lundi 28 mars 2011

La monstresse de Lavinia


Ou l'animal humain ?

On trouve des créatures bien étranges dans la peinture de Lavinia Fontana, comme ce portrait d'Antonietta Gonsalvus. Mais ce visage n'est pas malformé congénitalement par des émanations radioactives comme l'Enfant-Jésus du tableau de Raphael détourné, présenté précédemment.

D'ailleurs l'impression d'étrangeté s'atténue quand on lit le papier tenu par le modèle.
Il y est écrit :

" Des îles Canaries fut apporté
Au seigneur Henri II de France
Don Pietro, l'homme sauvage.
De là, il s'installa à la cour
Du duc de Parme, ainsi que moi,
Antonietta, et maintenant je suis
Dans la maison de la signora donna
Isabella Pallavicina, marquise de Soragna."


Est-ce la femme sauvage ? Les hommes sauvages avaient-ils le visage couvert de poils ? Toujours est-il qu'il existe d'autres portraits de cette famille aux visages velus : l'un de Hoefnagel et l'autre de Van Ravensteyn. Tous peints aux alentours de 1582.
Mais de "sauvage" ils ne paraissent rien présenter d'autre que cette hypertrychose.

Antonietta est emmenée à Bologne devant le naturaliste Ulysse Aldrovandi qui prend des notes pour son livre, Histoire des monstres. Il veut obtenir un portrait de la jeune fille. Il est possible que le tableau est été réalisé à cette occasion. Lavinia Fontana étant une portraitiste de cour qui représentait des femmes et des enfants accompagnés d’animaux, on dirait presque que ce tableau est une synthèse entre une représentation animale et un portrait de cour !

Il semblerait qu'une véritable passion se soit développée à l'époque chez les princes et que tous aient voulu un portrait, une gravure de ce phénomène, à installer dans leurs cabinets de curiosités. La peur et la fascination se mêlaient en eux à la vue d'une telle anomalie et pourtant il ne s'agit que de quelques poils...

5 commentaires:

  1. Esthétiquement, culturellement, aucune comparaison avec les "femmes à barbe" exhibées dans les flonflons des foires...

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  2. on sent que ce portrait n'est ni méprisant, ni effrayant... parviendrait-on à faire passer ce même message de nos jours ?

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  3. Il y a même beaucoup de douceur dans ce visage et ce tableau "sonne juste" . Un être humain , une âme se cache derrière cette pilosité ,et nous rappelle que les hommes ( et les femmes bien sûr) ne sont que des animaux un peu particuliers .

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  4. Moi je dirais que c'est un cas d'hirsutisme, un être humain avec beaucoup de poils. Ca arrive de temps en temps. Mais indiscutablement, c'est un être humain et le portrait est beau.

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  5. A JEA : en effet, celle-ci possède un maintien et porte des vêtements appartenant à la noblesse.

    A lucia mel : bonne question. La réponse est "non", je pense. Aujourd'hui avec le diktat de l'épilation, on est déjà une "monstresse" avec trois poils sur la jambe!

    A coup de grisou : tout à fait. Des animaux qui ne veulent pas en être...

    Hypathie : on dirait une chatte humaine, je trouve.
    Et puis on ne peut s'empêcher de penser à "la Belle et la Bête". Antonietta est comme une synthèse des deux.

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