dimanche 31 juillet 2011

Va réveiller la grâcieuse aurore

En attendant de collecter chez les taggés le résultat de mon tag et d'en faire un billet, je transcris un poème d'une poétesse dont j'ai déjà parlé ici mais dont je n'ai jamais présenté de poème intégral. Il me restait donc à pallier ce manque :

Obscure nuit, laisse ton noir manteau

Obscure nuit, laisse ton noir manteau,

Va réveiller la gracieuse aurore,

Chasse bien loin le soin qui me dévore,

Et le discours qui trouble mon cerveau.

Voici le jour gracieux, clair et beau,

Et le soleil qui la terre décore,

Et je n'ai point fermé les yeux encore,

Qui font nager ma couche tout en eau.

Ombreuse nuit, paisible et sommeillante,

Qui sais les pleurs de l'âme travaillante,

J'ai ma douleur cachée dans ton sein,

Ne voulant point que le monde le sache,

Mais toutefois, je te prie sans relâche,

De l'apporter aux pieds du Souverain.

Gabrielle de COIGNARD

mardi 26 juillet 2011

La femme de la Renaissance que vous êtes au fond de vous-même et requiem pour un blogoniste défunt

Les tags déferlent et voici que je remplace la chanson "pourrie" de l'été par un requiem (voir plus bas pourquoi) (miracle, j'ai réussi à copier/collier les hyperliens de la chaîne des taggés ! Le truc consiste à copier/coller toute la page du billet qui présente la liste et effacer ce qu'il y a autour..pfff. Si je ne copie/colle que la liste ca ne marche pas).

ET C'EST A MON TOUR D'ADRESSER UN TAG À LA LISTE DES TAGGÉ.E.S : alors voilà PARMI LES PERSONNAGES FÉMININS DU XVIE SIECLE LEQUEL VOUS CORRESPOND = quelle femme de la Renaissance êtes-vous ?
(prière de ne pas tous choisir la Joconde, merci).

Moi, il est évident (?) que je suis la portraitiste espagnole Sofonisba Anguissola (en toute simplicité, naturellement, hein!). J'adore dessiner, peindre, aquareller les gens et j'espère atteindre le grand âge de cette grande dame, un jour, si la planète tient le coup jusque là, bien sûr. Donc elle me correspond (sans compter que j'apprends l'espagnol, même si je ne fais guère de progrès (soupir)).

Au tour de :

lolobobo, 100 000 V, Ce Que Je Pense …, Bloguer ou ne pas bloguer, Le grumeau, A toi l’honneur !, la suite…, Les divagations NRV de cui cui fit l’oiseau., Détours à Tours, Unhuman, Entre Musique et Politique, Fattorius, le blog d’une femme de sportif, Fucking disgrace, Impromptu, Je n’ai rien à dire ! et alors ??, Le blog de Laurent Grandsimon, Chez Homer, Le Parisien Libéral, Les Peuples du Soleil, Les privilégiés parlent aux Français…, Les trucs de Myrtille, Ecume de mes jours, Margaud cuisine mais préfère diner en ville, Du trASh et DeS bAiSerS!!!, Ménilmontant, mais oui madame…, MINIJUPE, Le blog du modérateur, Mon avis t’intéresse, Mon Mulhouse le blog 100 % BIO, mtislav, A perdre la raison, Philippe Méoule, Du petit monde de Gildan, le blog de polluxe, Princesse101, Reservus’blog…, Cocktail de Web News, Répertoire de la Science Fiction, Le blog de Rébus, Sarkofrance, Sète’ici, Le coucou de Claviers, Une Autre Vie, Moi, je, Alter Oueb, Asclepieia, Autour du Web, Chez dedalus, Bah !, Choblab, Chroniques d’une Chocoladdict, Chroniques d’un breton, DenisHirst.fr, Le Blog de Gabale, Intox2007.info, LMO, Le blog de Luciamel, Maman@Home, Météo Mulhouse, Lyonnitude(s), blog de David Burlot, Traqueur Stellaire, Le Mag TypePad, [Unhuman]geek, Valunivers, Xapur’s Blog.

de répondre à cette question cruciale.

J'ajoute : Hélo, Alice, Hypathie, Paul, Circé, Angèle, Artémise, Lucrecia et Marie à la liste, si elleux ont envie de participer aux deux tags, ou à seulement l'un des deux, au choix.



Ma chanson pourrie de l'été, était une vieille chanson du l'ex-dissident est-allemand Wolf Biermann "Soldat, soldat" en forme de tomates pourries lancées aux persifleurs d'Eva Joly de ce 14 juillet 2011.

Je la remplace par un requiem, le kirie eleison du film Les Choristes dédié à un auteur pour la Jeunesse parce que :

Ajout du 28.7 : l'une des personnes que j'ai taggées vient de décéder....il s'agit du Coucou des claviers . Je ne le connaissais pas mais j'ai rencontré quelques uns de ses commentaires par ci par là. Son blog s'est arrêté à la date du 26 juillet. Il aura emmené ceux qui le lisait, dans ses contes, jusqu'à son dernier souffle. Avant le 22 janvier, ils étaient deux à écrire, Marcelle Pierrod son épouse et lui. J'avais appris son décès et la tristesse du Coucou par les blogs et aussi leur belle relation. Il ne lui aura pas survécu longtemps. Je salue un bel amour comme dans les romans du XVIe siècle, comme on en rencontre plus tellement et peut-être comme il n'y en a pas tellement, en général.
Comme il n'aura pas pu participer à mon tag, je vais m'efforcer de trouver, même si cela prend du temps, un couple de la Renaissance tel que le leur et je le leur dédierai. Adieu Coucou même si je ne te connaissais pas.

lundi 25 juillet 2011

Baise m'encor'

Pour en revenir à mes brebis et mes baisers du XVIe siècle, voilà une sympathique version du sonnet de Louise Labé, "Baise m'encor"en musique.



Mireille Huchon qui ne croit pas à l'existence de Louise Labé trouve que la strophe :

Baise m'encor, rebaise moy et baise
Donne m'en un de tes plus savoureus,
Donne m'en un de tes plus amoureus :
Je t'en rendray quatre plus chaus que braise

ressemble (ou "correspond" d'après son terme qui n'est pas très éclairant sur ce qu'elle veut dire) à la strophe de Catulle (poète latin, v. 87 av. J.-C.) :

Da mi basia mille, deinde centum,
dein mille altera, dein secunda centum,
deinde usque altera mille, deinde centum

(ce qui veut dire : Donne-moi mille baisers, et puis cent, et puis mille autres, puis une seconde fois cent, puis encore mille autres, puis cent)

J'ai beau faire, je ne trouve pas de correspondance très criante. Et vous ?

dimanche 24 juillet 2011

Septimana




Retaggée ! Il s'agit de décrire un événement positif par jour de ma semaine (si j'ai bien compris). Donc Septimana = 7 jours.
1.lundi (jour de la Lune) : j'apprends que L'Adoration du Veau d'Or de Nicolas Poussin a été vandalisé. Pas terrible pour le tableau lui-même et l'oeuvre de Poussin en général mais peut-être un ras-le-bol de l'ère de l'Adoration du Veau d'or dans laquelle nous vivons réellement ? En tout cas, encore une preuve que la peinture a un pouvoir étonnant sur l'affect !
2. mardi (jour de Mars) : où l'on s'est chauffé les mollets au soleil, un café à la main.
3. mercredi (jour de Mercure) : anniversaire de A. qui, contaminée par "mon" XVIe siècle, découvre que la bière leipzigeoise Ur-Krostitzer date de 1534.
4.jeudi (jour de Jupiter) : séance de yoga pilates ou comment devenir molle comme un jeune chat avec Miss Franziska.
5.vendredi (jour de Vénus) : Miss B., 3 ans, me parle allemand mais cause francais à mon chat : "Toa, tûh èz' entille" + m'apprend à dessiner des barrières à l'aide de traits verticaux et horizontaux et au cas où j'aurais du mal à comprendre le principe : "Es ist doch nicht schwierig !" (c'est pas difficile !") grognogne t-elle, agacée par mon air empoté.
6.samedi (jour de Saturne) : découverte de deux futures grandes stars féminines (U. et A.) du chant lyrique + errance nocturne involontaire dans la ville (pris, entre autres le bus dans le mauvais sens). Désorientée par Bizet, Dvorak et Liszt ! Qui l'eut cru ?
7.dimanche (jour du Soleil) : je tagge Hélo,
luciamel,
colo
Kalista
et tout.e.s celleux qui ont envie de jouer le jeu.

Illus. : L'heptagramme de la semaine avec ses planètes (si l'on suit la ligne en commencant par le haut : le Soleil, la Lune, Mars, Mercure, Jupiter, Vénus, Saturne)

jeudi 21 juillet 2011

La spiritualité du baiser au XVIe siècle


Dans un monde où la sexualité et l'amour divorcent dans un fracas qui se veut joyeux, où le sexe a largement rejoint et dépassé les autres addictions : alcool, tabac, sucre, jeux vidéo, télé, ordinateur,shopping,...parlons un peu pour faire contrepoids, de la spiritualité du baiser au seizième siècle.
L'écrivain québecois David Dorais s'exprime très bien là-dessus ici
Sur la biographie de l'auteur je copie/colle ce qu'en dit un catalogue de publications : David Dorais naît à Québec en 1975, à la croisée du bouddhisme et du christianisme, d'une mère vietnamienne et d'un père québécois. Durant les années 1990, il sillonne l'Europe, le plus souvent à pied. Il entreprend alors son noviciat dans un monastère de France, où il reste un an. Il revient ensuite au Québec, où il fonde une famille. Il vit présentement à la campagne, a deux enfants et prépare une thèse sur la poésie érotique de la Renaissance.

Ajout (finalement je transcris en (presque) résumé l'exposé de D. Dorais) :

L'une des plus grandes originalités de l'érotisme du XVIe siècle, c'est l'importance majeure que peut avoir une pratique qui, de nos jours, dans la littérature érotique est presque passé sous silence, c'est-à-dire le baiser.
Le baiser prend une place fondamentale dans l'érotisme renaissant au détriment de ce que nous pourrions considérer comme ce qui aurait de plus naturel c'est à dire l'acte génital. Dans la poésie de la Renaissance, la poésie érotique, amoureuse, le rapport sexuel est à peu près passé sous silence, tandis qu'on va insister énormément sur le baiser, à tel point qu'il va presque devenir un sous-genre littéraire. On a vraiment un type de poème qu'on appelle "Le Baiser" avec un B majuscule, et qui va devenir extrêmement populaire chez plusieurs poètes. Chez presque tous les poètes amoureux, vous allez retrouvé des pièces, des sonnets la plupart du temps, où on va s'attarder sur le baiser. On y décrit toutes les formes que peuvent prendre les baisers, avec la langue, sans la langue, en mordillant ou non, petits baisers secs ou mouillés, avec toutes sortes de métaphores et de comparaisons avec la nature, les oiseaux, les fleurs ; on va beaucoup s'attarder également sur les goûts, les parfums qu'on va retrouver à travers ces baisers.
Pourquoi parmi les états de société et les systèmes de pensée différents, pourquoi à cette époque précise, s'attarde t-on particulièrement sur le baiser ? Parce que les gens du XVIe siècle vont trouver un aspect spirituel dans cette pratique. Pour eux, l'union des corps inclue également une union des âmes ou des esprits, parce que l'érotisme se déroule toujours dans un contexte amoureux, et c'est extrêmement important à ce moment-là, et donc en échangeant des souffles à travers le baiser selon certaines mystiques, ou selon la philosophie néoplatonicienne très en vogue à la Renaissance, les amants échangent leurs âmes et chaque âme va aller trouver refuge dans la personne de l'autre, du partenaire, de l'amoureux, et chacun des amants va héberger, abriter l'âme de la personne qu'elle aime.
Cet aspect spirituel permet aux auteurs de la Renaissance de donner littéralement un nouveau souffle à l'érotisme, c'est à dire de l'amener plus loin et d'inscrire le rapport strictement corporel, physique dans un univers affectif, et même dans un univers presque religieux, avec le tranfert et la migration des âmes. C'est ce qui nous ouvre sur la pensée de la Renaissance, très différente de la nôtre, qui est la pensée analogique, où tout ce qui se déroule sur le plan terrestre va entretenir un rapport avec certains éléments de ce qu'on appelle le macrocosme, du cosmos, de l'univers.
On retrouve cette même pensée dans la vision du corps qu'on va avoir dans l'érotisme renaissant.
Nous, nous sommes habitués, dans la littérature libertine à une vision du corps très médicale, clinique, une vision anatomique du corps, divisée en parties, constitué d'un assemblage de parties.
A la Renaissance, on se situe avant cette vision classique, découpée, et c'est une vision plutôt analogique justement du corps, où les parties du corps, où les gestes vont être en lien avec la vie de la nature, avec des grands mouvements d'énergie, avec des matières que l'on va retrouver dans la nature.
Ainsi à travers le baiser et cette vision ouverte du corps, cela permet d'offrir une vision érotique très différente de ce que nous connaissons de nos jours, une vie pratique, corporelle, qui n'est, non pas refermée comme quelque chose d'uniquement organique, mais qui est ouverte sur une vie spirituelle ou cosmique.

mardi 19 juillet 2011

Le chansonnier des blogonistes


lolobobo a réalisé cette compile avec toutes les chansons de l'été des participant.e.s au tag. Un travail fantastique à partir d'une idée absolument adorable !



Ici, la couverture de CLES de ce mois-ci avec la Dame à l'Hermine de Léonard, une paire d'écouteurs sur les oreilles. Elle illustre parfaitement la sortie de la compile.



Dans le magazine : "Vivons-nous une nouvelle Renaissance ?" Se demande une poignée d'humains unisexes (pas le mien) bien connus. Les nouvelles technologies pour lesquelles la poignée semble nourrir une admiration égale à celle qu'ils ont d'eux-mêmes, leur paraissent générer un bouleversement de nos repères tel qu'il s'en produisit un à la Renaissance. Qu'ils refreinent leur enthousiasme. Ces nouvelles technologies ont une faiblesse de taille que n'avaient pas celles du XVIe siècle : elles dépendent d'une production énergétique considérable qui nous place devant de graves dilemnes d'approvisionnement, à base de nucléaire et autres méthodes mortifères susceptibles de nous détruire tous avec une rapidité que nous ne mesurons pas encore. Alors, en ce qui me concerne, et bien que je n'aie pas été interrogée n'étant pas du bon sexe, je dirais que ce débat est encore une fois basé sur la vaine et prétentieuse idée que nous dominerions le monde. Et bien non. Inutile de se leurrer. Nous dansons sur un volcan, il ne faudrait pas l'oublier !

lundi 18 juillet 2011

Liens en rapport avec le chansonnier des blogonistes

Merci à angèle (grâce à laquelle j'ai appris que la GEMA (SACEM allemande) faisait exprès d'avoir des démêlés avec youtube sur les droits de diffusions musicales pour que je sois privée de certaines vidéos dont la sienne), merci à hypathie, à journaldeclasse à lucrecia bloggia qui a bouleversé la blogosphère tout entière avec ses choix originaux et sa copine Marie, à danse de plume dont je ne sais pas si lolobobo a remarqué la participation tardive. Et maintenant quelques liens sur les inconnus qui ont fait circuler tous les liens dont le mien : lui elle lui elle lui elle (si ca se trouve), euh...qui encore ? Ouf c'est fastidieux de recopier des liens, je vais arrêter là...ah non, il y a Bibi que je voulais signaler à cause de son Karaoké. Sinon je continuerai si j'ai un moment.

samedi 16 juillet 2011

Je note que l'auto-censure n'a pas fonctionnée ce week-end



Me revoila taggée ! "outline" (hors du net) on récolte les fruits, "online" on récolte les tags.
Celui-ci est même un multitag. Premier tag, il faut noter les agences de notation. Alors pour moi c'est facile, c'est zéro partout. La spéculation étant devenue une arme de destruction massive, je suis d'avis que le système économique dans son ensemble est à revoir et rapidement. Voilà un tag de régler. Le deuxième consiste à dire ce que l'on a fait ce week-end. Disons que j'ai le sentiment d'avoir surtout fait du baby-sitting de chats mais c'est subjectif. Sinon je note que l'auto-censure sexiste n'a pas fonctionnée en cette fin de semaine, les attaques personnelles réservées aux candidatEs comme elles ont visées en son temps Ségolène Royal (ce qui ne l'a pas empêchée d'arriver au second tour) frappent aujourd'hui Eva Joly. Quand il s'agit d'une femme la xénophobie est le cache-pot du sexisme (car qui s'inquiète aux gouvernements des origines de Rachida Dati puisqu'elle ne menace pas de prendre la place du président ?).
Le dernier tag est assez paradoxal dans la mesure où il s'agit de parler de sa propre censure et donc de dire de quoi on ne parle PAS. Or si je n'en parle pas, je ne vais pas en parler pour dire que je n'en parle pas ! QED (quod erat demonstrandum ).

Voilà je crois que j'ai fait le tour des tags !

Et hop ! Je vais pouvoir passer à autre chose, maintenant.



Voici une ancienne adaptation ciné de "La reine Margot" qui a sûrement marqué bien des esprits comme celui du guide du château de Blois dont j'ai parlé ici.
On y voit la méchante Catherine de Médicis (l'empoisonneuse) incarnée par Francoise Rosay et le rusée parfumeur (empoisonneur inofficiel) incarné par Louis de Funès.
C'est extrêmement caricatural.
Autre partie de la vidéo : Charles IX apprend qu'il a été empoisonné par sa mère (qui, en fait, voulait empoisonner Henri de Navarre).
En réalité, Charles IX serait mort d'une pleurésie.
Ah ces affreuses femmes de pouvoir, des vrais dangers publics !

vendredi 15 juillet 2011

Prédiction de Jeanne la huguenotte

Pendant que j'en suis aux Mémoires de grandes dames de l'ancien Régime, parlons de celles de Jeanne d'Albret :



(ce livre n'est pas celui des mémoires de Jeanne mais la couverture de cette bio est plus attrayante)

Dans ses Mémoires, Jeanne parle à plusieurs reprises de sa crainte d'un massacre général des protestants tel celui qui eut lieu à la Saint-Barthélémy. Or on ne peut la soupconner d'avoir à postériori feint cette prévision puisqu'elle mourra un peu avant. Je n'ai pourtant jamais entendu les historiens se référer aux multiples prédictions de Jeanne d'Albret à propos de ces événements (sauf Berdou d'Aas ci-dessus mais, normal, il écrit une biographie de Jeanne!). Ah ben oui, "c'est une femme qui parle" (selon la formule consacrée) !

(Explication de l'extrait ci-dessous : Jeanne est barricadée au château-fort de Nérac, l'un de ses principaux fiefs, pour se prémunir de l'enlèvement de son fils (le futur Henri IV) car elle a appris qu'un certain de Losses du parti catholique le projetait. Monluc, cité ici, est un général d'armée qui servit trois rois et sema la terreur chez les huguenots par de nombreux attaques, pillages et massacres dans leur camp.
"Ses Majestés" sont Charles IX et Catherine de Médicis qui souhaitent une tolérance réciproque des deux camps religieux mais son cernés par les conspirateurs. Quand Jeanne parle des séditieux qui ne respectent ni le roi ni les édits, elle fait allusion à l'édit de pacification qui vient d'être promulgué. Le cardinal de Lorraine et autres cardinaux dépêchés de Rome à cet effet veillent à ce que le parti huguenot soit tenu en échec et peut-être incitent ses "Majestés" et les nobles à les exterminer. Mais écoutons Jeanne qui semblent trouver la situation très alarmante. (Nous sommes le 8.8.1568, la Saint-Barthélémy aura lieu quatre ans et seize jours plus tard).

"Je demeurais donc audit Nérac et non sans peine. Et Monluc sait combien de fois j'ai empêché que les nôtres ne s'assemblassent les premiers. J'en ai renvoyé plusieurs qui, effrayés tant des nouvelles de l'entreprise du ravissement de mon fils par le dit sieur de Losses que de menaces des papistes, me venaient trouver. A la fin, voyant tous ces sinistres présages de guerre, et même considérant les réponses que m'avait apportées Voupillières, forgées en la boutique du cardinal, je cogneu et à mon regret que les affaires de ce royaume penchaient du côté de la ruine, puisqu'en lieu de les étayer par bons et promptes remèdes, selon l'avis qu'en avaient tous les jours leurs Majestés par leurs plus fidèles sujets et serviteurs, l'on mettait la sappe au pied par une connivence des crimes et violences faites, même au Roi en ses édits, et qui s'augmentaient avec un tel débordement, que je fus plus que contrainte de laisser à penser à mes affaires particulières pour discourir à part moi, et puis avec mes amis et serviteurs, de l'évènement de tous ces orages, et quelle fin ils pouvaient tirer après eux, ramenant les troubles passés ; et par quelle violence et contrainte ceux de la Religion réformée avaient été plus que forcés de s'armer et défendre, et que, pour une des occasions qui les contraignaient à cela, il y en avait dix en ce temps ici.
Je fais ma conclusion ainsi : qu'il fallait de deux choses l'une, à savoir ; que leurs Majestés pour retrancher le cours à ce fleuve impétueux de misères, donnant lieu aux conseils et avis de ceux qui, avec pitié et zèle à leurs services, les avertissant tous les jours du mal, lui en disaient quant et quant le remède, il leur plut les croire et approchés de leurs Majestés ; ou que, s'ils s'endurcissent au mal, quittant le timon de ce pauvre royaume et l'abandonnant aux vents et flots de l'adversité par la malice des faux et traîtres pilotes d'icelui, auxquels ils se fient trop, qu'il était nécessaire par nécessité forcée que les princes du sang, comme étant astreints à un plus particulier devoir, et après la Noblesse et le peuple, missent la main vertueusement à l'oeuvre, s'opposant par tous moyens, comme fidèles sujets et serviteurs, à telle ruine dudit royaume. Et que cette opposition serait cause que le cardinal de Lorraine, pour pêcher en eau trouble, n'entreprendrait rien moins pour s'ôter cet empêchement de nous faire tous mourir, comme la lettre du cardinal de Créqui, de laquelle, pour être ci-dessous imprimée, je ne parle d'avantage, lui enlève le masque ; (...). "

mercredi 13 juillet 2011

222 ans c'est trop


222 ans de droits de l'homme sans les femmes ! 222 ans de gavage avec les multiples cultes livrés à des masses ininterrompus d'hommes. Assez !

Décrétons le 14 juillet jour de deuil pour les femmes. Portons le crêpe à la mémoire d'Olympe de Gouges assassinée par ses frères d'armes qui se sont ligués contre l'égalité des sexes.

(c'était ma participation personnelle à cette fête annuelle semi-nationale (= les femmes ne sont pas prises explicitement en compte dans cette nation, Olympe de Gouges n'a pas été réhabilitée, nous autres femmes ne sommes donc pas concernées)).

dimanche 10 juillet 2011

Voilà voilà j'arrive !

Sans le moindre rapport avec le contenu habituelle de ce blog, je réponds au sympathique tag de lolobobo qui propose à plusieurs blogonistes dont moi (chic ! Je suis ravie !) de publier sa chanson de l'été. Bon OK ma chanson c'est plutôt la chanson d'un été déjà depuis loooooonnnntemps passé mais que j'ai retrouvé sur youtube avec une certaine jubilation. J'ai hésité entre Rihanna S&M (^^) et tiens-toé ben j'arrive de Diane Dufresne.
Pardon à tous celles et ceux qui attendaient peut-être une polyphonie.
Je m'octroie une parenthèse vacancière, après tout on est en juillet :



Ca décoiffe, non ? L'image c'est un peu moi en train d'attendre mon vaisseau spatio-temporel.

Lolobobo a tagué tou.te.s ces blogueurs/euses :
100 000 V, Ce Que Je Pense...,Bloguer ou ne pas bloguer, Le grumeau, A toi l'honneur !, la suite..., Les divagations NRV de cui cui fit l'oiseau., Détours à Tours, Unhuman, Entre Musique et Politique, Fattorius, le blog d'une femme de sportif, Fucking disgrace, Impromptu, Je n'ai rien à dire ! et alors ??, Le blog de Laurent Grandsimon, Chez Homer, Le Parisien Libéral, Les Peuples du Soleil, Les privilégiés parlent aux Français..., Les trucs de Myrtille, Ecume de mes jours, Margaud cuisine mais préfère diner en ville, Du trASh et DeS bAiSerS!!!, Ménilmontant, mais oui madame..., MINIJUPE, Le blog du modérateur, Mon avis t'intéresse, Mon Mulhouse le blog 100 % BIO, mtislav, A perdre la raison, Philippe Méoule, Du petit monde de Gildan, le blog de polluxe, Princesse101, Reservus'blog..., Cocktail de Web News, Répertoire de la Science Fiction, Le blog de Rébus, Sarkofrance, Sète'ici, Le coucou de Claviers, Une Autre Vie, Moi, je, Alter Oueb, Asclepieia, Autour du Web, Chez dedalus, Bah !, Choblab, Chroniques d'une Chocoladdict, Chroniques d'un breton, DenisHirst.fr, Le Blog de Gabale, Intox2007.info, LMO, Le blog de Luciamel, Maman@Home, Météo Mulhouse, Lyonnitude(s), blog de David Burlot, Traqueur Stellaire, Le Mag TypePad, [Unhuman]geek, Valunivers, Virginie B, Xapur's Blog, Zette And The City, quoi les liens ne se copient/collent pas automatiquement ??? Il faut aller tous les chercher ? Je le ferais petit à petit alors. Ou alors il y a un truc que ceux qui ont recopié cette liste connaissent...n'hésitez pas à me le révéler !
Bon je rajoute pas tout à fait au hasard fa#, lucrecia bloggia, journal de classe, mebahel, angèle, marie et tou.te.s ceux/celles qui veulent se prêter au jeu !

Edit : je ne vais pas mettre le lien correspondant à chacun de ces blogs, d'abord parce qu'ils sont trop nombreux, ensuite parce que si je prends en compte les gros machos cela contredit le travail que je fais ici et comme cela je peux m'arrêter là, ce qui ne veut pas dire que tous ceux dont je n'ai pas mis le lien sont des machos mais qu'ils/elles sont juste trop nombreux.

jeudi 7 juillet 2011

Les mots (maux) de la reine Margot


Dans ce billet j'ai évoquée les poèmes d'adieux de femmes adressés à des femmes, des reines à leurs demoiselles d'honneur et vice versa.
Parmi eux se trouve celui de Marguerite de Valois à Mademoiselle de Thorigny. Dans ses Mémoires, Marguerite de Valois raconte les circonstances de cette séparation. Elle se plaint des agissements d'un mignon du roi Henri III, Louis Béranger du Guast, cause et de la perte de la demoiselle d'honneur préférée de Catherine de Médicis et de la fameuse Thorigny pour laquelle Marguerite nourrissait une grande amitié. Ce du Guast apparaît assez comme un épouvantable misogyne qui passait son temps à brouiller tout le monde et à persécuter les femmes. Celle que l'on nomme la reine Margot mais qui ne s'est jamais appelée comme cela en réalité, était à ce moment-là déjà l'épouse de Henri de Navarre ; le règne de Charles IX et la Saint-Barthélémy étaient passés, c'est Henri III qui commandait, en attendant son assassinat, et ce sinistre favori faisait apparemment la loi à sa place. Je vous laisse lire la prose de l'intelligente et sensible soeur du roi qui observe et subit l'ambiance :

(...) et recherchant de fabriquer quelque nouvelle invention pour nous rebrouiller le roi mon mari et moi, met à la tête du roi (met en tête au roi), qui depuis peu de jours avait ôté (par le même artifice de du Guast) à la reine sa sacré princesse, très vertueuse et bonne, une fille qu'elle aimait fort et qui avait été nourrie avec elle, nommée Changy, qu'il devait faire que le roi mon mari m'en fit de même, m'ôtant celle que j'aimais le plus, nommée Thorigny - sans en amener autre raison, sinon qu'il ne fallait point laisser auprès des jeunes princesses des filles en qui elles eussent si particulière amitié. Le roi, persuadé de ce mauvais homme (convaincu par ce mauvais homme), en parle plusieurs fois à mon mari, qui lui répond qu'il savait bien qu'il me ferait un cruel déplaisir : si j'aimais Thorigny, j'en avais l'occasion ; qu'outre ce qu'elle avait été nourrie avec la reine d'Espagne ma soeur, et avec moi depuis mon enfance, qu'elle avait beaucoup d'entendement, et que même elle l'avait fort servi en sa captivité du bois de Vincennes ; qu'il serait ingrat s'il ne s'en resouvenait ; et qu'il avait autrefois vu que sa Majesté en faisait grand état. Plusieurs fois, il s'en défendit de cette facon. Mais enfin Le Guast persistant toujours à pousser le roi, et jusques à lui faire dire au roi mon mari qu'il ne l'aimerait jamais si dans le lendemain il ne m'avait fait ôter Thorigny, il fut contraint - à son grand regret, comme depuis il me l'a avoué - m'en prier et me le commander. Ce qui me fut si aigre, que je ne me pus empêcher lui témoigner par mes larmes combien j'en recevais de déplaisir, lui remontrant que ce qui m'en affligeait le plus n'était point l'éloignement de la présence d'une personne qui, depuis mon enfance, s'était toujours rendu sujette et utile auprès de moi, mais que,[chacun] sachant comme je l'aimais, je n'ignorais pas combien son partement (départ) si précipité porterait de préjudice à ma réputation. Ne pouvant recevoir ces raisons, pour la promesse qu'il avait faite au roi de me faire ce déplaisir, elle partit le jour même, se retirant chez un sien cousin, nommé Monsieur Chastelas. Je restai si offensée de cette indignité - à la suite de tant d'autres - que ne pouvant plus résister à la juste douleur que je ressentais (qui, bannissant toute prudence de moi, m'abandonnait à l'ennui), je ne pus plus me forcer à rechercher le roi mon mari. De sorte que, Le Guast et Madame de Sauve d'un côté l'étrangeant de moi, et moi m'éloignant aussi, nous ne couchions plus ni ne parlions plus ensemble.

Alexandre Dumas qui s'est inspiré des Mémoires de Marguerite pour écrire le roman "La reine Margot" reprend certaines intrigues décrites ici mais les situe sous Charles IX et les attribue à Catherine de Médicis, non à du Guast (en particulier celle où Mme de Sauve est poussée dans les bras de Henri de Navarre). Dans ce passage on voit que Catherine de Médicis elle-même est dépouillée de la femme qu'elle affectionne le plus, il est donc bien abusif de raconter à des élèves de CM1 que cette reine s'imposait pendant que ses pauvres fils étaient impuissants à l'en empêcher. Mais les Mémoires de Marguerite de Valois ne sont guère au programme de l'éducation nationale ni évoquées dans la presse littéraire. Témoigneraient t-elles trop d'un machisme à la francaise où non seulement le corps des femmes mais leur coeur étaient contrôlés par les hommes ? Où les femmes n'avaient même pas le droit de disposer de leurs sentiments et de leurs amitiés ? Où ce même machisme à la francaise existait déjà qui montre aujourd'hui de si "beaux" restes ?

(Peinture : Henri III et les ambassadeurs anglais de Bonington Richard Parkes).

lundi 4 juillet 2011

Candida Candidis (pure parmi les pures)


Telle fut la devise de la reine Claude.


L'emblème d'Anne de Bretagne fut le cygne puis l'hermine. Comme pour le cygne, la blancheur immaculée, de sa fourrure (en hiver) fit de l'hermine le symbole de la pureté. Car il était de tradition pour les femmes d'adopter des emblèmes liés à la couleur blanche. L'hermine est à l'origine de la devise bretonne „Plutôt la mort que la souillure“ (en latin : "Potuis mori quam foedari"). On aurait vu cet animal se retourner contre un renard plutôt que de traverser un ruisseau de boue pour s'enfuir en se souillant. La fille d'Anne de Bretagne prit pour sa part l'emblème du cygne dit "navré", c'est à dire transpercé d'une flèche. La devise de cette reine était : "Pure parmi les pures". Le cygne était également un symbole de pureté et de sincérité, mais aussi de solitude ce qui allait bien à Claude de France car elle était bien seule.
Le cygne navré signifie t-il alors la pureté navrée ?

D'après un généalogiste du web le symbole est entièrement lié à la Bretagne. Je cite :

"On retrouve le cygne comme cimier des ducs de Bretagne, au XIVe siècle. Le cygne sera encore l'emblème de Claude, la fille de la duchesse Anne de Bretagne, à cette différence que le cygne est ici transpercé d'une flèche, symbole de la liberté bretonne assassinée. En effet, c'est le mari de cette dernière, le roi de France François Ier, qui, violant les accords passés entre Anne de Bretagne et les souverains français, s'arrogeant des droits auquels il ne pouvait en aucun cas prétendre, puis soudoyant ou intimidant les membres des états de Bretagne, leur fit signer l'acte d'Union de la Bretagne à la France en 1532".

Claude de France est morte à l'âge de 25 ans comme je l'ai déjà relaté dans un autre billet. Brantôme nous dit : "que le roy son mary luy donna la vérolle, qui lui advança ses jours". Autrement dit, elle mourut prématurément en raison (
entre autres) d'une MST que lui avait transmis son mari infidèle (ce même François Ier cité plus haut à propos de la manière dont la Bretagne a été annexée à la France). Ainsi la pureté "candida", le devoir des femmes, a été entachée par la souillure "foeditas", "privilège" des hommes, qui s'avère parfois mortelle. En effet, un cygne navré n'en a plus pour longtemps à vivre.

Cette information relayée par Brantôme sur la MST royale est considérée par les historiens francais "sérieux" (qui sont des sortes de journalistes "sérieux" du passé) comme relevant de la vie privée (synonyme de "taboue" et "sacrée") ou de la rumeur, donc indigne d'être divulguée à moins de l'être par un misérable amateur de ragots, comme l'on disqualifie habituellement Brantôme. Le Canard enchaînée dirait que seule des féministes délirantes (selon les termes de ce journal commentant la dénonciation de l'omerta autour du comportement sexuel de DSK) sont capables de voir autre chose dans une telle info.

Et à propos de cette sorte de vie privée, ainsi que de pureté et de souillure dans la relation de nos hommes de pouvoir avec leurs otages féminines, je recommande le billet humoristique de Claude Guillon (merci à Paul) traitant d'une autre souillure, le viol, où il est dit : "mieux vaut être vierge pour être violée et être crue".....(et encore ce n'est pas sûr d'après ce qu'en dit Mme Salmona ici).....faut-il donc être pure parmi les pures ?


Pour ce qui est de la chronique contemporaine, je souhaite de toutes mes forces bonne chance à Tristane Banon, l'hermine qui se retourne aujourd'hui seule contre le renard.

samedi 2 juillet 2011

"Incontinence et impudence" ou quand un satyre qui avait du pouvoir a fini par se faire tout bonnement assassiner

"L'incontinence d'un Duc et son impudence pour parvenir à son intention, avec la juste punition de son mauvais vouloir" c'est le titre de la XIIe nouvelle de l'Heptaméron de Marguerite de Navarre.
Un duc florentin de la famille des Médicis (un homme de pouvoir, donc) marié, certes, mais infidèle, se met à convoiter une femme vertueuse qui n'est autre que la soeur de son bras droit et gérant de sa maison. Le duc s'ouvre à ce gentilhomme subalterne et lui exprime le voeu de posséder sa soeur (à la soeur, on ne pose pas de question. Il s'agit d'une sorte de droit de cuissage, il faut l'accord du proprio, c-à.d. l'homme de la famille et à défaut du père, il s'agit du frère). Le frère de la jeune fille est choqué et refuse de se faire complice d'une entreprise malhonnête mais le duc le menace à mots couverts de mort s'il n'obtient de sa soeur qu'elle se soumette aux désirs de son maître. Le gentilhomme ne souhaitant pas sacrifier sa soeur ni jeter le déshonneur sur sa famille se résout à assassiner le duc avant de s'enfuir en Turquie pour y refaire sa vie.

Les commentaires de la nouvelle qui suivent cette narration mettent à jour le fait que la vertu féminine est un puissant excitant sexuel pour l'homme (voir aussi le billet de Kalista sur Lucrèce) et qu'il n'hésite pas à rendre la femme responsable de ce désir alors même qu'elle ne souhaite pas le susciter :

Homme n°1 (qui a conté cette histoire) dit :"Voilà, mesdames, qui doit bien vous faire craindre ce petit dieu (le désir ? Le pénis ?), qui prend son plaisir à tourmenter autant les princes que les pauvres, et les forts que les faibles, et qui les aveugl[e] jusqu'[à] oublier Dieu et leur conscience et à la fin leur propre vie. Et doivent bien craindre les princes et ceux qui sont en autorité de faire déplaisir à moindre qu'eux (...).

Traduction : attention, femmes, aux petits tyrans qui ne craignent rien ni personne et aiment user du pouvoir de faire impunément du mal à autrui.

(...) les uns soutenaient que le gentilhomme avait fait son devoir de sauver sa vie et l'honneur de sa soeur,[tous] d'avoir délivrer sa patrie d'un tel tyran. (...) [Cependant] les dames disaient qu'il était bon frère et vertueux citoyen ; [tandis que] les hommes au contraire, qu'il était traître et méchant serviteur. Mais les dames (...) disaient que le duc était si digne de mort que bien heureux était celui qui avait fait le coup. Parquoi voyant [Homme n°1] le grand débat qu'il avait ému, leur dit : Pour Dieu, mesdames (...) gardez que vos beautés ne fassent point faire de plus cruels meurtres que celui que j'ai conté.

Traduction : quand même ! Assassiner un duc ! Attention, femmes, de ne pas éveiller le désir chez les puissants au cas où cela ferait un grabuge tel que des hommes seraient amenés à s'entretuer (très pratique à suivre comme recommandation vu que les hommes sont à priori responsables de leur désir, non ?).

Femme n°1
[réplique] : "La Belle Dame sans Merci" nous a appris à dire que si grâcieuse maladie ne met guère de gens à mort !"

Traduction : allons, allons ! En principe le désir ne tue personne !

- "Plût à Dieu, madame, ce lui dit [Homme n°1], que toutes celles qui sont en cette compagnie sussent combien cette opinion est fausse ! Et je crois qu'elles ne voudraient point avoir le nom d'être sans merci, ni ressembler à cette incrédule qui laissa mourir un bon serviteur par faute d'une grâcieuse réponse".

Traduction : faux car "il y a eu mort d'homme" en cette occurence et tout ca parce que la dame a été sans pitié, au lieu que si elle avait été moins revêche et plus complaisante, il n'y aurait pas eu de problème. (Quelle pimbêche ! Elle a éveillé le désir du fait de sa vertu et finalement cette vertu c'était juste de la rigidité mal placée puisqu'un meurtre a eu lieu à cause d'elle ! (Il n'est donc plus question de la tyrannie du duc ? C'est la mauvaise volonté féminine qui est en cause maintenant ?).

- "Vous voudriez donc dit [Femme n°1], pour sauver la vie d'un qui dit nous aimer, que nous missions notre honneur et notre conscience en danger ?"

Traduction : il faut donc se prostituer pour avoir la paix ou quoi ?

- "Ce n'est pas ce que je vous dis, répondit {Homme n°1], car celui qui aime parfaitement craindrait plus de blesser l'honneur de sa dame qu'elle-même (.........)"

Là Homme n°1 est parti dans une théorie tarabiscotée que je ne transcris pas intégralement, mais destinée à faire croire que le duc n'était pas mal intentionné puisqu'amoureux, alors qu'il s'agissait bien de désir purement sexuel en réalité puisque l'homme n'a même pas daigné s'enquérir de la réciprocité de son désir. Les femmes ne sont pas dupes :

- "Toutefois dit [Femme n°2], si est-ce toujours la fin de vos oraisons, qui commencent par l'honneur et finissent par le contraire. (...)".

Traduction : vous essayez toujours de nous faire croire que les hommes respectent l'honneur des femmes qu'ils convoitent tout en finissant par dire l'inverse.

- [Homme n°2] jura, quant à lui, qu'il n'avait jamais aimé femme, hormis la sienne (...). Autant en dit [Homme n°3] (...). [Homme n°4] lui dit : (...) mais quant à moi je puis vous jurer que j'ai tant aimé une femme que j'eusses mieux aimer mourir que pour moi elle eût fait chose dont je l'eusse moins estimée. (...).

Du coup la moitié des hommes de l'assemblée se récrient vite fait qu'ils sont archi fidèles (aimer et coucher ont l'air d'ailleurs synonymes dans leur propos) et ne veulent pas être comparés à ce duc éhonté. Homme 4 trouve l'attitude de la femme inattaquable et n'en attend pas moins de la sienne.

[Homme n°5] se prit à rire en disant : "[Homme n°4], je pensais que l'amour de votre femme et le bon sens que vous avez vous eussent mis hors de danger d'être amoureux, car vous usez encore des termes dont nous avons accoutumé de tromper les plus fines et d'être écoutés des plus sages. (...)"

Traduction : homme n°5 les trouve tous plus ou moins faux-jetons et trouve que la palme revient à Homme 4 qui flatte la vertu féminine, manière de s'exprimer typique d'après lui de la faux-jetonnerie caractéristique des maris volages.

- "Vraiment, dit [Homme n°4], je vous pensais autre que vous ne dites, et que la vertu vous fût plus plaisante que le plaisir".

Homme n°4 ne se laisse pas faire (soit il est sincère soit il ne veut pas être mal vu par les dames). Il défend son point de vue sur la vertu en se montrant étonné que Homme n°5 puisse se montrer aussi cynique.

- "Comment ! dit [Homme n°5], est-il plus grande vertu que d'aimer, comme Dieu le commande ? Il me semble que c'est beaucoup mieux fait d'aimer une femme comme femme que d'en idolâtrer plusieurs comme on fait d'une image. et quant à moi, je tiens cette opinion ferme qu'il vaut mieux en user que d'en abuser".

Homme n°5 dit estimer que la vertu c'est bien beau mais qu'il vaut mieux palper du tangible que d'admirer des images de loin.

Les dames furent toutes du côté de Homme n°4 et contraignirent Homme n°5 de se taire - (...)

La franchise de homme n°5 concernant l'adultère ulcère les femmes. Homme n°5 se plaint alors d'être mal traité.

- "Votre malice, lui dit Femme n°3, est cause de [ce que l'on vous traite mal], car qui est l'honnête femme qui vous voudrait pour serviteur après les propos que vous nous avez tenus ?"

Traduction : quelle femme souhaiterait être courtiser par vous quand vous annoncez si ouvertement trouver honnête de la tromper selon votre bon plaisir ?

- "Celles qui ne m'ont point trouvé fâcheux, dit [Homme n°5], ne changeraient pas leur honnêteté à la vôtre mais (...) n'en parlons plus".

Traduction : quoi que vous en disiez, vous n'êtes pas plus honnnête que celles qui m'ont accordé leurs faveurs.

Dans une assemblée où les femmes ont le même droit à la parole que les hommes et ne sont pas minoritaires (ici toutes ne prennent pas la parole) et où il est question d'abus de pouvoir à l'égard d'une femme (et collatéralement d'un homme), on constate que les hommes s'efforcent de s'entendre avec les femmes quitte à leur mentir (à une exception près) pour leur complaire.
Dans les débats télévisés auxquels nous assistons relativement à l'affaire DSK, il s'y trouve immanquablement une majorité d'hommes et les une femme et demi en présence sont souvent triées sur leur propension à adopter le discours masculin. Les médias nous servent donc des débats à fort taux de testostérone à croire que la société ne comprend pas ou peu de femmes qui pensent autrement que les hommes sur les rapports hommes/femmes.

Dans l'Heptaméron, la mauvaise foi masculine, la propension à rendre coupable les femmes de leurs frasques à eux sont tempérées par une solidarité féminine qui frappe d'autant plus que dans les médias actuels où la parité est volontairement évitée, elle n'est guère visible.