Sofonisba Anguissola (mais non, c'est moi !)
QUELLE FEMME DE LA RENAISSANCE AURAIS-JE ETE ?
Que voilà un tag passionnant relayé par Alba... Entre mes femmes peintres et mes femmes musiciennes, je suis en plein dans le sujet !! Il me faut donc participer.
J'aurais pu choisir d'être la maîtresse de Ludovic Sforza immortalisée avec une hermine par Vinci, dite Belle Féronière... pas tellement pour une quelconque affinité avec cette Cecilia Gallerani dont on sait finalement peu de chose, mais par sentimentalisme : mes parents avaient craqué sur cette toile et décidé, à mon grand étonnement que je ressemblais à la belle Cécilia... ce qui n'a rien de réaliste ! Jusqu'à ce que je comprenne qu'une sorte d'assimilation avec le vrai nom de cette dernière la leur faisait considérer comme une presqu'homonyme ! D'où leur enthousiasme... Las ! Et puis ce choix a déjà été proposé (et rejeté d'ailleurs) par Quoi de 9 Cécile... Faut dire que si vous tapez "Femme de la Renaissance" en ce moment, vous naviguez entre Les lectures de Lili, Fattorius, et forcément vous finissez par aboutir sur l'initiatrice de cette réhabilisation féminine : Les aventures d'Euterpe rencense toutes les réponses à ce tag. La liste est étonnamment longue, preuve que le tag était bien trouvé ! J'ai décidé de l'explorer car chaque article est passionnant. C'est ainsi qu'on recontre :
Marguerite de Navarre chez La revue de Stress, chez Isabelle B.
Lucrèce de Medicis chez Angèle en vrac, retenue aussi par Lucrecia Bloggia, et enfin par Liliba
L'infante Claire Isabelle Eugénie publié par Les Petits bleus d'Artemisia qui est le complèment indispensable à mon propre choix !! (pardon Artemisia, je n'ai pas réussi à trouver ton article sur ton propre site)
Dinamene chez Luciamel
Gargamelle chez Vallenain
Héloïse chez Wilhelmine
Anne De Bretagne chez Hypathie
Louise Labbé chez CC et aussi chez Lili Galipette... c'est le choix définitif de Cécile du blog Quoi de 9 dont je parlais plus haut
Catherine de Medicis chez CC
Francesca Caccini chez Fattorius
Une mère anonyme chez Canel
La Flore de Boticelli pas moins pour Sophie !
Gabrielle d'Astrée chez Asphodèle
Une femme wallonne inconnue mais immortalisée par Van der Weyden chez l'Ogresse
La Laure de Pétrarque a été choisie par Liratouva
Lucretia ¨Panciatichi est finalement élue par Syl après de nombreuses hésitations
Marie de Gournay chez George
Vittoria Colonna chez Ella
qui choisit aussi Simonettea Vespucci, la plus belle femme d'Italie à son époque ! oups...
Marguerite de Valois chez Julia
La Léda de Léonard de Vinci a été choisie par Margotte
Isabelle de Caumont est proposée par David Burlot
Isabelle d'Este, est retenue par Kenza, je l'aurais volontiers choisie zut !! Et Siobhan l'a retenue aussi.
Isabelle Whitney, ouf une anglaise, a été dénichée par Alicia
Marietta Robusti est, forcément, choisie par VenitiaMicio
La duchesse laide de Quentin Metsys est brocardée avec un rien de provoc par ICB
Moderata Fonte, la dernière en date au moment où j'écris, est le choix de Danielle d'Album Vénitien
S'y ajoute Diane de Poitiers, choisie par Alba de Ciel Bleu de Castille dont l'article m'a mise sur la piste de ces femmes dont le temps, la légende et les peintres nous ont laissé des traces, parfois floues, parfois surprenantes, toujours humainement intéressantes à découvrir. Car l' Histoire avec un grand "h" nous parle de ceux qui firent la politique, les guerres et les nations, mais elle a longtemps laissé de côté celles qui les inspirèrent, conseillèrent voir influencèrent. Diane aurait d'ailleurs, d'après son commentaire, été aussi le choix de Françoise d'Autour du Puits. Bref, j'en suis là de mes réflexions, me disant d'une part qu'il en a vachement des nanas de la Renaissance auxquelles on a envie de ressembler, et d'autre part qu'elles sont souvent italiennes. M'enfin, à cela rien d'étonnant, cela vient sans doute du fil rouge qui nous unit souvent à travers ces blogs, une "certaine" culture qui trouve ses racines au-delà des Alpes. J'aurais pu, pour contrebalancer cette prédominance transalpine, choisir Charlotte de la Trémoilles, mais je vous ai déjà raconté sa vie il y a peu !! Donc ??
Un autoportrait de 1556, qui se trouve au musée de Lancut en Pologne. L'artiste appuie sa main sur un bâton pour l'éloigner du tableau, et elle arbore une tenue "d'atelier" loin des tenues élégantes que priseront les autres femmes d'autoportaiturant.
Donc, suite logique de ma série d'articles sur les femmes peintres, et même s'il s'agit d'une Renaissance tardive, j'élis Sofonisba Anguissola, affublée de cet étrange prénom par un père admiratif d'Hannibal et rêvant d'avoir un fils.
Confiée en 1546 à Bernardino Campi, elle fréquentera dès 1553 Gatti avant d'aller à Rome où elle rencontre Michel Ange. On raconte que le maître se montre très accueillant à son endroit, lui permettant d'étudier ses esquisses et lui donnant des conseils techniques précieux. Pour le remercier, elle lui offre une petite composition, enfant mordu par un crabe, que le maitre trouve tout à fait à son goût. Il semble avéré que l'enfant du tableau soit Astrubale petit. Michel Ange lui aurait permis de consulter ses propres croquis pour travailler le dessin.
La partie d'échecs, un des tableaux les plus connus de Sofonisba où le jeu des regards constitue la trame de la narration de cette partie "mondaine" entre les soeurs Anguissola
Le malheureux homme aura d'abord 6 filles, Sofonisba étant l'aînée, avant que d'accueillir le petit mâle tant désiré, auquel il donnera de guerre lasse, le prénom d'Astrubale ! Pendant ce temps là les filles auront été élevées avec beaucoup de soin par leur père qui tenait à les encourager à cultiver leurs talents, et surtout armées d'une solide culture. On verra l'artiste se peindre un livre à la main, jouant de l'épinette ou bien sûr, peignant. Vasari, qui rendit visite à la famille Anguissola en 1568 (Sofonisba était déjà partie pour Madrid) dit que cette maison était "l'auberge non seulement de la peinture mais de toutes les vertus" ! Astrubale, le garçon tant désiré, auprès de son père et d'une soeur Anguissola
Sofonisba est la plus connue des 6 soeurs, et sa longue vie consacrée à l'art, d'abord comme peintre mais aussi, vers la fin (elle est morte à 93 ans) comme mécène de jeunes artistes prometteurs (elle a reçu et conseillé le jeune Anton Van Dyck), est pleine d'imprévus et de liberté. Elle avait, sous des dehors sages et posés, un sacré caractère. On lui attribue cette phrase, sans doute légendaire, car ses autoportaits montrent en effet un large regard étonné : "la vie est pleine de surprises, j'essaie de capturer ces moments précieux avec des larges yeux". Un joli travail d'étude réalisé alors que Sofonisba avait 18 ans : elle peint son maître, Campi, en train de la portraiturer, armé du même "malhstick" qu'elle, on a voulu y voir l'expression de besoin de s'affirmer en faisant adopter à Campi le même outil qu'elle ! On a aussi raillé le fait qu'elle se représente sur la toile plus grande que le peintre !
Sans doute une copie du fameux "enfant mordu par un crabe", qui connut un réel succès et fut souvent reproduit
De retour à Crémone, sa ville natale, elle connait un succès certain, vend des toiles et réalise de nombreuses commandes de portraits qui plaisent à la bonne société locale, asseyant ainsi sa réputation. Celle-ci lui permet d'intégrer en 1558 le cercle prestigieux des artistes entrenus par le duc d'Albe dans sa cour milanaise. Et lorsque le roi d'Espagne Philippe II qui cherche un maitre de dessin pour sa jeune épouse Elsabeth de Valois, le duc s'empresse de lui recommander mademoiselle Anguissola . C'est ainsi que Sofinisba part s'installer à Madrid : elle a 27 ans et la jeune reine, dont elle sera à la fois dame de compagnie, professeur de dessin et peintre attitrée, en a 14. Elle continue à peindre pour les familles de la cour et son talent est hunanimement reconnu. Elle restera 11 ans à la cour d'Espagne mais après la mort en couches de la jeune reine, le roi Philippe II la dotera généreusement pour la marier. Il était temps, elle avait 38 ans !! Vous reconnaissez sans peine auprès de Sofonisba jouant de l'épinette, la même servante que sur la partie d'échec, détail qui nous rend la jeune femme attachante.
Elle épouse donc en 1570 Fabrizio Moncada, et part s'installer avec son époux en Sicile, île dont il est le vice-roi. Malheureusement elle se retrouve veuve rapidement, en 1579, et son séjour sur l'île ne se justifie plus. Elle entame alors un assez étonnant voyage qui la mène de Livourne à Pise, et, étant tombée amoureuse durant la traversée d'un beau capitaine de galère gênois, elle l'épouse. Elle a 47 ans et il semble que ce vaillant marin soit nettement plus jeune qu'elle. De fait on sait qu'il fit inscrire une péitaphe sur la tombe de son épouse pour célébrer, post mortem, le centième anniversaire de cette dernière "A Sofonisba, ma femme... dont on se souvient comme d'une femme illustre, comme peintre de portraits.... Orazio Lomellino, en souvenir de la perte de son grand amour, dédie ce petit hommage à cellle qui fut une grande dame - 1632". Ils passèrent plus de 40 ans ensemble, heureux pour Sofonisba car son époux la soutenait et l'admirait.
Autoportrait de 1610
Cela fait un peu scandale dans la famille, mais elle s'installe à Gênes où elle continue à exercer son art. Elle est à l'aise, d'autant que la dot de Philippe II lui donne une réelle indépendance financière. Avec l'âge, sa vue baissant (elle avait la cataracte), elle ralentit sa production et aime à s'entourer de jeunes artistes talentueux, qui viennent la visiter et recueillir ses conseils et son aide. Elle entretient autour d'elle une sorte d'école de peinture, un mécénat avisé, qui montre qu'elle reste jusqu'à la fin entreprenante et pleine d'esprit. Son autoportrait à l'âge de 78 ans la montre toujours posée et en apparence placide, tenant un livre sans lequel elle a glissé un index prêt à ouvrir l'ouvrage et un papier dans la main droite. Une babayaga avant l'heure puisqu'elle garde vivace l'envie de se battre, d'être elle-même et de partager son art.
Il semble que le jeune Van Dyck ait admiré cette femme à qui il vint rendre visite. Il disait avoir reçu plus de lumières de sa cécité que de la contemplation de toiles de maîtres illustres. Il fit d'elle de nombreux croquis et, plus tard peignit avec respect et perspicacité ces portraits qui la décrivent parfaitement. Sofonisba a environ 91 ans, le trait est sans concession mais l'hommage est sensible. Vasari, quant à lui, écrivit d'elle dans ses Vite : " Anguissola a montré plus de grâce et d'application dans son travail que la plupart des femmes de notre temps, elle a réussi non seulement dans le dessin, la couleur et la copie d'après nature, mais elle a créé elle-même des oeuvres rares et très belles".
Publié par Michelaise copié/collé par Euterpe
Merci à Michelaise qui recense comme moi des femmes artistes du passé dans son blog et hop, encore un point commun : elle choisit de se voir dans la même personne de la Renaissance que moi : Sofonisba Anguissola ! Ah non c'est pas de jeu ! :)
En tout cas, voilà un blog à consulter pour connaître des noms de femmes d'époques antérieures ou postérieures au XVIe siècle. J'ai lu des billets édifiants qui me font en même temps bien plaisir.
Publié par Michelaise copié/collé par Euterpe
Merci à Michelaise qui recense comme moi des femmes artistes du passé dans son blog et hop, encore un point commun : elle choisit de se voir dans la même personne de la Renaissance que moi : Sofonisba Anguissola ! Ah non c'est pas de jeu ! :)
En tout cas, voilà un blog à consulter pour connaître des noms de femmes d'époques antérieures ou postérieures au XVIe siècle. J'ai lu des billets édifiants qui me font en même temps bien plaisir.
93 ans ! Quel exploit pour l'époque ! Ça entretient le corps et l'esprit, ça permet de rester jeune et en bonne santé de mener sa vie et ses talents à sa guise sans dépendre de personne ! Inspirante Sofonisba. J'aime beaucoup les tableaux et portraits.
RépondreSupprimerAllons bon Euterpe, j'ai listé TOUT le monde (en tout cas à la date du billet !!) mais je n'ai pas pensé que l'intigatrice du tag avait pu, elle aussi, être une femme de la Renaissance. Et qui plus Sofonisba ! Voilà qui est sympa, nous devons avoir quelques autres affinités forcément ! Ravie de cette rencontre, en aussi bonne compagnie ! A bientôt j'imagine
RépondreSupprimerHypathie, j'ai oublié de préciser que les deux dernières toiles (en une seule image où elle figure très âgée) sont de Van Dyck, je ne sais si cela se comprend en lisant le texte !
A Hypathie: j'aimerais bien arriver à cette âge moi aussi ! :)
RépondreSupprimerA Michelaise : moi aussi je suis ravie ! Et il y a plusieurs blogs que je vais me mettre à lire dont le votre (tien ?) pour en savoir plus !