pour que tout le monde finisse par en être persuadé. »
Joseph GOEBBELS
Chéreau dit s'être inspiré des classiques du film en costumes, des thrillers de gangsters de Coppola et de Scorsese, de la grande peinture de la Renaissance et du XIXe siècle romantique aussi bien que des photographies d’actualité les plus sordides pour obtenir La reine Margot.
La rencontre du film et de son public a été longuement préparée. Bénéficiant d’une couverture médiatique exceptionnelle, conçue selon des stratégies publicitaires étudiées, le film s’offre le Festival de Cannes pour écrin de sortie le 13 mai 1994 ; il est en même temps projeté dans toute la France. L’œuvre tant attendue obtient le Prix du jury et le Prix d’interprétation féminine pour Virna Lisi, mais ne rencontre pas le succès populaire escompté. Le public condamne la longueur du film (2 h 39), sa confusion et sa violence baroque faite de mort et de sang.Ce spectacle en forme de grand' messe mais dénué d’émotion, est pourtant dopé par la sortie cannoise et draine un grand nombre de spectateurs dès les premières semaines, pour aboutir à un total d’environ deux millions pendant la période d’exclusivité.
Mais La Reine Margot a surtout été pensé comme un produit à exporter à l’étranger.
La Reine Margot, film prétendument non-historique s’inscrit en fait dans un contexte de résurgence d’une réflexion sur l’Histoire au cinéma, présente dans les "Heritage films". Le concept, mis en évidence par les Anglo-Saxons, s’applique à des films contemporains populaires, réunissant un budget important, un casting de stars, une reconstitution soignée au service d’une mise en scène du passé renouvelée.
Or La Reine Margot ne remplit pas certaines conditions ontologiques du genre, notamment en ce qui concerne les moyens de la représentation : ainsi les décors sont absents, et les costumes malmenés (sans parler de l'histoire).Ce n'est pas pour autant que le film est retiré de la circulation...il ne faut pas rêver.
"Séduire pour mieux réduire" ou le concept de "propagande glauque".
Le changement de notre civilisation depuis 1990 :
Jusqu’en 1968 nous étions dans l’ère de la CONSOMMATION
de 1968 à 1990 nous étions dans l’ère de l’INFORMATION
depuis 1990 nous sommes dans l’ère de la PROPAGANDE GLAUQUE dont le cinéma se fait largement l'allié.
On inonde le monde de produits culturels émotionnellement toxiques qui perturbent et brouillent les repères. Les films d'histoire-fiction participent de cela.
On peut télécharger à tout instant et l'on trouve partout en DVD aujourd'hui dans les souks, supermarché, stations service, drogueries, librairies de surface, papeteries, maisons de la presse, vidéothèques, etc de Singapour à Saint-Pétersbourg, de Fèz à Buenos Aires, de Sydney à Calais, d'Accra à Hiroshima, etc..."Queen Margot" que tout le monde connaît et que les adolescents qui n'étaient pas encore en âge de le regarder à l'époque regardent maintenant pour la première fois avant que leurs cadets ne le fassent à leur tour. Pourquoi pas ? L'image de présentation est très racoleuse et personne ne cherche à savoir si le réalisateur se veut historien ou "libre créateur" ! Et il n'y a aucun avertissement nulle part quant au contenu non-historique de l'oeuvre. Les consommateurs/trices pensent que ce film qui, dans les autres langues, s'appelle la plupart du temps "La nuit de la Saint-Barthélémy" retrace une période historique pas tout à fait fidèlement mais quand même à peu près. Beaucoup de gens croient à une éthique quelque part.
Quand un.e allemand.e me demande :
- Qu'y a t-il d'exact dans ce film ?
Je réponds :
- Les noms. Les noms sont exacts.
- Et...c'est tout ?
- Oui.
- Mais il y a bien eu une nuit de la Saint-Barthélémy en France, non ?
- En effet mais...elle n'a pas de rapport avec ce film.
- Ah? Est-ce possible ? Mais ces reines hystériques ? Ce roi fou ? Les empoisonnements ? L'inceste ? Tout ça ?
- Il faut savoir qu'en France respecter l'histoire n'est pas une obligation. L'arbitraire règne. C'est très dépendant du sujet. Il n'y a aucun souci d'éthique dans ce domaine.
- Je n'arrive pas à le croire !
- Ben si.
Je vous prends à témoin du désagrément qu'il y a à devoir dénigrer son propre pays à cause de personnages comme Patrice Chéreau. Car unanimement ce film choque. Et c'est bien ce qui importait au réalisateur.
On a accusé en son temps Alexandre Dumas d'avoir violé l'Histoire. Or Chéreau a fait mieux : il a violé Alexandre Dumas.
je t'avais posté un com' sous le précédent billet et il a disparu... je te mets juste le lien sur l'interview de Chéreau dans Télérama que je te mentionnais (c'est peut-être pour ça que ça a été spammé : parce qu'il y a un lien). Il y parle de la Reine Margot, de son projet de film sur Napoléon auquel il a renoncé, de son homosexualité (et du film "L'homme blessé" de 1983), de ses parents, peintres...
RépondreSupprimerA lucia mel : ouah merci ! Comment tu fais pour mettre un lien dans les coms ? Je ne sais même pas comment on fait, moi ! Ah mais cela ne m'étonne pas le coup de Napoléon ! Original, ahlala ! Tu sais qu'on se moque de nous à l'étranger à propos de notre culte de Napoléon ? Bon moi je le trouve très "möchtegern", le Chéreau (culte des corps, culte de Napoléon, que des cultes bateaux) parents peintres ou pas parents peintres. Tiens j'aime bien cette fausse interview railleuse sur le personnage :http://www.bakchich.info/Persecution-trop-Chereau,09578.html
RépondreSupprimer@ Euterpe : pour insérer un lien bien propre sans adresse à la mormoil qui ne se clique pas (merci Blogger, et effectivement, avec le lien le commentaire va peut être directement dans ta boîte SPAMS dans les commentaires !) voici le lien qui donne le code HTML à utiliser et la procédure à suivre :
RépondreSupprimerhttp://blogger-au-bout-du-doigt.blogspot.com/2007/07/inserer-un-lien-dans-un-commentaire.html
Je préfère le mettre comme cela pour éviter les inconvénients de la dernière fois où mon commentaire n'est pas passé.
Patrick Chéreau est un artiste extrêmement torturé, il n'y a qu'à voir ses films. Mais il faut lui reconnaître une qualité tout de même : il ne nous embête pas avec un film tous les ans, lui ! Il doit en sortir un tous les 5 ou 6 ans voire 7 ou 8 seulement.
Tu parles d'une ère de la propagande et je suis d'accord avec toi.
RépondreSupprimerCeci dit, je pense que le phénomène de culture de masse n'est pas étranger à l'affaire. Car, même si elle a permis une démocratisation salutaire, elle a quand même fait de la culture un bien essentiellement consommable qui s'inscrit dans un marché et obéit donc aux attentes du client: le DIVERTISSEMENT et rien d'autre. Ce dernier, dans le cas de La Reine Margot a trouvé sa pleine mesure au détriment de la vraie culture, celle qui permet, à l'aide de connaissances validées, de comprendre le monde. Sans faire ma Roland Barthes de base, il m'arrive de regretter la rigueur et l'honnêteté intellectuelle d'une culture élitiste. Il va bien falloir trouver une issue à ce dilemme: la culture pour toutes et tous, oui mais pas sur l'autel de la qualité.
bon comme ça spamme à chaque fois (la 3e que j'essaie de te poster le commentaire) je te mets le commentaire en deux ou trois fois :
RépondreSupprimer*******************************************
voilà comment je mets un lien hyper-texte (je te renvoie sur le site, regarde à 'liens externes") :
http://starshoot.chez.com/html/liens.htm
exemple pour le site que tu m'indiques : ce sera ça "http://www.bakchich.info/Persecution-trop-Chereau,09578.html" qui sera l'"adressedusiteàcopier" entre "".
RépondreSupprimerton article sur Chéreau
RépondreSupprimerCQFD : ton filtre à spams est très actif, il ne laisse passer qu'un seul lien hypertexte par commentaire.
RépondreSupprimerA Hypathie : merci pour le mode d'emploi super ! "Artiste torturé" est devenu un pléonasme. Mais Van Gogh, vraiment torturé en ce qui le concerne, n'avait aucune notoriété et ne brassait pas de dollars. Donc comme à l'époque de Van Gogh, parmi les artistes "reconnus" aujourd'hui, il est bien évident que plus de la moitié sont des "fakes".
RépondreSupprimerJe ne vais pas développer le sujet dans ce com' car il pourrait faire carrément l'objet d'un blog. Mais quand l'art sert la cause des dominants ce n'est plus de l'art, c'est de la propagande (voir la citation de Goebbels) et fabriquer des images ne signifie pas "art". Celà dit il y a des propagandistes géniaux qui restent des modèles parce qu'ils ont introduit quelque chose de PLUS malgré leurs prises de position glauques (je pense notamment à Leni Riefenstahl) mais ils sont rares.
Voici un lien où apparaissent les sponsors de Chéreau http://anodafrancanobrasil.cultura.gov.br/fr/2009/08/31/patrice-chereau-encena-dois-espetaculos-a-porto-alegre-no-ano-da-franca-no-brasil/htlm (lire les noms du comité des mécènes francais).
Éclairant, je trouve, quant à sa fonction d'"artiste" dans un monde dominé par une certaine idéologie (nucléaire, bagnole, équipement militaire, béton, etc..) veillant à ne pas être remise en cause...
A lucia mel : oups tu as publié des coms entre temps et en effet je n'ai pas bien compris le système, dams ma réponse à Hypathie, mon lien n'est pas cliquable ! Je re-essaierai ultèrieurement. A +
RépondreSupprimerNouvel essai :
RépondreSupprimerhttp://wwww.anodafrancanobrasil.cultura.gov.br/fr/2009/08/31/patrice-chereau-encena-dois-espetaculos-a-porto-alegre-no-ano-da-franca-no-brasil/htlm
A Hypathie et lucia mel : Bon j'ai rien compris ça ne marche pas.
RépondreSupprimerJe voulais aussi répondre au com d'Héloise : tout à fait d'accord, maintenant l'élite se donne pour mission de produire du divertissement comme autrefois les bateleurs. Néanmoins il y a divertissement et divertissement. Il y a une forme de divertissement capable d'élever l'esprit et une sorte de divertissement qui ne se distingue pas trop du "pervertissement".
D'autre part la propagande a comme support le spectacle divertissant et plus il est conçu pour le plus grand nombre (donc bénéficie d'un soutien financier important) plus on peut le suspecter d'être une oeuvre de propagande. C'est le cas de tous les blockbusters.
J'ai des doutes sur l'insertion de liens hypertexte dans les commentaires de Blogger ! Ca marche mal, au contraire de d'autres sites de blogging. Ne te mets pas martel en tête.
RépondreSupprimerBonjour Euterpe. Oui, concilier vérité historique et spectacle semble être partout une tâche ardue...comme Héloïse je le regrette: certains faits historiquement prouvés, même si on brode un peu autour, devraient être respectés...pour que l'on respecte celui/celle qui prend un personnage/une époque historique pour sujet.(ici je pense aux nombreuses "fictions"soit- disant historiques sur la guerre civile)
RépondreSupprimerBonne semaine à toi.
Merci Colo. Semaine malheureusement froide (-10°!) et douloureuse (inflammation à l'épaule).
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