jeudi 30 août 2012

Isis


Religions du monde
(19:31)


J'écoute presque chaque dimanche matin l'excellente émission de Geneviève Delrue "Religions du monde" sur Rfi, radio internationale. Même si l'on ne s'intéresse absolument pas aux religions, on ne peut qu'être pris par les débats finement menés par la "modératrice". D'ailleurs, il suffit de se rappeler que des religions, il en naît tous les jours, et bien qu'elles ne portent pas le nom de "religions", elles n'en sont pas moins des croyances irrationnelles qui semblent prendre la place des religions dites "traditionnelles". Il est donc très intéressant d'écouter ce que cherche l'être humain dans cet abandon à une idée apparemment sans grand fondement. Nous avons par exemple les scientistes qui croient dur comme fer que l'on peut absolument tout expliquer par la science, que la science est toute puissante , qu'elle va résoudre tous les problèmes de l'humanité et que l'on peut tout casser sur Terre parce que le Dieu science va tout réparer ou, sinon, transformer l'humain en cyberhumain adapté à la casse et donc nous extraire enfin (ô joie) de la glaise avec laquelle nous avons été façonné.e.s en même temps que le reste du vivant, chose qui déplaît beaucoup aux scientistes, car ils ne veulent pas ressembler au reste du vivant. Vouloir éradiquer les religions est donc parfaitement inutile car il s'en créé aussitôt d'autres qui ne disent pas leur nom et sont de ce fait encore plus incontrôlables que les traditionnelles.

La dernière émission a été particulièrement passionnante car la personne invitée en 1re partie était la grande égyptologue féministe Florence Quentin.  
  



Qu'y a-t-il de commun entre Cléopâtre, la Vierge noire de Notre-Dame du Puy, Elisabeth Ire, la Flûte enchantée de Mozart, les loges maçonniques de la Révolution Française ou la poésie de Goethe et bien c'est la déesse Isis. Telle est la présentation de l'émission sur le site de Radio france internationale.
 Florence Quentin y présentait, en effet, son dernier livre : Isis l’éternelle biographie d’un mythe féminin.



  Déesse-Serpent, Picture Isis comme Eve est associée aux serpents. À Fayoum où elle a été honorée en tant que Thermouthis (La déesse Rénénoutet ou Renenout ou Ermouthis ou Thermouthis ou Renenet ou Renout "le serpent nourricier", elle tenait le rôle d'une déesse agraire qui apportait aux égyptiens sa protection au temps des récoltes, préservait ces mêmes récoltes dans les greniers, dans les celliers et dans les caves pour les vignerons. Isis avait l'apparence d'un cobra. Elle était donc la déesse cobra protectrice des récoltes et des moissons. À Alexandrie en tant que Tyché Agatha (Fortuna à Rome), elle était plutôt perçue comme la déesse de la Bonne Fortune.
Pour expliquer les cycles de la nature, les crues régénératrices, la mort et la renaissance, les égyptien.ne.s ont imaginé un couple humanoïde fondateur de la civilisation.
La cosmogonie égyptienne à l'instar de la cosmogonie chrétienne est de type solaire. La Genèse étant un peu similaire à la Genèse chrétienne, on a d'abord un monde plongé dans l'obscurité avec un dieu (Hatoun) qui faconne un couple Tefnout, l'humidité et Chou la lumière. Celleux-ci mettent au monde un autre couple Nout le ciel (une femme) et Geb la terre (un homme) qui mettent elleux-mêmes au monde 5 enfants dont Isis et Osiris (frère et soeur jumeaux et amants) qui s'aiment déjà dans le ventre de leur mère. Ce dernier couple a entre autres pour frère et soeur, Seth et Nephtys.
Seth, le frère, tue Osiris et découpe son corps en 14 morceaux.
Les deux soeurs, Nephtys et Iris, reconstituent le corps d'Osiris à partir des 14 morceaux (14 jours : le cycle lunaire).
Osiris n'est donc qu'un héros passif de la cosmogonie. C'est Isis qui lui redonne sa virilité et lui fabrique un phallus. Elle est créatrice, rédemptrice et préside à la création du langage. C'est la grande magicienne. Florence Quentin fait un parallèle dans son livre avec les 99 noms d'Allah et un nom caché car Isis vole le nom secret de Râ et c'est elle qui a alors la toute-puissance.
L'histoire de l'assassinat d'Osiris par Seth étant trop horrible, les égyptiens n'en parlent presque pas. C'est pourquoi on ne le trouve pour ainsi dire que dans l'oeuvre de Plutarque.

 Isis protégeait les femmes et les enfants. Elle était thaumaturge et guérissait des morsures de serpent. Pendant l'époque pharaonique elle n'est que le féminin d'Osiris mais bientôt elle le supplante et arrive au premier plan. Ce changement de statut correspond à la venue d'Alexandre le Grand en Égypte. Des temples consacrées à Isis sont alors construits à Alexandrie.

Pourquoi ce culte a t-il été ensuite rejeté ?
D'après F.Q., pour les Romains Isis représentait l'Orient honni. Ils avaient peur de la puissance d'Isis. C'est elle seule qui avait le pouvoir de faire monter un homme sur le trône.
Les Chrétiens ont alors masculinisé Dieu et récupéré le personnage d'Isis dans la personne de Marie. On a christianisé l'Isis lactance que l'on retrouve dans les Vierges noires. Ces Vierges sont des idoles qui viennent en partie d'Égypte.
Marie a récupéré les attributs d' Isis : l'enfant, la croix, la Lune sous les pieds, et la sagesse. Les hymnes à la Vierge ressemblent comme deux gouttes d'eau aux hymnes à Isis.

A partir de là, Isis revient sans cesse au fil du temps.
A partir du IIe s. av. J.-C. sont mis en circulation les premiers écrits alchimiques attribués à Hermès Trismégiste. Ainsi commence ce qu'on appelle "la tradition hermético-alchimique". L'un des titres des travaux d'Hermès T. est : Isis la prophétesse à son fils Horus.
AU XVe siècle, les écrits d'Hermès T. sont traduits et divulgués par Marsile Ficin. En raison de son intérêt pour ces auteurs païens de l'Antiquité et pour l'astrologie, il fut accusé de sorcellerie par le pape Innocent VIII et échappa de peu aux rigueurs de l’Inquisition. Au XVIe siècle, les attributs d'Isis se retrouvent dans certaines toiles représentant Elisabeth Ire (ci-dessus). Isis réapparaît également au XVIIe siècle dans la tragédie lyrique de Philippe Quinault mise en musique par Jean-Baptiste Lully. On la retrouve au XVIIIe s., dans La flûte enchantée de Mozart.
A la Révolution, on est dans un fantasme sur l'Égypte. On s'est rappelé qu'il y avait un temple d'Isis sur la montagne Sainte-Geneviève. Sur les ruines de la Bastille, une statue d'Isis est érigée, aujourd'hui on trouve également une statue d'Isis au parc de Bercy.
Cagliostro va ensuite créer une maçonnerie égyptienne.
 Au XIXe s., l'inaltérable mythe d'Isis apparaît dans la littérature romantique chez Novalis, Villiers de l'Ile-Adam, Michelet, Hugo (une Isis lilith) et Nerval qui s'excuse de faire un rapprochement entre Isis et la Vierge parce que cela ne s'était pas fait encore. 
 La psychanalyse s'empare d'Isis. Freud était un sectateur d'Isis. Égyptomane, il voulait être archéologue.
L'archétype d'Isis s'est-il modifié au début du XXe s. ? Rudolf Steiner fait d'Isis la Sophia grecque, la sagesse de dieu.
On retrouve Isis jusque dans la contre-culture américaine avec Bob Dylan, dans l'afrocentrisme, dans le féminisme. On la retrouve dans la question de la nature-mère dans la dimension du care ("prendre soin de") et puis la nature "voilée". On ne peut pas impunément violer la nature sans en avoir les conséquences. On doit réparer et soigner ce grand corps malade qu'est la nature c'est ce que nous dit ce mythe. Si on ne le fait pas on risque d'être foudroyé comme dans le mythe.

(Ce texte est constitué de bouts de phrases extraits de l'émission de France Culture car je ne parviens pas à réécouter l'émisssion de Rfi sur le web)

Malheureusement sur la couverture de leur livre, les éditions Albin Michel n'ont pas pu s'empêcher de présenter une Isis à genoux.

dimanche 26 août 2012

Völva d'aujourd'hui

Nous cherchons vainement dans la culture populaire actuelle, les vieilles femmes dispensatrices de savoir qui seraient des représentations modernes de l'ancienne Völva.

Mais les vieilles femmes des contes pour enfants sont juste (d'horribles) sorcières.
  
Ursula, la sorcière des mers

 
 



La seule vieille "femme" sage que nous pouvons y rencontrer, s'avère être un arbre féminisé (dans Pocahontas).


Dessin animé Disney POCAHONTAS

Sinon, au cinéma, une femme incarne dans un film la sagesse et le savoir tels que nous pouvons nous en représenter un peu la transmission par ces prophétesses d'autrefois : il s'agit d'une jeune chamane qui ramène un mourant à la vie avec des incantations traditionnelles chamaniques. C'est excellemment rendu dans le film dont voici la bande-annnonce qui ne restitue pas vraiment l'ambiance très dépaysant du propos. Le titre original du long-métrage est "Cuckoo" mais il est plus connu sous le nom de "Kukuschka"(le coucou). Bien entendu, la femme n'est PAS vieille. Ce serait faire revenir dans l'imaginaire moderne, une figure qui en a été éradiquée par la violence et que l'on doit maintenir à toute force hors de notre culture actuelle.

Du moins cette jeune femme représente t-elle la sagesse de l'humanité et les deux hommes sa folie.

Je n'ai pour ma part pas rencontré d'autres figures d'anciennes sages issues de la culture populaire moderne. Si vous en connaissez d'autres, je serais ravie que vous me les présentiez !

vendredi 24 août 2012

Völva

Les anciens Germains appelaient völva les prêtresses et prophétesses. Selon la mythologie et les récits historiques, les völvas étaient censées posséder des pouvoirs tels qu'Odin lui-même, faisait appel à leurs services pour connaître l'avenir des dieux : c'est notamment ce que rapporte la Völupsá, dont le titre lui-même, « völv-s-spá », se traduit par « chant de la prophétesse ».
Jules César en fait mention dans "La Guerre des Gaules". Tacite décrit également les prophétesses des Germains dans ses Histoires, et notamment une certaine Veleda : "[...] usage ancien chez eux, les Germains attribuaient le don de prophétie aux femmes, et même, la superstition se développant, un statut divin". Dans la société scandinave ancienne, la völva était une femme âgée ayant rompu avec les pesantes attaches familiales qui étaient le lot des femmes dans cette civilisation clanique. Elle errait à travers le pays, suivie traditionnellement d'un aréopage de jeunes gens. On faisait appel à ses services dans les situations graves. Son autorité était absolue et elle était largement rémunérée pour ses services. La disparition des prophétesses germaniques est liée à la christianisation. L'Église secondée par les autorités civiles se charge d'interdire leurs activités et à les exterminer.
Dans la tradition allemande, il ne subsiste de ce passé que le personnage de Frau Holle, une sorte d'équivalent féminin du père Noël.
Une "sorcière" est une femme chamane. La Wicca qui revendique être la plus ancienne religion du monde affirme que les sorcières sont les héritières d’un culte et de pouvoirs spécifiques féminins dont l’origine remonte à la préhistoire.

D'après l’anthropologue et égyptologue britannique Margaret Murray (1863-1963) qui écrivit le chapitre sur la sorcellerie dans l’édition de 1957 de l’"Encyclopædia Britannica" : « La signification du terme sorcière (witch) est liée à celle du mot savoir (wit) ». Elle peut être renforcée par l’analyse du mot wizard (étymologiquement « celui qui sait »), qui signifie lui aussi le sorcier et qui tire son origine du bas anglais wys/wis qui veut dire « sage », à rapprocher de « wise », qui veut dire « sage », de la même racine que le mot allemand, « wissen » signifiant « savoir ».

jeudi 23 août 2012

Catherine Boyraionne, Barbe Dorée, Marie Chorropique, Jeanne Harvilliers, Alexine Drigée, Françoise Secrétain, Anthoina Tornier et les autres.

sont des sorcières autrefois brûlées.

Géographie de la "sorcellerie" dans l'ancien temps : surtout le Nord, La Lorraine, l'Est, le Languedoc et le Sud-Ouest. Selon R. Muchembled, le centre de la France était bien tenu en main par la royauté, ainsi le pouvoir devait être étendu où il ne se trouvait pas encore : dans la périphérie du royaume. Les persécutions devaient servir à faire comprendre aux populations QUI dirigeait le pays. Devant les résistances rencontrées, la procédure démonologique aidait les administrateurs à fabriquer des coupables ; en ce sens, la sorcière était devenue un bouc émissaire dont le supplice devait empêcher les adversaires du pouvoir central à persévérer dans leur indiscipline. La chasse aux sorcières a permis de cristalliser sur les sectateurs du démon la notion de déviance par rapport aux normes sociales nouvelles que l'on voulait instaurer. Les élites culturelles imposaient, par le biais des bûchers, le respect de ces normes. Les paysans se savaient coupables de pratiquer parfois des rites de guérison et de protection défendus, ainsi, pour ne pas être accusés de sorcellerie, ils s'efforcaient de se différencier des sorciers et une atmosphère d'inquiétude permanente pesait sur les villages.

Les persécutions concernaient surtout les femmes : 82% des accusés dans le Nord. En tant que filles d'Eve, elles représentaient celles à cause de qui la mort était entrée au monde. Les élites de l'époque craignaient les femmes et notamment leur activité sexuelle supposée ; de ce fait les procès de sorcellerie avaient une dimension sexuelle très importante, les juges tentaient toujours de faire avouer aux suspects la copulation satanique dans ses moindres détails : le " sexe du démon était froid et faisait froid à l'intérieur".
Sur 155 cas étudiés, 105 se sont avérés être des femmes dont 32 de plus de 50 ans alors que 7 suspectes seulement avaient moins de 20 ans, une enfant de 8 ans et 2 adolescentes de 13 ou 14 ans.
Les magistrats étaient hantés par l'idée de la sexualité, de la mort et de la décrépitude, c'est pourquoi, la sorcellerie unissait, ici, les thèmes du diable, de la vieillesse féminine et du meurtre. Or les vieilles femmes étaient les dépositaires privilégiés des croyances populaires, elles transmettaient les connaissances et recettes anciennes lors des veillées villageoises, ou directement aux enfants des deux sexes qui leur étaient confiés durant les premières années de leur vie. Les chasseurs de sorcières voulaient surtout exterminer ces vieilles femmes qui pouvaient nuire au développement du christianisme épuré. Les sorcières étaient considérées par les élites culturelles et sociales comme des reliques anachroniques d'un temps païen ainsi que des freins à la diffusion de l'orthodoxie et de la morale nouvelle, et pour finir comme des concurrentes de tous ceux qui cherchaient à modifier la culture populaire traditionnelle. Le mouvement de la chasse aux sorcières venait du "haut", et était entretenu par la théorie démonologique mais diffusé grâce à une partie des ruraux qui adhérait à la persécution.

Ceci est un extrait résumé de la thèse de Karine Mrugala portant sur le livre de Robert Muchembled "La sorcière au village XVe-XVIIIe siècle" (Gallimard/Juillard 1991).




Aujourd'hui, les vieilles femmes ne peuvent plus transmettre de connaissances anciennes dans un monde où l'industrie technoscientifique impose sans relâche de nouvelles normes de société. D'autre part, elles sont, incessamment sollicitées par les médias pour se prêter à la course à la jeunesse éternelle et sont sommées de faire l'effort de ne jamais paraître vieille ou le moins possible. Si elles se retrouvent parquées dans un asile pour vieillards, c'est qu'elles auront échoué.

Là où, dans l'Ancien Régime on eut recours à un prétendu "commerce avec Satan" pour arracher aux peuples "coupables" leurs traditions ancestrales, pour satisfaire à l'économie de marché mondialisée, le XXe siècle a pu éradiquer au moyen de la télé, du cinéma, de la pub et des médias ce qu'il restait de savoirs, de coutumes populaires et de patois régionaux de ces temps-là . 

 
Et en 2010 comme en 2012, les "nouveaux" boucs émissaires de la résistance qui durcit contre cette économie mondiale chaque jour plus catastrophique pour la planète entière, sont, quel hasard !, les tsiganes (ou Rroms) réfractaires à la sacro-sainte "intégration". Ne songez donc pas à vivre dans une roulotte en vous passant du fratas technoscientifique obligatoire sans quoi on brûlera...vos affaires. On a compris entre temps que démunir entièrement les gens était plus sournois donc plus efficace que de les tuer. 

C'est Victor Hugo qui nous salue.
Retour à la case de l'innocente Esmeralda qui n'a rien fait que d'être libre ce pourquoi elle doit finir pendue comme sorcière dans le roman "Notre-Dame de Paris".

(Quant aux Pussy Riots accusées de pousser des cris "contre nature" dans une église, elles ont bien entendu le grand tort de ne pas s'appeller les "Dick Riots", on l'avait compris).


lundi 20 août 2012

Moderata Fonte, féministe italienne de la Renaissance


Lorsque la cour de Ferrare se trouvera dominée par une grande femme du 14e siècle (pas de wikipédia en français pour cette femme), ses courtisans se mettront à écrire des apologies féminines en hommage à leur souveraine. Ainsi d'Arienti et sa Gynevera. Suivront Jacopo Foresti (plagié apparemment par Antoine Dufour), Mario Equicola et Agostino Strozzi dont les ouvrages coïncidant avec l'extension de l'imprimerie seront largement diffusés en Europe, provoquant le fameux débat sur la question de la femme (dite „querelle des femmes“ à savoir la querelle des hommes sur les femmes).
Le De plurimi claris selectisque mulieribus de Foresti, est une compilation encyclopédique qui inspirera d'autres collections biographiques comme le De Mulieribus de Mario Equicola. Texte certainement en partie dicté par le besoin de reconnaissance du courtisan par la marquise de Mantoue (Isabelle d'Este), néanmoins dans sa collection de biographies de femmes illustres, Equicola avance une théorie qui va se trouver fortement décriée : l'égalité des sexes face au pouvoir.

L'étape suivant sera franchie par Bartolomeo Goggio (Bartolomeo Goggio est seulement cité dans Stephen Kolsky, The Ghost of Boccaccio. Writings on famous women in Renaissance, Italy, Late medieval and early modern Studies, Brepols, Turnhout, 2005, ouvrage dont une certaine Susanna Longo, maîtresse de conférence d'Italien à Lyon III, fait un résumé accessible en pdf sur le web), ainsi qu'en dehors de l'Italie par Corneille Agrippa dont j'ai aussi déjà parlé à plusieurs reprises.
Bartolomeo Goggio, nous explique Kolsky (via Susanna Longo), défend la supériorité physique et morale de la femme et disculpe Eve du péché originel (remarquons que plus aucun homme ne le fait aujourd'hui, bien au contraire, ils insistent tous sur le symbole évident et inamovible du péché d'Eve (cf. Émission sur lacuriosité sur Rfi après l'atterrissage réussi du robot Curiosity sur Mars). Malheureusement l'ouvrage de Kolsky n'existe pas en français.

Corneille Agrippa, quant à lui, révise toutes les théories négatives sur les femmes : d'Aristote aux Pères de l'Église et revient lui aussi sur la Genèse et son interprétation du rôle d'Eve.

Mais si l'on connaît assez bien les ouvrages masculins qui ont donné naissance à la fameuse querelle sur l'égalité des sexes du XVIe siècle, on ignore complètement les ouvrages féminins sur la question et même les féministes du XXe siècle ne connaissent pas d'âme soeur issue de ce siècle autre que Marie de Gournay alors même qu'il y a eu Helisenne de Crenne, Nicole Estienne Liebault sans parler de ses italiennes qui ont repris le flambeau d'Equicola et Poggio comme Moderata Fonte (1555-1592), pseudonyme de Modesta Pozzo de Zorzi, fille, épouse et nièce d'avocats vénitiens, morte en accouchant de son 4e enfant, et qui écrivit le „Mérite des femmes“ publié en 1600 à titre posthume dans lequel elle interprète également à sa façon le rôle d'Eve dans la Genèse. Comme quoi, bien des gens l'ont fait au fil des siècles mais leur voix a été couverte par les conservateurs et propagateurs les plus hargneux de la même médisance millénaire sur la question d'Eve.
http://press.uchicago.edu/dms/ucp/books/jacket/0226/25/0226256782.jpeg
"Le Mérite des femmes" décrit un débat dans un endroit isolé (principe du Decameron, également adopté par Marguerite de Navarre pour son Heptameron ) entre sept femmes qui récusent et dissèquent les comportements masculins, „pervers ou cruels, envers toutes les femmes. A plusieurs reprises, elles s'émerveillent de ce bref entre-soi où elles peuvent parler de tout et de rien, sans regard qui juge ni censure.
Cette conscience donne une tonalité moderne à leurs échanges qui échappent , au mutisme soumis des femmes voire à la sidération engendrée par une critique masculine aux aguets.
Vices et tromperies des hommes, dans leurs positions de pères, frères, maris ou amants, et même fils, sont donc successivement passés au crible, Comme en négatif, ils font d'autant mieux ressortir l'excellence morale et sociale des femmes et permettent aux devisantes de proclamer la supériorité absolue du sexe féminin. Toutes les participantes ne manifestent cependant pas la même virulence ni la même conviction. Certaines ­ la plus jeune en particulier, qui n'a pas encore tâté du mariage mais se sait proche des épousailles ­ hésitent entre accommodements ou résignation et désir d'affrontement. Un magnifique cauchemar fait par l'une d'elles dans la nuit qui sépare les deux sessions est relaté au début du second livre et met au jour la tension qui clive leur sensibilité. Leurs vacillements, leurs hésitations à endosser une position arrêtée suscitent brouhahas et gentilles altercations autour des contradictions exprimées par l'une ou l'autre, et Moderata, qui révèle ici ses qualités de metteur en scène et de dialoguiste, tire parti de ces menus affrontements pour animer la dispute. Elle sait jouer du retournement des lieux communs et des arguments éculés sur la faiblesse féminine par d'amusants exemples : Ève ne fut-elle pas poussée à cueillir la pomme par appétit de connaissances alors qu'Adam la mangea par basse convoitise ? Ève encore ne naquit-elle pas de la chair d'un Adam qui, lui, avait été créé de vile boue, etc. ? Moderata sait aussi renverser les termes de l'opposition entre Nature et Raison en passant dans le registre de la métaphore. Habile dialecticienne, elle tire ainsi argument de la lourdeur de l'eau dont la mer nourrit pourtant les fleuves à leur source pour rappeler que « les hommes, qui nous sont inférieurs et devraient par conséquent s'abaisser et humilier », au contraire « s'élèvent et nous dominent contre toute raison, contre toute justice ».
(…)
La subordination et la dépossession économiques qu'elles dénoncent sont celles des femmes de leur classe, interdites d'activité commerciale ou de gestion indépendante de leur patrimoine, dépouillées de leurs biens propres, de leurs dots que s'approprient et dilapident les hommes qui leur sont proches. La cupidité gouverne le mariage. Mais, d'un point de vue plus théorique, n'est-il pas absurde, se demandent-elles à un point critique de leur discussion, que la femme achète par sa dot un « tyran » ? Est-il impensable de renverser ces échanges inégaux et leurs effets pervers, tous produits directs de l'alliance de mariage ? Proposition hardie, mais si difficile à conceptualiser qu'elle tourne court. Du moins révèle-t-elle la conscience aiguë qu'ont ces dames de leur exploitation économique, enracinée dans l'institution même du mariage.
(...) „

(source : ChristianeKlapisch-Zuber, « Moderata FONTE [Modesta Pozzo], Le Mérite des femmes, traduction, annotation et postface de Frédérique Verrier, Paris, Éditions Rue d'Ulm (collection « Versions françaises »), 2002, 267 p. », CLIO. Histoire, femmes et sociétés, 18 | 2003, 286-288.

http://www.presses.ens.fr/client/cache/produit/600_____couv%20meritesite%20_815.jpg

vendredi 17 août 2012

Méduse à Berlin

J'ai déjà parlé de Méduse dans un autre billet, probablement une ancienne souveraine légendarisée (fictivisée). D'après Pausanias, c'est une reine qui, après la mort de son père, a repris elle-même le sceptre, gouvernant ses sujets, près du lac Tritonide, en Libye. Elle aurait été tuée pendant la nuit au cours d'une campagne contre Persée, un prince péloponnésien. Méduse, Μέδουσα / Médousa, vient de μέδω / médô qui veut dire « commander, régner ».
Je n'avais jamais remarqué combien de têtes de Méduse sont visibles dans le paysage berlinois. Petit inventaire succinct : http://www.alexanderkutsche.de/foto/Erlebnis/16Berlin/8509-3669.jpg Sur le fronton du Theater des Westens (Charlottenbourg): Persée avec la tête de la Méduse (la victoire de la mâlitude sur la féminitude ?).

La fontaine d'Henriettenplatz à Halensee, 1987, du couple français Anne et Patrick Poirier (où la tête de la Méduse semble à demi immergée).
http://www.teltow.de/uploads/pics/2-kriegerdenkmal_433_325_90.jpg Zickenplatz (à Teltow) au pied du monument aux morts (constr. en 1913) commémorant la bataille de Großbeeren (1813). Le bouclier fait référence à la déesse Athéna, comme symbole de la lutte pour la patrie.

File:Zeughaus Berlin Schlussstein Medusa.jpg
Sur la façade du Zeughaus auj. musée historique (centre-ville), sculpture d'Andreas Schlüter (1659-1714).

Entre autres.



jeudi 16 août 2012

La Paix des Dames

La paix des Dames dite aussi paix de Cambrai, servit à mettre fin à la deuxième guerre d'Italie entre François Ier et Charles Quint.

A Paris, le 16 décembre 1527, un lit de justice refuse de reconnaître le traité de Madrid, accepté par François 1er pour sa libération après la défaite de Pavie.Charles Quint a pris les deux enfants du roi de France en otage mais malgré la signature du traité il refuse de les libérer n'ayant pas confiance en leur père, François 1er.
L'affrontement des Valois et des Habsbourg pour la prépondérance en Europe manque gravement d'arbitre. Chacun recherche des alliés parmi les forces en présence: les principautés italiennes, Venise, le pape, Henri VIII d'Angleterre, les Turcs. Mais ces alliés ne peuvent que se ranger derrière les forces en présence et promettre de s'engager dans la bataille en cas de guerre.  Or le peuple en a assez des guerres.


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Les «Dames», Louise de Savoie et Marguerite d'Autriche, prennent alors l'initiative. Louise de Savoie veut faire libérer ses petits-enfants détenus en otages à Madrid car la situation n'est plus tenable pour eux. Charles Quint les a fait enfermer dans des tours sans lumière où ils couchent sur de simples paillasses ; Marguerite d'Autriche veut obtenir de François 1er qui a renié sa signature à propos de la Bourgogne qu'il respecte un nouveau traité. Les négociations sont difficiles; on parvient pourtant à un accord le 5 août 1529. Les clauses de Madrid sont reprises, sauf pour la Bourgogne et les villes de la Somme, que François 1er conserve ; en échange, le roi de France abandonne toutes prétentions sur la Flandre et l'Artois ; il donne à Marguerite et à l'empereur, leur vie durant, le comté de Charolais ; il abandonne l'Italie à Charles Quint.
Les stipulations financières sont lourdes : 2 millions d'écus, dont 1,2 million payables au moment de la libération des enfants de France, 200000 écus au roi d'Angleterre, qui les a prêtés à l'empereur. Le mariage de François 1er avec la reine Eléonore, sœur de Charles Quint, doit consacrer la réconciliation. Mais Charles Quint se méfie encore de François 1er ; il retarde la libération des otages royaux jusqu'au règlement effectif des affaires d'Europe, sa main-mise sur l'Italie, son couronnement à Bologne par le pape, le rejet des Turcs loin de Vienne, l'élection de son frère Ferdinand comme roi des Romains, la décision du pape de convoquer un concile universel. Le 1er juillet 1531, l'échange est enfin effectué: les enfants de France et la reine Eléonore franchissent la Bidassoa.
La paix est signée à Cambrai le 5 août 1529 en l'hôtel Saint-Pol (appartenant à Marie de Luxembourg).

(Ill. à g., Marguerite d'Autriche, à d., Louise de Savoie).

Louise de Savoie (mère de François Ier) et Marguerite d’Autriche (tante de Charles Quint) en présence de Marie de Luxembourg et du cardinal Louis de Bourbon Vendôme signeront l'acte de paix. On se félicita d'avoir confier aux "dames" la tâche de rétablir la paix. En dernier ressort on fait appel aux femmes. Mais toujours en dernier ressort.

samedi 11 août 2012

Combattantes pour la paix

Un livre est paru en 2010 sur deux grandes figures féminines du XVIe siècle dont j'ai parlé sur ce blog : Renée de France (connue aussi sous le nom de Renée de Ferrare) et Anne de Guise (connue aussi sous le nom d'Anne d'Este). Il s'agit de la fille et de la petite-fille d'Anne de Bretagne. (L'arrière-petite-fille de cette reine est Catherine de Montpensier). Avec comme sous titre : Mère et fille entre la loi et la foi au XVIe siècle.
Renée de France et  Anne de Guise 
Présentation du livre :
"Au siècle des guerres de religion, une mère et sa fille vont œoeuvrer pour la paix.Renée de France (1510-1575), fille d'Anne de Bretagne et Louis XII, est élevée dans l'humanisme et adopte les idées de la Réforme. A Ferrare, mariée au duc Hercule d'Este, elle n'hésitera pas à aider les réfugiés huguenots. De sa rencontre avec Jean Calvin, en 1536, naîtra une correspondance suivie entre elle et le Réformateur à Genève. A la mort de son mari, elle s'installe à Montargis et n'aura de cesse de réclamer la paix et sauver catholiques et protestants, pendant les guerres de religion. Anne d'Este (1531-1607), sa fille née à Ferrare, est mariée à François, duc de Guise. Après son assassinat en 1563, elle se remarie avec Jacques de Nemours, duc de Savoie. Catholique, fidèle aux Guise et à la cour de Charles IX, puis d'Henri III, elle reste attachée à sa mère et la suivra dans son combat pour la paix. Malgré les oppositions et les drames, dont l'assassinat à Blois de son fils Henri, duc de Guise. Anne, ralliée à Henri IV, jouera un rôle important dans la fin de la Ligue. Comptant sur son art de la diplomatie, le roi huguenot qui a abjuré lui offrira honneurs et préséances et la considérera à la cour comme la reine mère jusqu'à sa mort.Comme dans un roman ou dans un film on voit Renée de France la mère humaniste et Anne de Guise sa fille catholique, vivre ensemble à leurs risques, les épisodes des guerres de religion. Dans une profonde affection et une belle complicité, mère et fille aideront à sauver les victimes des deux partis et des Églises catholique et protestante, choisissant toujours leur liberté de conscience plutôt que la loi des hommes et des guerres".

Mme-Vray.jpg
Ce roman est de Mme Nicole Vray, docteur ès lettres, hébraïsante, membre de l'Académie des Sciences, Arts et Lettres de Caen, autrice de nombreux ouvrages d'histoire ainsi que de biographies.

Je n'ai pas encore lu l'ouvrage mais c'est dans mes projets. 

Un autre livre sur une mère et une fille du XVIe siècle : les poétesses Madeleine et Catherine des Roches (malheureusement en anglais). 
J'ai déjà publié deux poèmes de la fille. Le second est ici.

Les poèmes de la mère, Madeleine des Roches que l'on trouve sur internet sont tous très déprimants car elle y déplore la mort  de son mari qu'elle a du beaucoup aimé. Or elle a certainement écrit des textes qui ne parle pas de la mort de son mari puisqu'il est dit d'elle par endroit ceci : Madeleine Neveu, dite Madeleine Des Roches, née en 1520 et morte en novembre 1587 est une écrivaine féministe de la Renaissance !

mercredi 8 août 2012

Margot la Hennuyère, ancêtre des tenniswomen

En ces périodes de J.O. signalons que contrairement aux idées reçues, il y a toujours eu et il y aura toujours des sportives et cela malgré tous les obstacles dressés périodiquement par la mâlitude.

On a même retenue le nom d'une tenniswoman du XVe siècle : Margot la Hennuyère.

Cette Justine Henin du moyen âge tardif, née vers 1397, fut une fabuleuse joueuse de Jeu de paume si l'on en croit le "Journal d'un bourgeois de Paris"(de 1405 à 1449) qui nous relate ainsi ses exploits :

"En cette année 1427, vint à Paris une femme nommée Margot, assez jeune, comme de 28 à 30 ans, qui était du pays de Hainaut, laquelle jouait le mieux à la paume qu'oncques homme eût vu, et avec ce jouait devant main derrière main très puissamment, très malicieusement, très habilement, comme pouvait faire un homme, et peu venait d'hommes à qui elle ne gagnât, si ce n'était les plus puissants joueurs."

(paragraphe 472 du , rééd. 1990, Paris, Le livre de poche)


 
En plus, elle jouait contre des hommes.

samedi 4 août 2012

Les amazones dans la littérature orientale

D'après le poète Nizami dans l'Iskandar-Namêh (le "Livre d'Alexandre" (le Grand)) Nushaba était une amazone et la reine de Barda ou de Berda en Azerbaidjan ("Terra Barda" est d'ailleurs un livre qui traite des premières civilisations indo-européennes)).

Cette reine Nushaba se serait aussi appelée Kaïdafa ou Qaydafa....

En cherchant sur internet, je trouve des bouts de phrase comme :


"Les Orientaux disent encore qu'Alexandre vainquit une reine nommée Kaïdafa, fille de Maisons (Marsyas) et de race grecque, qui gouvernait..."

"Cette ville fut détruite par le conquérant et Kaïdafa se réfugia dans les montagnes Berda, que ces auteurs placent tantôt dans la mer Rouge, tantôt dans la..."

(quand je clique sur les liens, je n'arrive pas à avoir la suite d'où les fragments).  

ou encore :



"Dans le Shah-namêh de  Firdawsi (où Qaydafa reconnaît Alexandre grâce à son portrait), où dans le Sjaraf-namêh ou c'est à Nushâba de reconnaître Alexandre de cette manière)..." (extrait des "fonctions de l'image dans la société islamique du moyen-âge" par Marianne Barrucand en pdf)



http://media-cache0.pinterest.com/upload/213358101067095206_Rgb9feYj_b.jpg sur cette miniature turque on peut voir Alexandre le Grand (nommé Iskandar par les arabes, les ottomans et les perses) rencontrer une tribu d'amazones...


Sur cette miniature persane la reine Nushaba reconnaît Iksandar (Alexandre le Grand) grâce à son portrait.

Dans cette vieille encyclopédie, on lit ceci : The Byzantine castle on Mt Pagus has for years been abandoned and left to decay ; the old mosque and the great cistern both presumably of Byzantine origin, are in ruins, and the historical foundation inscription of John Vatatzes, as well as the ancient colossal head at the so-called Amazon, wich was formerly built into the wall over the entrance gate of the castle and formed the badge of the town, have in recent times been ruthlessly destroy. The Turks considered the head to be that of Kaidafa, queen of Saba and therefore called the castle Kaidafa Kale'si, wich in the popular language has been corrupted into Kadifa Kal'esi (Velvet castle)

Par contre je ne suis pas sûre qu'il s'agisse de la bien connue reine de Saba car celle-ci vivait en Ethiopie. Cela dit, l'Éthiopie est bien au bord de la mer Rouge. Néanmoins pourquoi ne pourrait-il pas y avoir plusieurs reines ayant vécu autour de ces trois mers, la Rouge, la Noire et la Caspienne ? D'autant que nous connaissons déjà Tomyris, reine des Massagètes (vivant entre la mer d'Aral et la mer Caspienne), soi-disant légendaire (bien sûr), Lysippé, Thalestris, Penthésilée, Hippolyté, Lampado, Marpessa, ces trois dernières auraient d'ailleurs conquis une grande partie de l'Asie Mineure qui est un territoire énorme. Il faut donc se représenter une partie de la Grèce, de la Turquie et au moins toute la Syrie occupées par ces femmes. Elles auraient élevé partout des temples d'Artémis et fondé des villes comme celles de Smyrne, Ephèse, Cyrène et Myrina.  Ce n'était donc pas un épiphénomène historique mais bien un important passage de l'histoire de notre civilisation !
Et on a totalement effacé cela de l'histoire de l'Antiquité ! C'est à peine croyable !
Nushaba meeting Alexander (illustration trouvée sur ce blog)
Concernant toutes ces reines, comme nous avons droit à une seule Madeleine qui se trouve être en réalité la réunion d'au moins trois femmes, nous avons sans doute, avec la reine de Saba, la réunion de plusieurs reines toutes désignées aujourd'hui du nom de reine de Saba, sans autre p(m)atronyme particulier pour ne pas faire un choix entre toutes celles qu'elle représente.
Faire de plusieurs femmes une seule personne est une technique efficace de fictivisation comme celle de mettre la tête d'une femme à la place d'une autre sans lien aucun avec celle-ci.

D'ailleurs à propos de fictivisation, nous apprenons dans le Canard Enchaîné de cette semaine la parution d'un livre "Résistances" de Corinna von List qui parle des résistantes (et non des résistants). En effet, on ne connaît guère de nom de résistantes francaises de la 2e G.M. comme Hélène Vernay, Berty Albrecht, Geneviève de Gaulle, Andrée de Jongh et toutes ces héroines d'un courage époustouflant dont seules la moitié ont survécu. On apprend par le journal satirique bien connu que la reconnaissance par la patrie envers elles s'est résumée à leur attribuer des grades déclarés "fictifs". Marguerite Petitjean, Croix de Guerre et Légion d'honneur, n'eut ainsi droit qu'au rang de "lieutenant fictif".
Le Canard Enchaîné de conclure : "des Francaises libres fictives ?".

La fictivisation des femmes est sans cesse à l'oeuvre, je vous dis !

jeudi 2 août 2012

Des réalisatrices, des chevaux et deux hommes....

Pour rappeler qu'il y a bien des réalisatrices comme Lisa Ohlin et son film "Simon" (2011) non vu au festival de Cannes mais prix Mont-blanc du scénario à Hambourg et prix du public à Göteborg (Suède), comme Isabel Kleefeld qui tourne actuellement un thriller à Cologne, comme Ulrike Grote dont le dernier film "Die Kirche bleibt im Dorf" (L'église reste au village) n'a pas été visible au festival de Cannes et qui prépare actuellement son nouveau film "The Lying Dutchman", comme Ursula Meier qui vient d'être sélectionnée pour le 69e festival de Venise avec son film "L'enfant d'en haut", et encore bien d'autres,  ajoutons Cindy Meehl qui a réalisé le film que j'ai visionné il y a deux jours, intitulé "Buck", un film sur Buck Brannaman l'homme qui murmurait à l'oreille des chevaux et qui murmure toujours, d'ailleurs. On apprend dans le film de cette femme de 52 ans qui vient de réaliser son tout premier long métrage (comme quoi on peut commencer à tout âge) que Buck Brannaman a été épouvantablement maltraité dans son enfance et à ce qu'il dit lui-même, cela l'aurait conduit à développer une sensibilité particulière envers les chevaux car il sait ce que veut dire vivre dans une peur permanente.
Aujourd'hui Buck ne s'occupe pas de gens qui ont des problèmes avec leurs chevaux, dit-il, mais de chevaux qui ont des problèmes avec leurs gens. Pour lui, le comportement du cavalier ou de la cavalière avec son cheval est révélateur de sa psyché.
Pour celleux qui ne l'ont pas encore vu, je le recommande fortement. Comme lui, je pense que notre relation au monde animal c'est nous-même. Il est remarquable de voir que ce sont souvent des femmes qui s'emparent de ce genre de sujet pour en faire un livre ou un film. Malheureusement la bande annonce est en anglais.


D'autre part, un livre vient de sortir sur Patrick Dewaere. Encore un homme maltraité dans son enfance mais qui, lui, n'a pas pu surmonter ses traumatismes. On apprend que les violences qu'il a subies furent aussi de nature sexuelle, un autre calibre que le fouet subi par Buck Brannaman.

Patrick Dewaere m'a séduite toute petite dans la série télévisée "Jean de la Tour Miracle" (peut-être lui dois-je mon engouement pour le 16e siècle ? Mais pourquoi diable doit-on représenter un XVIe siècle avec des hommes sans couvre-chef ?) J'ai été très choquée par son suicide. Il y a 30 ans...