lundi 10 janvier 2011

L'Histoire enseignée à nos grands-mères



Le seul paragraphe consacré à une femme dans ce livre d'Histoire d'avant la 2e G.M. destiné aux enfants de 7 et 8 ans, donne son point de vue sans nuance sur Catherine de Médicis.
"L'intrigante Italienne fut le mauvais génie de son faible fils qu'elle dominait". (C'est un peu du racisme anti-italien, non?)
Il n'y a pas d'autre femme dans ce livre.
L'auteur en est P.Duprez, inspecteur de l'Enseignement primaire, licencié ès lettres. Le livre fut publié en son temps chez Albin Michel.

Sinon sur le site des Femmes dans l'Histoire, un très intéressant billet sur la "vilaine" Catherine !

17 commentaires:

  1. Ajoutons que beaucoup de rois s'en prennent plein la tête, dans ce genre de bouquins : untel est taxé d'insignifiant, un autre de lâche, un troisième d'imbécile, un quatrième de cruel ou de pervers... Ah bon ? Ils les ont connus en personne, ces auteurs ?
    Quant aux femmes, elles sont soit saintes, soit perdues, nulles et incapables (Anne d'Autriche) quand ce ne sont pas les dernières des salopes (Catherine).

    Ah, les joies et la pertinence du jugement de valeur en histoire... !

    RépondreSupprimer
  2. Je me rappelle, quand j’étais gosse un jour dans mon magazine d’enfants, il y avait un supplément avec une frise présentant les grands personnages de l’histoire de France. Plus d’une vingtaine d’hommes étaient représentés et seulement deux femmes : Catherine de Médicis et Marie Curie. Intriguée qu’elles soient si peu nombreuses j’ai demandé une explication à ma mère, qui m’avait alors répondu que c’est parce qu’à l’époque, on ne donnait pas l’occasion aux femmes de devenir « grandes » : elles n’avaient le droit de devenir ni reines, ni médecins, ni chef de quoi que ce soit. Rien que des « femmes de » ou « mères de ». Je me suis alors demandé, à l’âge de 8 ans, derrière combien de grands hommes se cachaient une grande femme (la leur !) et pourquoi je n’avais pas eu la chance d’être née garçon.

    RépondreSupprimer
  3. Il n'y a pas que l'histoire : Patrice Chéreau dans la Reine Margot (1994) :
    http://www.imdb.com/title/tt0110963/
    lui taille un costume sur mesure, genre haute couture qui l'habille bien pour plusieurs dizaines d'hivers ! L'habituel programme politique des hommes : nous vilipender pour garder le pouvoir !
    Euh, tu as oublié un E à enseigné-e :)))

    RépondreSupprimer
  4. Euterpe, je prends un retard fou sur votre blog en ce début d'année, et sur les quelques autres que je lisais régulièrement. J'espère trouver le temps d'y revenir.
    Votre passion du "e" féminin vous emporte : l'histoire l'a perdu, le paragraphe l'a trouvé et l'a gardé. Bref, voilà qui me rassure, nous n'avons pas assez de temps !

    RépondreSupprimer
  5. A Artémise : en l'occurence ce manuel va des Gaulois au XXe siècle. Et il n'y a PAS d'autres femmes. Alors si parmi les hommes certains en prennent pour leur grade, comme d'autres sont décrits comme des héros, cela limite la portée du jugement de valeur. Par contre une seule femme et diabolisée de surcroît...c'est un problème pour les petites filles censées se structurer avec ce genre d'informations.

    A aalia : c'est ce que l'on appelle les femmes alibis servant à ne pas être taxé de sexiste. En réalité les grandes femmes, ce n'est pas cela qui manque. A condition de ne pas les jeter aux oubliettes. Ce qui est justement leur sort habituel, malheureusement.

    A Hypathie : j'ai des problèmes de genre à cause de l'allemand. j'ai de plus en plus de doute sur les genres dans ma langue maternelle. C'est tellement arbitraire ! Merci de la correction. Pour ce qui est du film de Chéreau, en effet. J'ai d'ailleurs fait un billet là-dessus l'année dernière.

    A Tania : je vous pardonne volontiers car ce n'est pas facile de suivre ce qui se passe dans le monde virtuel et dans le monde réel en même temps.
    Oui, "le" féminin et "le" masculin...(merci pour le §) à quand un vrai neutre ?

    RépondreSupprimer
  6. Tout à fait d'accord : dimanche je suis restée 10 minutes l'oeil rond fixé sur le singulier de hero en anglais avant de me rappeler que le héros en français prend lui un "s" ! Et je suis persuadée que je laisse aussi de fotes d'ortografe !

    RépondreSupprimer
  7. Edifiant!!! C'est fou comme le début du 20è siècle (c'est pourtant pas si loin!) était encore extrêmement misogyne! Merci pour cette précision.

    Céline.

    RépondreSupprimer
  8. J'adore: juste après avoir descendu Catherine de Médicis, dont le règne est synonyme de ravages, on a l'éloge de HentiIV,ce bon roi pacificateur, qui a rétabli la paix et fait du pays une oasis de prospérité. Vision simpliste ? Sûrement mais ce qui frappe c'est la volonté d'opposer aux dérives du règne d'une femme la bonté et les capacités de diriger d'un homme.

    RépondreSupprimer
  9. sourire...
    mon premier livre d'"Histoire" : cours élémentaire...

    de Bernard et redon
    publié chez Fernand Nathan (1950)

    RépondreSupprimer
  10. Céline,

    Je crois que les XIXe et début XXe siècles ont été les siècles les plus misogynes de l'histoire...

    Euterpe,

    Quel est l'éditeur de ce manuel ? Sinon, je suis d'accord, il est édifiant de voir que la question des femmes est complètement évacuée... même les maîtresses de rois (Diane de Poitiers, etc) dont l'influence fut considérable, rien de rien... On hésite entre rire et pleurer...

    RépondreSupprimer
  11. A Hypathie : je vois que tu sais exactement de quoi je parle. Et le pire c'est que je fais ce blog en partie pour m'empêcher de perdre mon "latin" !

    A Céline : Artémise n'a pas tort sur le XIXe et la 1re moitié du XXe siècles mais les autres siècles n'étaient pas tellement moins misogynes puisque les rares femmes qui avaient accès à l'éducation n'en apprenaient pas plus sur les grandes figures féminines du passé.
    La seule différence est qu'au XVIe siècle : il Y AIT EU une Catherine de Médicis !

    A Héloise : Ah enfin la réflexion que j'espérais ! C'est aussi pour cela que j'ai scanné ce bout de page. Le contraste est mortel : femme sans coeur qui génère un chaos inimaginable contre homme bon qui ne crée qu'ordre et harmonie. Je rappelle à qui cela s'adresse...le lavage de cerveaux commence le plus tôt possible.

    A mazel : le contenu est le même ? Mon livre à moi est antérieur à 1950 mais sa publication n'est pas datée. Il est juste question de la SDN qui existerait depuis 1926. J'en déduis qu'il a été publié entre 1926 et 1946.

    A Artémise : des maîtresses ? Dans un livre de cours élémentaire ? Et qui font la pluie et le beau temps en plus ?
    Mais que vont donc penser les petits garcons de leurs héros préférés ? ;)
    L'éditeur est Albin Michel comme je l'ai mentionné dans le billet.

    RépondreSupprimer
  12. Bonjour Euterpe,
    sur une thématique très proche,je vous signale sur France inter l'émission "2000 ans d'histoire" de ce jour à réécouter à la demande.
    Les illustrations sonores sont un régal.
    Dans l'attente de vos commentaires sans doute très pertinents, bonne année à toutes.

    http://sites.radiofrance.fr/franceinter/em/2000ansdhistoire/

    RépondreSupprimer
  13. A idefix : merci beaucoup pour l'émission dont j'ai bien apprécié les illustrations sonores, en effet. Il m'a malheureusement semblé qu'elles seules rappelaient un peu qu'il y avait eu des luttes acharnées derrière les acquis. L'énoncé assez froid des différentes étapes de l'évolution des droits des femmes m'a laissée plutôt perplexe. J'y ai presque entendu un ton de regret.
    Cette facon de dépassionner complètement le débat pour donner une impression de neutralité historique est aussi fausse que de faire l'inverse en prétendant que Catherine de Médicis n'avait pas de coeur. A aucun moment il n'est question de la lutte de part et d'autre (le rôle des hommes n'est pas évoqué, tout simplement). Rien sur les combats et les victimes, alors qu'il s'agit bien d'une guerre ! Finalement le machisme dans l'enseignement de l'histoire ne disparaît pas, il prend une autre forme. Beaucoup plus hypocrite que dans le cas de la naive diabolisation d'une Catherine de Médicis.

    RépondreSupprimer
  14. Euterpe,
    je n'avais pas perçu l'émission sous cet angle. Je ne parviens pas à adopter la posture de la guerrière, ou le point de vue du stratège... Question de caractère ? Je ne sais pas. Mais c'est toute la richesse des différences de point de vue qui me permet d'entendre le votre et d'apprendre mille choses sur votre blog.
    En écoutant l'émission, je pensais à tous ces savoir-faire "féminins" que m'ont transmis mes mères, grands-mères, belle-mère, tantes et cousines, que j'essaie de transmettre à mon tour à ma fille, et qui me permettent de créer de belles (ou bonnes) choses. Ils étaient devenus ringards et reviennent à la mode.

    Je pensais aussi aux savoir-faire "masculins" dont la transmission s'est arrêtée au milieu du 20e siècle.
    L'an dernier, en vacances, un artisan nous expliquait pourquoi il existait des différences formelles minimes entre deux outils traditionnels de menuisier et nous démontrait la justesse de chaque outil, toujours parfaitement adapté à une tâche précise. Il concluait en disant que nous avions perdu en 50 ans la connaissance d'un savoir-faire transmis et amélioré depuis l'Antiquité.
    Je crois que l'on a trop souvent regardé ce type de formation de façon méprisante.
    J'ai un garçon qui est "épaté" de me voir faire des miracles avec deux aiguilles et un (seul) fil de laine et qui m'observe pour comprendre comment cela marche.
    Je ne veux pas enfermer des techniques ou des savoir dans un genre, mais je crois qu'une répartition des rôles dans la transmission des savoir était un gage d'efficacité indispensable. Quand dans un couple, le père et la mère jouent des rôles presque interchangeables (ce qui a été le cas dans le mien), il est bien moins facile de savoir qui fait quoi ou si un savoir a été transmis ou non.

    RépondreSupprimer
  15. A idefix : les savoir-faire et la conquête de l'égalité des droits sont deux sujets qui, je trouve, n'ont pas à être amalgamés. L'acquisition de l'égalité des droits des femmes ne va pas de pair avec la perte des savoir-faire !
    Je suis tout à fait d'accord pour dire que cette perte est une véritable catastrophe et je suis malheureusement la seule mère de tout mon entourage à avoir enseigné la couture, le tricot, la cuisine, le maniement d'outils de bricolage et l'art de réparer un vélo (entre autres) à ma fille. C'est dire l'importance que j'accorde aux travaux manuels ! Maintenant elle est la seule fille de sa génération dans le cercle qu'elle fréquente à se coudre elle-même ses vêtements + installer elle-même une étagère.
    C'est extrêmement pernicieux de coupler la disparition de l'artisanat avec l'émancipation des femmes car c'est le productivisme, le capitalisme, le produire-toujours-plus d'objets inutiles manufacturés rapportant de l'argent qui ont détruit les savoir-faire ! Dans le domaine de la menuiserie, il n'y a plus le bois pour fabriquer ce qu'on fabriquait au temps où cet artisanat était un art...pourquoi ? Parce qu'on exploite la forêt, les hommes, les femmes, les enfants et les animaux : à mort...et plus ils ignorent de techniques ancestrales plus ils sont à la merci de cette "pressurisation".
    La répartition des rôles ne me paraît pas à moi, un gage de transmission des savoirs parce que les compétences sont indépendantes des sexes. Combien d'hommes n'ont aucun sens du bricolage et sont incapable de comprendre le fonctionnement d'un moteur ! On ne naît pas avec des compétences pour la mécanique parce qu'on est un garcon, etc..C'est totalement lié à la curiosité naturelle pour tel ou tel domaine, la capacité d'appréhension de ce domaine, l'agilité des doigts, l'acuité visuelle et des critères physiques qui ne dépendent pas du tout du sexe. C'est pour cela que les rôles doivent être répartis par compétences naturelles car ces compétences sont les seules valables.

    RépondreSupprimer
  16. Le pouvoir de nommer (ou pas) les choses, moi aussi l'école me semblait bizarre pour ça. Déjà en français l'histoire du masculin qui l'emporte (de mon temps on nous l'apprenait vraiment comme ça !). Les livres d'histoire et les contes me semblaient aussi bizarre : j'avais l'impression que s'il y avait eu + de femmes, je m'y serais davantage intéressée, ou si l'histoire avait été présentée autrement. Le peu de femmes m'impressionnait, en fait quand il s'agissait d'une femme, je me disais 'ah tiens et c'est une femme'. On manquait de modèles. Les femmes présentées étaient cruelles, cupides, gouvernant... les hommes. Comme dans les contes, toutes ces mauvaises femmes. Ce qui m'a énervée le + c'était ce qui concernait le 'chant des sirènes', ces femmes dans l'eau, de si beaux chants, ah mais bien sûr c'était pour faire tuer les marins, tous des hommes... :o(

    RépondreSupprimer
  17. A Emelire : beaucoup de domaines paraissent fastidieux aux femmes parce qu'elles n'y sont pas représentées. Pas étonnant qu'elles jettent l'éponge (à regret) !
    On s'est toutes raccrochées aux rares figures féminines qu'on nous jetait en patûre comme un minuscule os archi rongé parce que c'est aussi une sorte de faim, celle de chercher un modèle pour se trouver soi-même ! C'est bien la preuve que les activités dites féminines ne suffisent pas à notre existence.
    Mais en nous évincant des livres d'histoire (sauf quand c'est complètement impossible (Catherine de Médicis est très difficilement contournable, cependant il y en a qui y arrivent) on nous décourage volontairement. Ce n'est pas parce que les femmes n'y auraient joué aucun rôle, c'est parce que les hommes se l'approprient entièrement. Et si nous voulons étudier, tant pis pour nous, il nous faut étudier une histoire d'hommes.

    RépondreSupprimer