jeudi 2 décembre 2010

Marguerite l'Enragée 2



Tout d'abord je voudrais attirer l'attention sur le blog de Tania qui a retrouvé en déménageant une revue intitulée "Sorcière", et qui me "linke" pour la 2e fois (voir billet Textes et prétextes" du 11.11.) Backlinks qui n'apparaissent malheureusement pas dans mon indicateur (voir en bas à droite) fraîchement et génialement installé par lolobobo (que je m'empresse de placer dans mon blogroll étant désormais fan) pour des raisons obscures difficiles à clarifier mais tant pis.

Merci beaucoup à tous deux !

Maintenant voilà mon sujet inspiré par les remarques de Floréal sur le billet précédent :
En Bourgogne, des récits racontés de bouche à oreille, ayant trait à une certaine Vivre" ou "Vouivre" ont fait l'objet de nombreux recherches historiques régionales. On trouve plusieurs vouivres dans ce pays :
La Vouivre du Mont Saint-Jean (Côte d'0r), la Vouivre de Culles (les Roches - Saône et Loire), la Vivre de Gemeaux (Côte d'0r), la Vivre de Lournand (vers Cluny - Saône et Loire) et enfin... la Vivre de Couches (Saône-et-Loire) : "une bête apocalyptique, ayant des caractères de serpent" et qui dévorerait les enfants.

Entre Châlon et Autun, Couches passe pour avoir été fondé par des voyageurs grecs qui l'auraient baptisé "Colchas'' en souvenir de la Colchide où Jason conquit la Toison d'or. Le duc de Bourgogne, Philippe le Bon, y fonda au XVe s. le fameux ordre de la Toison d'Or.
Mais bien avant cela, à l'ère secondaire, le pays couchois est recouvert par les eaux. Seuls les plateaux émergent de ce milieu aqueux. Dans les marnes peu à peu s'enlisent les animaux marins. On y trouve en quantité impressionnante des fossiles d'ammonites, d'huîtres, de bélemnites, etc. De nombreux reptiles, certains d'une taille impressionnante, ont laissées ici et là leurs empreintes et leur carcasse sur les terrains calcaires.
On peut s'interroger sur la réaction de nos ancêtres, qui, il y a quelques siècles, mettaient à jour, par hasard, les restes d'animaux inconnus sans que la science y apporte d'explications.

Fille du duc Robert II et petite-fille de Saint-Louis par sa mère, Marguerite de Bourgogne épouse en 1305 Louis le Hutin, roi de Navarre.
La jeune reine est infidèle. Bientôt le scandale éclate et la reine est emprisonnée à la forteresse de Château-Gaillard. Lorsque Louis le Hutin succède à son père, il veut faire annuler son mariage par le pape. Mais ce dernier s'éteint en l'année 1315.
Voulant coûte que coûte en finir avec sa femme adultère : il la fait assassiner dans sa cellule et épouse Clémence de Hongrie.

Telle est la thèse retenue par l'Histoire.

Mais les Couchois eux, ont retenu une version moins cruelle. Si pour certaines commodités la reine ne devait plus exister, rien n'empêchait qu'elle fût éloignée, qu'elle retrouvât sa propre famille et vécût prisonnière "libre" au Château de Couches. Elle y serait morte auprès de sa cousine Marie de Beaufremont en l'année 1333 à l'âge de 43 ans.

Les Couchois, imprégnés de religion mais aussi de paganisme, mêlent l'histoire du martyre de sainte Marguerite avec les légendes de dragon mythologique et de vouivre favorisées par la présence dans leur pays d'étranges fossiles.

La reine défunte revit donc dans l'histoire de Sainte-Marguerite, chassée par son père après sa conversion au christianisme, arrêtée comme chrétienne, après avoir repousser les offres du préfet Olybrius, soumise à de cruels supplices, elle voit dans sa prison un démon sous la forme d'un dragon terrible mais elle le met en fuite en faisant le signe de la croix.

Ainsi peut-on concevoir que la Vivre, qui vécut, selon certains conteurs vers l'an 1300, soit l'incarnation des malheurs de cette Couchoise regrettée.

Un siècle après la mort de Marguerite de Bourgogne, Claude de Montaigu, seigneur de Couches, fait édifier la chapelle actuelle du château.

(Texte d'après ce site)



D'accord. Mais alors pourquoi Brueghel représente t-il Marguerite l'Enragée sous la forme d'une vieille femme cuirassée et armée d'une épée, une cassette sous le bras et un panier de victuailles à la main au milieu d'un paysage apocalyptique ? (A lire le texte de François Jeannet, il semble qu'il y ait encore une Marguerite là-derrière !).



7 commentaires:

  1. Encore des questions passionnantes (mais ne le sont elles pas toutes bien plus que les réponses ?).

    Ça donnerait envie d'avoir plus de temps pour fouiner les fonds documentaires.

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  2. Génial ce tableau de Brueghel que je ne connaissais pas: Margot la folle.
    Il croise le thème récurrent de la "folie" dans la littérature du XVIème siècle, avec cette éternelle question: "qui sont les fous, qui sont les sages?" que pose aussi Rabelais dans son oeuvre, ainsi qu'Erasme dans son Eloge de la folie en attaquant le clergé, la religion pour ses mystifications et cruautés, son aspect manipulatoire...
    Bref, l'Eloge de la folie est un texte génial, bien avant Voltaire, Diderot et les autres, qui est à relire absolument!

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  3. A Wakajawaka : étonnant quand même qu'il soit si difficile de connaître le sens d'un tableau dont le thème est repris par au moins trois grands peintres flamands, je trouve !

    A Bettina : quand je suis tombée pour la première fois sur le titre "Dulle Griet" j'ai cherché son équivalent en allemand : "Tolle Grete", et "toll", = "dément", est un mot utilisé dans le sens de "extraordinaire". Du coup j'ai traduit "L'extraordinaire Marguerite" (puisqu'elle tenait en respect une bande de créatures monstrueuses) jusqu'à ce que je comprenne que "dément" était à prendre dans son sens premier.
    Dans ces tableaux, en effet, la folie, si c'est ce que l'héroine incarne, paraît être la seule représentation d'allure humaine !

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  4. elle emmène de quoi survivre, dirait-on. De quoi manger, et ce qu'elle peut avoir de plus précieux, quelques souvenirs auxquels elle tient (en somme, sa vie dans sa cassette), et de quoi se défendre et lutter pour la vie (l'épée). De quoi survivre dans un monde en furie, hallucinant et dévasté. Elle semble ne craindre ni dieu ni diable, et vouloir en découdre avec ce dernier, effectivement.

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  5. A Floréal : tu as raison et c'est aussi ce que je me suis dit. Et puis est-elle folle de ne plus compter désormais que sur elle-même ? Sûrement pas !

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  6. Personnellement, j'ai visité son château, près de Couches, qui est magnifique, même s'il ne reste plus beaucoup de corps de bâtiments; J'ai rêvé souvent sur ce château, quand, petite fille, nous passions devant en voiture pour nous rendre à Autun, avec mes parents. Puis un jour, une fois adulte, je l'ai visité, comme si j'étais chez moi. Très bon souvenir, comme d'un rêve-souvenir cher enfin réalisé...

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  7. A Bettina : ben alors là, je suis épatée ! Cela me donne envie de le visiter à mon tour...il doit avoir quelque chose de magique !

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