mercredi 30 juin 2010

Méchante Catherine de Médicis !

Catherine de Médicis, personnage complexe, et, bien entendu, non épargnée par les difficultés que les femmes rencontrent aujourd'hui pour se faire respecter, dut gouverner la France à plusieurs reprises sur fond de dissensions religieuses qui avaient démarré bien avant son accession au pouvoir. Les grands chefs de guerre et autres intriguants de cour se moquaient bien de ses ordres, régente ou pas, et elle eut plusieurs fois à craindre les coups d'état, la prison, le bannissement ou pire. Elle fit assassiner Coligny comme Henri III fit, peu de temps plus tard, assassiner le duc de Guise, ces deux personnages, dont les qualités, certes, sont indéniables, menacaient tout de même de mettre le royaume à feu et à sang par fanatisme religieux. Bien sûr, la méthode est condamnable et Catherine ne fut pas une sainte mais elle ne fut, au minimum, ni pire ni meilleure que les puissants de sexe masculin, ce qui ne l'empêche pas de rester violement caricaturée. On lui attribue volontiers la maternité de la Saint-Barthélémy, alors que son fils Charles IX régnait depuis douze ans. N'est-elle pas un peu le bouc émissaire ? Alexandre Dumas qui aimait créer des personnages de femmes diaboliques comme la célèbre Milady des Trois mousquetaires, a trouvé en Catherine matière à cette diabolisation et s'est surpassé concernant cette reine, d'où la difficulté de la réhabiliter aujourd'hui. Patrice Chéreau avec son adaptation du roman de Dumas au cinéma, se lâche carrément en lui prêtant la tête inquiétante d'un personnage du XVe siècle (associé à un col élisabéthain noir surdimensionné alors que Catherine portait une fraise), période où la mode était au front rasé très haut, trop haut pour nous, mode que, bien entendu, Catherine n'a jamais suivie, puisqu'au contraire, c'est elle qui introduisait les courants nouveaux venus d'Italie à la cour de France. Elle n'aurait certainement pas porté une coiffure vieille d'un siècle ! Ces outrances vestimentaires et "cosmétiques", disons, sont clairement utilisées à des fins caricaturales. En 1989, Alice Sapricht incarnera le personnage à la télévision avec, du moins, vêture et coiffure fidèles historiquement. Néanmoins Alice Sapricht est surtout connue pour avoir endossé tout le long de sa carrière des rôles de femmes essentiellement patibulaires. Méchante Catherine ! (Le premier tableau représente Catherine de Médicis en tenue de veuve, peint par Francois Clouet à la fin du XVIe siècle, le deuxième tableau signé "Petrus Christus" et daté du XVe siècle, représente une inconnue).

7 commentaires:

  1. Tu as raison : elle n'est pas pire que les abominables tyrans sanguinaires et/ou médiocres dont l'histoire de France s'enorgueillit, Napoléon, Louis XIV, ou Louis XVIII pour ne citer qu'eux ! Inférieures en nombre et diffamées : le sort des reines et des femmes cheffes d'état. Merci pour ce billet.

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  2. Une de mes amies avec laquelle j'ai fait mes études d'infirmière, dirige actuellement une école d'infirmières.
    Elle a coutume de dire :

    "Nous en sommes encore à la préhistoire des relations homme/femme..." C'est pathétique.

    Le résultat de vos recherches est tout à fait original et singulier. Merci pour le temps que vous consacrez à la quête de la vérité.

    Et que dire des femmes compositeurs , il a bien dû en exister d'autres que Hildegarde von Bigen.
    fa#

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  3. A Hypathie : dans le domaine historique, on déshumanise aussi beaucoup les femmes. Thatcher qui n'était pas pire que Nixon et les deux Bush est toujours décrite comme particulièrement inhumaine. Alors qu'elle n'a fait que copier Nixon ! Une femme criminelle l'est toujours plus qu'un homme criminel aux yeux des phallocrates.

    A fa# : votre amie a raison. C'est pathétique et consternant. On dirait un virus qui ne cesse de muter. Quand le machisme disparaît dans un domaine, il apparaît ailleurs. Il nous faudrait un puissant vaccin pour nous en débarrasser !
    Pour les compositrices, j'y viendrai, j'espère. Quant à Hildegarde, je lui réserve un billet tout spécial !(ou blogon comme disait A.B.-D.).

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  4. Pour diriger, on fait appel aux femmes lorsque le pouvoir politique veut faire passer les pires mesures, parce que nul ne se méfie de la féminité... regardez mme Parisot qui a fait passer en France toute la dérèglementation du code du travail pour imposer la flexibilité aux français qui résistaient particulièrement.C'est toujours ainsi que les hommes font passer le pire, par une femme qui gouverne et qui assume ces catastrophes. Ils font ainsi d'une pierre deux coups.
    C'est un procédé très connu (cf Thatcher, Merkel). C'est pourquoi il n'y aura à mon avis aucune progression réelle possible pour les femmes sans changement total de système.

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  5. A bric à brac baroque : d'accord pour le changement total de système mais je ne sais pas si je comparerais Thatcher à Merkel et les réduirais ainsi à des femmes de paille. Si on va par là notre président n'est pas autre chose. Mais cela vaut encore moins pour Catherine de Médicis qui est devenu reine régnante par le hasard des naissances, des morts et des mariages. Elle était d'autant moins respectée que non contente d'être femme, elle était étrangère et de basse extraction. Son mari n'aurait pas du être roi, à la base, n'étant pas le dauphin et ne rien ne permettait de penser qu'elle parviendrait à la tête du royaume. Au contraire, personne n'en voulait ! L'état dans lequel elle a alors trouvé le pays était l'oeuvre d'Henri II manipulé par les fanatiques, Anne de Montmorency en tête. Malgré cela, elle aurait même trouvé moyen d'instaurer la paix si elle n'avait été sans cesse débordée par des factions intenables qui ne rêvaient que meurtre et sang !
    Je te recommande cette lecture : "Les reines de France au temps des Valois" de Simone Bertière. C'est là que se trouve tout ce que ne nous disent ni Dumas ni les livres d'histoire.

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  6. Je n'ai pas osé parler de Thatcher dans mon premier commentaire, parce qu'on nous la renvoie en permanence comme contre exemple ! Effectivement sous son administration, les anglais ont terriblement souffert, mais elle a appliqué les théories des Chicago Boys (Ecole de Chicago) comme tous les autres dirigeants de son époque. Quand on sait en plus que ces femmes sont sursélectionnées selon des critères virils... Et puis, je ne vois pas pourquoi les femmes cheffes d'état devraient être absolument irréprochables alors qu'on en demande rien de tel aux hommes !

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  7. A Hypathie : Francoise Giroud a dit "La femme serait vraiment l'égale de l'homme le jour où, à un poste important, on désignerait une femme incompétente."

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