise la tant vertueuse Princesse en signe qu'elle dirigeoit toutes ses actions, pensées, volonté et affections, au grand Soleil de la Justice, qui est Dieu tout-puissant contemplant les choses hautes célestes et spirituelles“.
Le nom de cette fleur "souci" ne fait pas référence à nos tracas quotidiens mais vient du latin solsequia = qui suit le soleil !
Les devises qui se veulent à la fois des attributs et des signes individuels de conduite sont très prisées à la Renaissance et l'on imprime de nombreux livres à leur sujet.
On pourrait un peu les comparer à des totems indiens par le fait que l'on se choisissait presque toujours un végétal ou un animal dont on s'attribuait les qualités.
On dirait aujourd'hui que l'on associait un slogan (devise) à un référent iconique (image). A propos d'iconologie et de Marguerite de Navarre, on sait rarement que c'est cette dernière qui est à l'origine du Collège de France où vient d'entrer Claudine Tiercelin, philosophe analytique spécialiste de l'image qui a prononcé sa lecon inaugurale dans l'amphithéâtre Marguerite de Navarre, justement. Entrée qui n'est pas du goût de nos machistes francais taclés ces derniers temps tout à fait légitimement par nos amis anglos-saxons (tiens la philosophie analytique est un courant philosophique anglo-saxon, la franchouillardise se sent-elle menacée?). Comme me le signale mad meg dans les commentaires du billet précédent, les insultes déguisées en humour journalistique volent très bas dans l'article inséré plus haut.
Et puis à propos de devise, Petit Bateau, au lieu de prendre un bébé pour une marchandise sur l'emballage duquel il faut que soit inscrit ce qu'il y a à l'intérieur à coup de valorisation négative des filles et de survalorisation des garcons (afin de trier dès le berceau qui sera le chef et qui sera son esclave), pourrait-elle, cette marque prisée à travers le monde pour la qualité de ses tissus, se montrer au moins aussi évoluée que nos ancêtres de la Renaissance et exprimer, s'il faut barbouiller des mots sur une grenouillère pour le sacro saint "fun" : un sentiment, un idéal et une vertu à l'instar de nos amateurs/trices d'emblèmes ?
A quoi sert donc que des Marguerite de Navarre et des Claudine Tiercelin oeuvrent pour la culture si des marques de vêtements et autres produits de consommation oeuvrent parallèlement à la barbarie, au sexisme et pourquoi pas, avec cette hyperbibeloïsation des petites filles, à la pédophilie ?
Alors ne suivons pas nous non plus les choses inférieures comme la mode qui s'empare des poncifs les plus rétrogrades pour vendre, suivons plutôt le soleil puisque nous nous approchons du solstice d'été où notre précieux astre brille dans notre ciel plus longtemps que jamais dans l'année.
Je ne vais plus poster beaucoup ces prochains jours parce que je prends la route pour suivre le soleil, moi aussi ! (Retour : au plus tard dans dix jours).
lundi 13 juin 2011
Le phallocée et le gynécée
Ces bandes sont liés à la vie à la mort par la même conviction de la supériorité de leur sexe. Et les femmes ne sont que des empêcheuses de se vanter en rond.
Retournez donc sagement à vos taches subalternes et reprenez la place qui vous est dévolue dans le gynécée.
Dans le gynécée de Catherine de Navarre, les femmes ne pouvaient même pas rester liées à la vie à la mort selon leur souhait. Il fallait toujours se quitter à un moment ou un autre en raison de décisions dont elles étaient exclues comme femmes. De ces drames de séparation sans intérêt pour les grands débatteurs politiques qui entendent écrire l'histoire sans les femmes, qu'ils soient monarchistes ou décroissancistes, un livre a été imprimé, il y a très longtemps : "Marguerites de la Marguerite, l'Adieu des dames de la royne de Navarre".
Extraits :
J'ai délaissé père et frère malade
Mais quand il faut commencer la ballade
De dire adieu à toy, notre princesse
Tous les ennuis dessus ditz ont prins cesse
Damoiselle Jehanne Defay de la Benestaye à la reine de Navarre
Moi Saint-Pather mettrait en ce lieu cy
Mon triste adieu venant d'un coeur transy
Devoir en deux ce qui doit estre en un
Damoiselle Catherine Legay de Saint-Pather à la reine de Navarre
Icy mettra sans attendre à demain
Pour dire adieu, Clermont, sa triste main
Damoiselle Francoise de Clermont à la reine de Navarre
samedi 11 juin 2011
Poèmes de femmes adressés à des femmes
Soit que ton bon esprit m'attire à son amour
Ou les vertus qui font près de toi résidence
Je t'aime, Torigny, et sans toi je ne pense
Que mon coeur ennuyé puisse vivre un seul jour...
(il me manque ici une strophe que je ne possède qu'en allemand)
Nous entr'aymons si fort que si l'une est absente
L'autre n'a rien qu'ennui et quand elle est présente,
Ce ne sont que sourir', que liesse et bonheur
aussi c'est bien raison vu la grandeur extrême
De ton gentil esprit qu'extrêmement je t'aime
Et que ton amitié soit de pareille ardeur
Ces vers sont adressés à Jeanne d'Albret par sa dame d'honneur Catherine d'Aster d'Aure dont on l'a séparée :
Je le requiers que me veuille permettre,
Que mon adieu ici je puisse mettre.
A Dieu je dis celle, dont la présence
J’ai désiré depuis la mienne enfance ;
Et maintenant que j’ai reçu ce bien !
Te perds de vue et ne sais pour combien.
Car un mary ou toi, ou moi prendre,
Dont éloigner ta vue me faudra.
Mais j‘ai espoir que ceux que nous prendrons,
En liberté plus grande nous rendrons
De nous revoir ; et quoi qu’il advienne,
Je te requiers que de moi te souvienne.
Car quelque part que tu ailles, ira,
Et vive ou morte à jamais t’aimera
Ta Catherine, étant d’Aste nommée,
Qui de regret est quasi assommée !
jeudi 9 juin 2011
Playdoyers de femmes dans le prolongement des siècles
XVIIe
(...) Finalement si l'Ecriture a déclaré le mari, chef de la femme, la plus grande sottise que l'homme peut faire, c'est de prendre cela pour passedroit de dignité. Car vu les exemples,autorités et raisons notées en ce discours, par où l'égalité des grâces et faveurs de Dieu vers les deux espèces ou sexes est prouvée, voire leur unité mesme, et vu que Dieu prononce : Les deux ne seront qu'un : et prononce encore : L'homme quittera père et mère pour suivre sa femme ; il paraît que cette déclaration n'est faite que par le besoin exprès de nourrir paix en mariage.
Lequel besoin requérait, sans doute, qu'une des parties cédât à l'autre, et la prestance des forces du mâle ne pouvait pas souffrir que la soumission vint de sa part. Et quand bien il serait véritable, selon que quelques uns maintiennent, que cette soumission fut imposée à la femme pour châtiment du péché de la pomme : cela encore est bien éloigné de conclure à la prétendue préférance de dignité en l'homme. Si l'on croyait que l'Ecriture lui commendât de céder à l'homme, comme indigne de le contrecarrer, voyez l'absurdité qui suivrait : la femme se trouverait digne d'être faite à l'image du Créateur, de jouir de la très sainte Eucharistie, des mystères de la Rédemption, du Paradis et de la vision voire possession de Dieu, non pas des advantages et privilèges de l'homme : serait-ce pas déclarer [par là] l'homme plus précieux (...) que ces choses [L'eucharistie etc...n.d'E.], et partant commettre le plus grave des blasphèmes ?
XXIe
(...) Mais enfin, et surtout, il serait temps de considérer qu'une femme journaliste politique peut exercer son métier normalement sans être obligée de repousser des hordes de Don Juan.
Elle peut s'intéresser aux débats d'idées, dresser le portrait d'un candidat, enquêter sur les enjeux cachés d'une nomination, suivre une campagne électorale, sans succomber au charme supposé de ses acteurs.
Elle peut avoir le souci d'informer ses lecteurs sans être fascinée par les hommes politiques. Elle peut s'intéresser au pouvoir sans trouver forcément séduisants ceux qui l'exercent. Elle peut obtenir une information sans battre des cils ou croiser haut la jambe.
Elle peut avoir du talent sans que cela n'ait rien à voir avec sa laideur ou sa beauté. Elle peut remettre à sa place un ministre qui se croit Casanova. Elle peut même percevoir, derrière le compliment galant d'un élu, le souci qu'il a de l'article qu'elle va faire plutôt que les effets d'un charme qu'elle n'a pas mis en oeuvre.
En somme, il serait temps de considérer qu'une femme peut se comporter professionnellement sans qu'on la soupçonne systématiquement de s'être, au sens littéral du terme, couchée.
mardi 7 juin 2011
Quand une victime de viol n'est pas perçue comme une victime de viol, une victime de la torture n'est pas perçue comme une victime de la torture
Si le meurtre est depuis longtemps considéré comme un crime, il n'en est pas de même du viol et de la torture.
J'ai fait le tour du web sur tout ce qui a trait à la pauvre saônoise Desle la Mansenée, torturée à Luxeuil en 1529.
Seules les pages anglo-saxonnes la présente exclusivement comme une victime de la torture (et surtout mentionne de quelle torture il s'agit). Le nom de Desles la Mansenée est associé à la torture dite de l'estrapade qui consiste à suspendre le sujet par les bras attachés dans le dos en lui fixant des poids aux chevilles. En anglais : SQUASSATION. Est-ce à dire que parce que la victime a été déclarée coupable (sous la torture) nous, français.es, nous passons vite fait sur ce détail ?
Les pages françaises associent Desle la Mansenée à :
La sorcellerie
1. "(…) il relate ensuite l'affaire Desle la Mansenée depuis la naissance des rumeurs à propos de cette habitante du village d'Anjeux, aux « pratiques médicales suspectes », jusqu'à son exécution par le feu, comme « les pires criminels », en passant par les interrogatoires, la torture et le procès.
Le prévôt de l'abbaye, le prévôt fermier et le doyen s'étant désistés, ce furent les gouverneurs et bourgeois de Luxeuil qui prononcèrent la sentence : « estre publiquement bruslée et arse... »." Hantises et diableries dans la terre abbatiale de Luxeuil.
2. "Dans la première, l’auteur évoque Desle la Mansenée, une femme de 27 ans mariée à un habitant du village d’Anjeux, « créature bien douteuse » à qui on imputait des actes malfaisants et la fréquentation du sabbat et qui, après enquête, subit plusieurs interrogatoires (en 1529), en particulier sur la mort d’un certain Bastien Vuillemin dont elle aurait été la cause, fut soumise à la torture et avoua des rapports très anciens avec le démon... Son procès s’acheva par une condamnation à être brûlée, sa cendre « suspecte » étant « jetée au vent »" Hantises et diableries dans la terre abbatiale de Luxeuil pdf.
3. "La Terre Abbatiale de Luxeuil connut aussi un très grand nombre d’affaires de Sorcellerie. La Sorcellerie y avait déjà eu ses grands jours en 1529 avec le procès Inquisitorial de Desle la Mansenée." http://atheisme.free.fr/Contributions/Exorcisme.htm
Le paganisme
"Voiçi le passage du Que sais-je ?/La sorcellerie, par Jean Palou (Presses universitaires de France, 1960, p.79):
"Enfin les cultes celtiques de Sirona et Bricia, divinités des Sources, assuraient en face du pouvoir écclésiastique haï, la permanence d'une tradition païenne disparue s'opposant à la religion catholique dominante.“
Cet extrait suit un texte consacré aux affaires de sorcellerie sur la Terre Abbatiale de Luxeuil, où la sorcellerie y avait, dit-on, déjà connu de grands jours en 1529 avec le procès Inquisitorial de Desle la Mansenée". Forum arbre celtique
"Desle de la Mansenée : Villageoise d'Anjeux accusée de sorcellerie et d'homicide. Elle est brûlée entre les deux ponts de Saint-Sauveur, près de Luxeuil." La Franche-Comté espagnole
Les pages anglo-saxonnes associent Desles la Mansenée à :
La torture
1- "French housewife Desle la Mansenée, 22, is hanged at Anjeux December 18 after being convicted of murder, heresy, and renouncing the Catholic faith. She has been accused of witchcraft and tortured by squassation (tied with weights and dropped from a height) until she confessed to her prosecutors that the devil has promised her wealth if she will turn from Jesus, has made love to her, made her attend witches' sabbaths, and given her powers not only to poison cattle but actually to alter the weather".
2." SQUASSATION: French victim of the Inquisition who was convicted of murder, heresy, and renunciation of the Catholic faith . Name variations: Desle la Mansenee. Born around 1502; executed on December 18, 1529, in Anjeux, France; married.What has been called "the witch-craze" in Europe, which resulted in thousands of grisly deaths, mostly of women, from the mid-13th century through the 18th century, is aptly illustrated by the last months of Desle la Mansenée. Her trial also offers evidence of the continuing involvement of the Inquisition in witch trials.In early 1529, France's inquisitor-general traveled to the village of Anjeux to …"
Tortures Supplices Droits de la femme et de l'homme
La torture a été interdite par l'Assemblée générale de l'ONU le 12 décembre 1984 et le texte est entré en vigueur le 26 juin 1987 seulement .....
samedi 4 juin 2011
Vertumne et Pomone
Pomone est la déesse des vergers et des fruits comme Diane est celle de la chasse et de la nature sauvage. Et vu d'aujourd'hui, on pourrait dire que la seconde est la déesse du régime carnée tandis que la première dont le nom vient de pomum la pomme, pourrait être celle du végétarisme. En effet Pomone n'aime ni la chasse dans les forêts, ni la pêche au bord des rivières. Seuls les champs et les arbres, chargés de fruits, peuvent lui plaire. Elle ne porte jamais d'arme. Elle manie uniquement une faucille recourbée pour élaguer des branches inutiles, ou émonder des rameaux qui s'étendent trop loin ; parfois elle insère, dans l'écorce entrouverte, une tige étrangère, et fait porter à un arbre des fruits qui croissent sur un autre. Elle prévient la soif des plantes, et arrose les filaments recourbés d'une racine amie de l'onde : ce sont là ses plaisirs et ses soins. Elle ignore l'amour, mais craignant la rudesse de l'habitant des champs, elle entoure ses jardins de remparts de verdure, et en défend l'entrée aux hommes qu'elle fuit.
On remarquera que le végétarisme est associé au jardin cultivé et protégé, c'est-à-dire à la culture, tandis que l'alimentation carnée est associée à la nature sauvage, c'est-à-dire à l'inculture. Vu ainsi, le végétarisme pourrait être interprété comme correspondant à une évolution de la nature humaine.
Les deux déesses fuient les hommes. L'homme semble ne pas être quelqu'un de fréquentable pour ces femmes proches de la nature, chacune sous une forme différente. Diane fait dévorer par ces chiens Actéon qu'elle a surpris en train de l'observer en cachette et ne se lie jamais à un homme de sa vie. Même l'amour devient une histoire de dévoration.
Pomone ignore totalement l'homme qui essaie de la séduire jusqu'à ce qu'il l'appproche sous une forme innoffensive telle celle d'une vieille femme.
C'est le dieu Vertumne qui possède le don de changer de forme (de vertere : transformer). Il est tombé vainement amoureux de la déesse, il s'est efforcé sans succès, de la séduire en laboureur, en moissonneur et en vendangeur, il a donc fini par se métamorphoser en vieille femme qui fait les louanges de lui-même en Vertumne, avec beaucoup de talent. Pomone séduite par son langage (de nouveau la culture ?) accepte de se lier à lui lorsqu'il reprend sa véritable apparence.
Voilà les mots de Vertumne selon Ovide :
"Mais, si vous êtes sage, et si vous voulez un hymen heureux, écoutez les conseils d'une vieille qui vous aime plus que tous vos amants, et plus que vous ne pensez : rejetez des flammes vulgaires, et choisissez Verturnne pour époux. Je réponds de sa foi; car il ne se connaît pas mieux que je ne le connais moi-même. Ce n'est point un volage qui promène ses feux de climat en climat. Il ne se plaît qu'aux lieux où vous êtes. On ne le voit point, tel que l'inconstante foule des amants, s'attacher à la dernière femme qu'il a vue : vous serez son premier et son dernier amour. À vous seule il a consacré son coeur et sa vie. Ajoutez qu'il est jeune, qu'il a reçu le don de la beauté, et celui de prendre toutes les formes qu'il désire. Ce que vous ordonnerez qu'il soit, et vous pouvez tout ordonner, il le sera.
Encore une histoire de ruse pour parvenir à une femme dirait-on mais on peut aussi y voir là une allégorie. L'homme qui a assez d'humilité pour laisser transparaître son côté féminin maternel (femme âgée) et pour passer par la formulation explicite de ses souhaits peut gagner le coeur de celle qu'il aime.
C'est aussi le prétendant qui se soumet entièrement à sa bien-aimée. Il promet un don total.
Alors qu'Actéon n'exprime rien et ne se manifeste que par le regard, ce qui provoque une mortelle colère au coeur de celle qu'il convoite.
Pour ce qui est de la représentation picturale de ce thème : au XVIe siècle on représente pour la première fois depuis l'antiquité les femmes nues en peinture en attendant la découverte de la photographie où on les représentera nues en photos et la découverte du cinéma où on les représentera nues en film. Pourquoi représenter Pomone nue ? C'est une idée d'homme. Il faut dévoiler le corps promis aux sens. N'oublions pas que la peinture sur toile est à la Renaissance un art masculin réservé aux hommes et que les seules femmes autorisées à peindre n'avaient pas le droit de s'adonner à l'étude anatomique. L'image semble dès lors devenue l'ennemie de la femme car on est désormais saturées d'images de corps féminins nues qui ont quelque chose de rabaissant sous prétexte d'exaltation de la beauté féminine. Ce n'est plus Vertumne (vertere) mais (pervertere) un pervertissement. Une mise en valeur qui dévalorise...
(Peintures : Vertumne et Pomone successivement par Hendrick van Balen, le Primatice, et le jardin de Pomone par un (ou une) élève du Primatice)
jeudi 2 juin 2011
La française soumise a trop bien appris sa leçon et ce n'est pas du goût de tout le monde
Dans la France du XVIIe siècle on inculque en rimes (ici satiriquement) le rôle de la française dans le société des hommes (et non des femmes) :
Votre sexe n'est là que pour la dépendance.
Du côté de la barbe est la toute-puissance.
Bien qu'on soit deux moitiés de la société,
Ces deux moitiés pourtant n'ont point d'égalité:
L'une est moitié suprême, et l'autre subalterne:
L'une en tout est soumise à l'autre qui gouverne.
Et ce que le soldat dans son devoir instruit
Montre d'obéissance au chef qui le conduit,
Le valet à son maître, un enfant à son père,
À son supérieur le moindre petit frère,
N'approche point encor de la docilité,
Et de l'obéissance, et de l'humilité,
Et du profond respect, où la femme doit être
Pour son mari, son chef, son seigneur, et son maître.
Il semblerait que la majorité des francaises ont bien intériorisé ce discours et cette susdite dépendance voire qu'elles la revendiquent comme une liberté.
Bien des prétendues féministes françaises placent la liberté pile poil dans l'esclavage. La prostitution est considérée par Virginie Despentes comme un choix personnel sans rapport avec la paupérisation et la maltraitance organisées des femmes, les agressions sexuelles commises par des hommes de pouvoir sont balayées sous le tapis par des femmes qui sortent leurs griffes pour attaquer celles qui parlent et afin de mieux les faire taire, clament haut et fort qu'elles, elles pensent d'abord à l'homme. On les voit même verser des larmes ou courir à la rescousse du présumé coupable avec leurs millions.
Alors voilà que les féministes anglo-saxonnes en ont assez. Elles ne peuvent plus les souffrir ces français et ces françaises : ces français qui réduisent une affaire d'agression sexuelle à de la grivoiserie sans conséquence et ces françaises qui gloussent comme des bêtasses en couvant ces répugnants personnages de regards de tendresse.
Car la prétendue féministe française aime les machos. Elle les couve, les écoute, les materne, les supplie à genoux de l'aimer. On a assez d'exemples dans le monde de la politique et dans le monde bloguesque. Ces petits univers clos n'aiment pas être dérangés par des témoins extérieurs et cel.lui hors de ce cercle qui voudrait désigner le machisme qui se joue là dans toute son ampleur est bon.ne pour une claque cinglante.
Mais comprenez chères anglo-saxonnes, les françaises ont avant tout le sens du sacrifice ! Ce sont des Iphigénie ! Et dans Iphigénie il y a "génie" !
Et puis un anglo-saxon notoire qui d'ailleurs pourrait bien être une femme a bien écrit ces vers qui résument les aspirations de la française moyenne :
Il aimait la mort, Elle aimait la vie,
Il vivait pour elle, Elle est morte pour lui.
{W. Shakespeare.}
(Un macho français est caché là-dedans. Une anglo-saxonne saura t-elle l'en déloger ?)
Ajout du 3.6 : il y a quand même quelques françaises qui sont dégoûtées d'entendre ces affreux-là ouvrir leur clapet métallique : Circé par exemple.