lundi 24 janvier 2011

La "Marie Stuart" de Catherine de Médicis

Dans "La reine Margot" d'Alexandre Dumas, on peut lire ce dialogue entre le parfumeur de Catherine de Médicis et la reine-mère (commentant la prophétie de Nostradamus à propos de la "Marie Stuart" francaise) :

"- Vives honorata, dit René, morieris reformidata, regina amplificabere.

- Ce qui veut dire, je crois :
Tu vivras honorée, et elle manquait du nécessaire, la pauvre femme ! Tu mourras redoutée et nous nous sommes moqués d'elle. Tu seras plus grande que tu n'as été comme reine, et voilà qu'elle est morte et que sa grandeur repose dans un tombeau où nous avons oublié de mettre même son nom.

- Madame, Votre Majesté traduit mal le
vives honorata. La reine de Navarre a vécu honorée, en effet, car elle a joui, tant qu'elle a vécu, de l'amour de ses enfants et du respect de ses partisans, amour et respect d'autant plus sincère qu'elle était plus pauvre.

- Oui, dit Catherine, je vous passe le
tu vivras honorée mais morieris reformidata, voyons, comment l'expliqueriez-vous?

- Comment je l'expliquerai ! Rien de plus facile :
Tu mourras redoutée.

- Eh bien, est-elle morte redoutée ?


- Si bien redoutée, madame, qu'elle ne fut pas morte si Votre Majesté n'en avait pas eu peur. (...)"



Ce personnage qui joua un rôle de premier plan dans la France du XVIe siècle et qui ne figure pas dans les manuels scolaires parce que c'est une femme, mourut dans des circonstances mystérieuses quelques semaines avant la Saint-Barthélémy.
Selon les protestants, elle aurait été empoisonnée par Catherine de Médicis, ce que contestent de toutes leurs forces les catholiques. Actuellement, nous ne pouvons plus le vérifier attendu que son corps a disparu tout de suite après sa mort.
De qui s'agit-il ?

17 commentaires:

  1. Le texte précise qu'il s'agit de la reine de Navarre. Je pense donc qu'il s'agit de Jeanne d'Albret, la mère de Henri IV.

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  2. A Kalista : merci pour la réponse mais...encore ? Car Marguerite de Valois dite la reine Margot porta également le titre de reine de Navarre, ainsi que Marguerite d'Angoulême...

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  3. je n'ai pour référence (honte à moi) que le film de Chéreau, où, avant la Saint Barthélémy, et même avant le mariage d'Henri avec Marguerite, c'est bien à la mort de la mère de ce dernier, empoisonnée par Catherine de Médicis, à laquelle on se réfère.

    Je profite pour te glisser un message, en rapport avec ton billet sur Francesca Caccini : ce matin sur France Musique, Pierre Charvet ("le mot du jour") a consacré sa chronique aux femmes "compositrices", et à Barbara Strozzi , 1619-1677. Il la qualifie de compositrice prolifique et parmi les compositeurs les plus doués de son temps, il rappelle que ce monde de la musique est très fermé et très méfiant à l'égard du talent des femmes, il dit aussi que, sans doute, avec des chances égales, elles auraient été bien plus nombreuses, s'interroge sur le destin (de dévotion) d'Alma Mahler, et de (?), il mentionne bien sûr aussi Hildegarde de Bingen. Aujourd'hui il rappelle qu'au Conservatoire autant de jeunes filles que de garçons se spécialisent dans la composition. Je suis étonnée en cherchant le lien sur ce Monsieur, et sa chronique, de découvrir qu'il s'agit d'un jeune homme ! sa voix m'avait fait imaginer un vieux Monsieur ;))) à priori, il y a la suite demain :)))

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  4. A lucia mel : merci pour le lien, je me suis empressée d'écouter l'émission ! Je connais Barbara Strozzi mais je voudrais me cantonner au XVIe siècle et ce qu'il dit sur les circonstances très très particulières et rares, ben ce n'est pas tout à fait exact dans la mesure où il y a bien plus d'une italienne qui s'est imposée comme compositrice à la Renaissance (notons qu'il ne s'agit QUE d'italiennes d'ailleurs). Mais ils citent des troubadour(e)s et ca me fait plaisir. Il parle d'Alma Mahler et de Fanny Mendelssohn mais au XIXe siècle, il y a aussi plein de francaises : Mel Bonis, par exemple, dont on trouve de nombreuses interprétations sur youtube !
    Ce qui me hérisse par contre c'est cette insistance à utiliser le mot "compositeur" mais bon sang ! Est-ce qu'on dit coiffeur quand il s'agit d'une femme ????
    Pour Jeanne d'Albret, Kalista et toi vous faites rien qu'à enlever tout mon suspens, bououhhh!;)

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  5. Bon ben j'arrive trop tard... tout le monde a déjà trouvé. Tu me diras, je ne suis pas spécialiste de la période...
    Je passais aussi te dire, Euterpe, que j'ai eu un drôle de truc sur mon blog... Tu as dû me "taguer" le 10 janvier, et le temps de le voir, de te répondre, la page s'est volatilisée. j'ai perdu comme ça deux autres commentaires sur la même page... alors ne m'en veut pas, c'est l'ordi qui m'a fait des siennes... du coup, j'ai perdu le fil de ce que tu me disais sur un de mes articles... Bref... on remet ça sur d'autres, mais sur le moment, je n'ai rien compris, j'étais furax.
    Personnellement, sur ton blog, j'apprends beaucoup et je révise mes bases en histoire du XVIème siècle. Pas toujours capable de donner des réponses aux colles.
    A plus tard...

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  6. Bon, de toute façon je n'aurais pas trouvé: pas assez calée en XVIème siècle !

    Par contre, j'en profite pour rebondir sur Alma Malher dont j'avais lu, il y a super longtemps (je devais avoir une quinzaine d'années) la biographie dans un ouvrage de Françoise Xénakis, "Zut, on a encore oublié Mme Freud", livre qui sortait de l'oubli les femmes d'hommes célèbres. Le chapitre consacré à Alma m'avait particulièrement marquée: passionnée de musique, elle avait dû promettre (par lettre, il me semble bien) à son époux, probablement inquiet que son talent ne surpasse le sien, de ne plus JAMAIS composer. Elle lui a obéi mais a souffert toute sa vie de crises d'angoisses qui la terrassaient littéralement. J'avais trouvé ce destin terrible et c'est là que j'ai dû commencer (à la lumière de toutes ces vies entravées de femmes) à trouver l'égo bouffi de trop d'hommes abject et imbécile.

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  7. Alma Malher... c'est un peu comme Sophie Tolstoï, on dit qu'elle a beaucoup écrit pour Léon.

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  8. je t'assure qu'au début de sa chronique il précise bien : "femme compositeur, on devrait donc dire compositrice".

    Ah, j'ai trouvé, c'était bien... qui j'ai dit ? Ben, le film de Chéreau est repassé à la télé il y a quelques jours... je n'ai pas de mérite. Film génial, que j'ai eu grand plaisir à revoir.

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  9. Encore au sujet d'Alma Malher (n'hésite pas à m'engueuler si je digresse trop !!!), j'ai retrouvé la présentation de F.Xénakis:

    "Que ce soit Xanthippe, la femme-enfant de Socrate dont le prénom est devenu synonyme de méchanceté, en passant par Madame Freud, la sereine, l'heureuse qui, d'instinct, elle, avait conçu (parce que je l'ai décidé), tout ce que son mari a appelé ensuite la psychanalyse, ou Adèle Hugo, la réputée imbécile ; ou encore Jenny la petite baronne, épouse de Karl Marx, dont la vie fut plus atroce que celle de. toutes les héroïnes de Dickens; ou encore Alma Mahler, Alma la jalouse, Alma l'agressive, Alma l'envieuse, Alma la malheureuse à qui son fiancé, du haut de son génie, avait-interdit de composer..." Françoise Xenakis

    Jalouse, agressive, envieuse ... quel ultime affront alors que ces qualificatifs sont précisément ceux qui s'appliquent à celui qui l'a empêchée avec la cruauté la plus agressive de composer par jalousie, crainte et envie de son talent.

    @ Floréale: j'irai me renseigner sur Sophie Tolstoï, merci pour l'info !!!

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  10. A Bettina : contente de te lire à nouveau ! Bon ben tant pis pour le tag. Des commentaires qui disparaissent, il y en a aussi ici et si j'étais parano (ce que je suis d'ailleurs un peu) je dirais que c'est louche!;)
    Peut-être pas là mais sinon tu ne t'y connais pas si mal sur le sujet du XVIe siècle, je trouve.

    A Héloise : bizarre, j'ai deux bouquins sur Alma Mahler mais pas de F.X. L'un est d'elle-même et l'autre de Francoise Giroud.
    Je ne suis arrivée à en finir aucun parce que cette injonction au sacrifice de la part du mari, c'est trop oppressant mais je ne désespère pas de m'y remettre.
    Par contre, j'ai assisté à une conférence sur Else Lasker-Schüler par une historienne de l'art qui a travaillé 15 ans sur cette artiste contemporaine d'Alma : elle (Else), elle a trouvé la parade à cette pression ignoble. Elle s'est enfermée dans un rôle tel qu'il est impossible de savoir si elle est complètement folle ou super-adroite. Si tu ne l'as connais pas, voici un lien : tp://www.espritsnomades.com/sitelitterature
    /laskerschuler/laskerschulerelse.html

    A Floreal : et n'oublions pas les filles de Leon. L'une l'a beaucoup peint (elle est dans mes femmes pas commémorées).

    A Héloise : alors là moi si on parle de femmes artistes je ne vois pas pourquoi je serais fâchée ! Au contraire, je jubile :D

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  11. A lucia mel : oups je viens seulement de voir ton 2e com' ! Oui tu as raison, il fait cette remarque au début mais après il se soumet au diktat des académiciens qui ont décidé de discuter l'utilisation de "compositrice" (une femme pffui!) et il ne dit plus que "compositeur", et même "créateur" ! c'est incroyable ! A croire que "créatrice"...euh c'est impossible au féminin aussi ou quoi ?
    Pour le film de Chéreau, mis à part la prestation de Jean-Luc Anglade, je trouve que ce film fait un très mauvais sort au roman. Le roman est d'une grande subtilité et je ne sais pas si tu l'as lu mais à part Charles IX (J.-L. Anglade, donc) les personnages du film sont très très loin d'être à la hauteur de ceux d'Alexandre Dumas. De plus les dialogues du livre sont un régal, ceux du film sont affreusement plats. Je te recommande chaudement de lire ou de relire le roman.

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  12. Il y eut beaucoup de Marguerite en France, en Savoie et même en Navarre au XVIe siècle.

    Mais il n'y a qu'une, Marguerite de Valois, sœur du roi François 1er, ce monarque qui promulgua l'édit de Villers-Cotterêts, faisant langue du royaume de France, le français.

    Marguerite de Valois, reine de Navarre par son remariage en 1527 était une poétesse et quelle !

    Celle qui laissa l'inoubliable Heptameron, 72 récits, œuvre qu'elle laissa, sans doute, inachevé quand elle est morte en 1549.

    À lire http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k523698.r=heptameron.langFR

    Ainsi commence la première des huit journées :
    Une femme d'Alençon avait deux amis, l'un pour le plaisir, l'autre pour le profit. Elle fit tuer celui des deux qui, le premier, s'en aperçut ...

    Ah, la belle qu'elle était,
    http://bit.ly/hMAvF0
    Elle a aussi écrit de nombreux contes.

    Si Catherine de Médicis était une politique assez dangereuse, mais c'est l'époque qui voulait cela, le meurtre, était l'un des moyens du pouvoir, on a tort de penser qu'elle fit empoisonner la belle Marguerite.

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  13. A egide : pour être plus exact, on ne nomme pas la soeur de Francois Ier Marguerite de Valois car elle n'est pas une Valois de la branche directe. Elle se nomme Marguerite d'Angoulême, de la branche des Valois-Angoulême. Marguerite de Valois, de la branche directe, c'est le nom de sa petite-nièce, la fille d'Henri II et de Catherine de Médicis que l'on surnomme "la reine Margot".
    Cette poétesse est en effet immense. Je la cite régulièrement sur ce blog et j'ai déjà publié l'une de ses nouvelles intégralement.
    Pour le meurtre politique, tu as raison, c'était monnaie courante. Entre autres : Henri III a fait assassiner le duc de Guise et pour Henri IV le bras de Ravaillac a été sans doute commandité.
    La thèse de l'empoisonnement par Catherine reste très controversée, en effet.
    Merci beaucoup pour ta visite !

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  14. C'est étonnant, que nous retrouvions, par ce simple problème de la dénomination patronymique, un souci de ce temps et qui était de se s'orienter dans le système d'alliance compliqué qui enserrait la société dominante.

    J'ai rencontré un estivant belge qui était très fier de connaitre quasiment par cœur la généalogie des reines de France, de toutes les reines. Effectivement, c'est un exploit mnémique.

    La condition des femmes de la société des princes c'était, aussi de changer de nom au gré des alliances familiales dont elles étaient l'objet car on ne peut croire qu'elles décidaient de leurs (re)mariages.

    Pour nous, la confusion est possible, car avec le temps s'est estompé la signification des rapports de force d'une violence inouïe et dont ces femmes, à corps défendant, avaient supporté les noms emblématiques.

    Le XIXe siècle en faisant son miel des billets et libelles les plus épouvantables a restitué en fiction, ces figures, mais d'une façon très ambivalentes.

    Et le roman de la reine Margot, une fiction sans aucun fondement historique autre que les liens matrimoniaux, en l'état, et dépouillé du moindre sens, laissent accroire à des horreurs sexuelles.

    Lesquelles horreurs sexuelles étaient bien les fantasmes et, hélas, aussi les violences, réelles celle-là dont souffraient les contemporaines d'Alexandre Dumas, de toutes les classes sociales .

    Le XIXe siècle fut d'une incroyable dureté pour les femmes.

    Si Marguerite, fille de Henri II, vécut si étrangement, elle a été la victime, figure moderne s'il en est, d'une mère, d'une véritable reine-mère, Catherine de Médicis dont la renommée jusqu'à nos jour ne laisse pas d'être celle d'une femme de pouvoir impitoyable, combien sont-elles les mères investies aujourd'hui dans l'élévation sociale de leur progéniture par tous les moyens de la parentalité et de la sociabilité.

    Marguerite ou Margot, quelle est votre sort, princesses fantasmées, personna idéalisées, façonnée rudement par les idéaux maternels.

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  15. A egide : le problème de la confusion vient aussi du fait que l'on donnait tout le temps les mêmes prénoms aux "princes.ses du sang". Les Francois et les Henri de Valois sont, eux aussi, doubles ou triples mais ils portent des numéros. Par contre, il est moins facile de s'y retrouver chez les Guise et les Montmorency. De plus, ils changeaient de titre chaque fois qu'ils accédaient à un rang plus élevé.
    Quant à Dumas, il est très décrié mais il n'a jamais prétendu être autre chose qu'un auteur romantique. Par contre, je ne suis pas d'accord concernant les fameuses horreurs sexuelles qu'insinueraient son roman. C'est Patrick Chéreau qui dénature le propos de Dumas. Dumas a pioché ses informations chez Brantôme et Brantôme est un témoin oculaire qui fut fasciné par l'intelligence hors du commun de la reine Margot. Rien sur l'érudition de Marguerite dans le film de Chéreau.
    Quant à Catherine de Médicis, c'est un personnage très complexe et peu de gens savent à quel point, elle a, en fait, "féministisé" la France.

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  16. Je voue à Alexandre Dumas une admiration sans borne. Et je lui dois tellement de plaisirs de lecture. Je tiens "les trois mousquetaires" pour une des œuvres littéraires les plus belles.

    On dit que Don Juan fut le dernier personnage mythologique de la littérature occidentale.

    J'affirme que ce n'est pas exact car Alexandre Dumas a produit ce personnage incroyable, cette Milady de Winter dont les charmes redoutables me troublent encore.

    Ah, Anne de Bueil, que n'a-t-elle pas fait ? On sait qu'elle est capable de tout. Je ne connais pas d'écrivain qui a su, grâce à l'invention d'un tel personnage incarner les sentiments humains les plus archaïques et les mieux partagés du monde car, chacun, enfant, fille ou garçon, les a ressentis au début de sa vie l'amour le plus fou et la crainte la plus insensé du corps propre de la mère, ce principe inhérent à la littérature, l'horreur et l'extase mêlé de la narration, qu'on peut réitérer à foison en écoutant ou en lisant, et revivre ainsi sans vraiment s'en rendre compte, ce qui nous reste de l'expérience initiale et la plus pure.

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  17. A egide : moi aussi je suis fan d'Alexandre Dumas. En ce qui me concerne, parmi les personnages qu'il a créé, j'ai plutôt un faible pour le fou de Henri III, Catherine de Médicis qui est représentée de différentes manières selon le roman (on la trouve dans trois romans d'A.D.) et Henri IV (dans les mêmes trois romans). Malheureusement, il n'a pas traité Jeanne d'Albret.

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