Une amie m'a rapporté, indignée, ce qui lui était arrivé lundi dans l'école primaire où elle travaille, à savoir qu'un élève de cours élémentaire première année, lui aurait demandé pourquoi on achetait du "pain russe" (comme on appelle, en Allemagne, les biscuits en forme de lettres de l'alphabet qui sert un peu de matériel pédagogique dans les écoles Waldorf) alors que les Russes seraient très méchants parce qu'ils auraient attaqué l'Ukraine. On parle ici d'un enfant de sept ans qui fait un tri politique des aliments. Nous assistons donc à l'émergence d'une Inquisition en culottes courtes comme dans le roman d'Orwell où les enfants surveillaient la correctness politique des adultes.
Il devient de jour en jour plus évident que nous vivons désormais dans un monde de croyances où les faits tangibles n'intéressent plus personne. Comme quoi le monde médiéval n'est jamais derrière nous et. d'ailleurs, aucune époque passée n'est jamais vraiment révolue.
Toutes les croyances en circulation aujourd'hui sont inculquées non plus via les peintures et les sculptures édifiantes, les fresques et les tapisseries des églises et hospices, représentant les anges, les diables, le paradis, l'enfer, Dieu et Satan mais par une boîte électronique lumineuse avec images sans cesse mouvantes à beaucoup plus haut pouvoir hypnotique qu'autrefois. Pour orienter les émotions de la plèbe, des méthodes d'ingénierie sociale très efficaces ont été mises au point et sont appliquées au quotidien sur une population totalement bonnasse qui croit encore être en mesure de se faire une opinion personnelle AVEC DES IMAGES depuis leur living-room.
Comme des enfants d'autrefois qui, devant une peinture religieuse représentant l'Enfer se demandaient entre eux ce qu'ils croyaient ou ne croyaient pas : "moi je ne crois pas que les gens sortent de terre parce que, s'ils sont dans un cerceuil, comment ils vont faire pour l'ouvrir ?" et autres questions pleines de logique enfantine mais sans recul sur la question de la pertinence de l'image elle-même,
Aujourd'hui, la majorité qui est toujours dans l'erreur, comme on sait, mais suit quand même à chaque fois des maîtres-à-penser, se laisse désormais guider à travers la planète, à chaque désignation d'un nouvel Enfer, par ses chers médias. Elle va ainsi, de pays en pays et de ville en ville, sans bouger de place et, lorsqu'un pays est, un jour, montré du doigt par la boîte magique comme nouvel Enfer, elle ne se demande pas s'il n'y aurait pas, par hasard, pire ailleurs et pourquoi on oriente notre attention tout spécialement dans cette direction ? Non. Tout le monde s'identifie, sans le plus petit recul, aux peuples dont il se fichait complètement hier mais comme Jacques, pardon, la boîte a dit qu'il doit se sentir concerné par l'Enfer désignée à ce jour et à cette heure, il le fait.
Comme les enfants qui se mettent à la place des damnés et des élus de la peinture religieuse, ils sont pris dans l'événement de toute la force de leurs émotions, sans même avoir jamais eu le moindre contact personnel ni avec le lieu, ni son peuple, ni sa langue, ni son histoire, ni sa culture, ni son quotidien, ni sa terre, ni ses affinités, ses attentes et ses espoirs, ni rien en dehors de la toile qui leur a été donnée à voir. Comme si représentation et vérité étaient indissociables. Parce qu'il suffit de jouer sur sa peur et sa crédulité.
Où que je regarde, je ne vois que des gens "solidaires contre". Le slogan qui fait fureur depuis deux ans grâce à la peur, est "ensemble contre (remplissez les pointillés)" et tout le monde trouve cela formidable. La boîte télévisuelle désigne des ennemis et la populace de se ruer sur les causes, mises en vogue artificiellement, comme des affamés de guerres et d'ennemis communs, tant la solitude et la peur sont grandes, devant l'écran scintillant qui ne fait que les renforcer.
J'en profite pour présenter un très beau blog sur la flore du polyptyque du Jugement Dernier des hospices de Beaune qui m'a totalement fascinée quand j'ai eu l'opportunité de l'admirer enfant, juste une année plus jeune, à l'époque, que l'élève au pain russe de mon amie. J'ai éprouvé une grande fascination pour ces détails végétaux extrêmement précis. En particulier les fraises des bois que j'avais littéralement envie de cueillir et de manger, d'autant qu'elles étaient situées à ma hauteur, alors que tout le tragique du tableau m'affectait peu, étant placé bien trop haut pour moi. Pour les enfants d'aujourd'hui plus rien, apparemment, n'est placé trop haut.
Sachant qu'en peinture, les sujets religieux étaient, en ce temps-là, imposés, c'est-à-dire qu'il était interdit de peindre autre chose (comme quoi déjà à l'époque la censure dans les médias - la peinture en est un - étaient grandes), peut-être l'auteur de ce polyptyque a-t-il voulu dissimuler un sujet subversif à l'intérieur d'une commande imposée. Comme pour les industries pharmaceutiques aujourd'hui, la pratique de l'herboristerie était très mal vue des religieux. Quant à l'industrie de l'armement, c'est elle qui effectue de nos jours, avec succès, la pesée des bons et des méchants. Quand l'économie de marché est la religion, les anges sont les compagnies industrielles.
Pour en savoir plus sur le polyptyque.
Pour précision : je ne prends aucun parti dans un conflit thématisé avecc beaucoup d'agressivité dans tous les pays de l'UE, pour faire perdre de vue à ses habitants, leurs propres intérêts et, tout en prétendant prendre des mesures de sanctions contre un pays prétendûment ennemi, organiser intentionnellement le chaos, sanctionner les peuples européens eux-mêmes à coups de prix prohibitifs qui ne dérangent en rien la Russie, pour leur faire ensuite admettre des réformes qui leur paraîtront acceptables mais instaurées essentiellement dans l'intérêt de la classe des "chefs religieux" contemporains. Hier comme aujourd'hui, les mêmes stratégies de soumission des masses se reproduisent et avec la même constance.
Tes prises de position sont courageuses dans ce monde aseptisé où l'on ne peut plus bouger une oreille si l'on ne va pas dans le sens du mainstream...
RépondreSupprimerEt malheureusement, je crois que tu as raison. Je dis malheureusement, car c'est hélas une gangrène qui entraîne l'humanité à sa perte.
Bisous
•.¸¸.•*`*•.¸¸☆
Merci beaucoup Célestine ! <3 Je sens bien, en effet, que je m'expose à une forte hostilité de la part de beaucoup de monde mais, en même temps, je trouve cela étouffant de devoir se taire. Néanmoins j'espère que quelque chose d'imprévu par les apprentis sorciers du contrôle social enraie la catastrophe et stoppe le processus de gangrène. En attendant, je vais quand même continuer à barboter à contre-courant ;)
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