mardi 15 mai 2018

68 en Allemagne : Sigrid Fronius brise une fenêtre avec ses talons aiguilles




  Pendant qu'en France en 2018, une responsable de l'UNEF apparaît voilée pour ne pas perturber le repos de la bite ni en bougeant sa tête immobilisée dans un carcan ni en cassant quoi que ce soit avec ses talons, son homologue de 1968 était d'une autre trempe.

 Entrée par effraction dans le rectorat de la Freie Universität (FU) de Berlin pour l'occuper avec d'autres étudiant.e.s à l'instar de ce que s'est passé à Tolbiac, au Mirail et ailleurs cette année en France, la responsable de l'AStA (comité général étudiant de l'Université Libre de Berlin, équivalent de l'UNEF) qui pour la première fois est une femme, Sigrid Fronius, est abondamment photographiée par la presse lors de l'évacuation du rectorat par la police. Fronius a brisé une fenêtre avec sa chaussure pour pouvoir actionner la poignée de l'intérieur et faire entrer tout le monde.

Fronius raconte (dans EMMA Mai/Juin 2008) qu'elle n'a pas été maltraitée par la police contrairement à d'autres protestataires. Elle a même agrippé un jour un flic par derrière en le tenant par son uniforme jusqu'à ce qu'il relâche un autre manifestant.

Sigrid Fronius entre au SDS en 1965, se porte candidate pour un siège au parlement étudiant de la FU de Berlin et en 1968 cofonde l'Université Critique.
"Actuellement les vieilles universités qui sont des tours d'ivoire se transforment en usines d'ivoire où des vieux professeurs très sots une fois sortis de leur domaine de compétence fabriquent des étudiants pareillement sots". Élue la même année directrice de l'AStA qui n'avait jamais eu alors à sa tête que des hommes, elle organise l'occupation du rectorat lequel ne veut pas attribuer de locaux à la KU (Kritische Universität).
Sa parole est écoutée lors des teach-in qui ont lieu pendant les occupations (on n'est pas à la conférence des délégués du SDS et on n'y traite pas de questions féministes). Il y est question de la guerre au Vietnam, de la manipulation du public par les médias, des anciens nazis replacés à des postes de fonctionnaires, de l'autorité sous toutes ses formes, raconte l'artiste Susanne Kleemann qui vivra en communauté avec Fronius et son futur mari (de Kleemann), entre autres.
Fronius démissionne de l'AStA six mois plus tard.
En 1975 elle participe à la création du magazine féministe Courage.
Plus tard elle s'installe en Bolivie où elle se trouve encore actuellement.

"Quand j'ai voulu partir en Bolivie on a dit elle y va à cause de Che Guevara pour faire la révolution mais ce n'est pas vrai. J'avais besoin de calme. Auparavant j'étais une révolutionnaire enthousiaste et le suis encore. Notre devise était "Démolis ce qui te démolit" mais les dominants sont les plus forts pour ce qui est de démolir".  

Comme aujourd'hui avec les universités francaises occupées, la presse la plus lue manipulait furieusement l'opinion pour criminaliser le mouvement étudiant. La cinéaste Helke Sander dira que ce sont grâce à ces teach-in qu'elle prendra réellement conscience de la manipulation dont font l'objet les simples citoyen.ne.s. Et aussi après l'attentat contre Dutschke.

Sander réalise un film en 1968 qui s'intitule "BRISEZ LE POUVOIR DES MANIPULATEURS".

Image du film de Sander projeté à la cinémathèque du Centre Pompidou en mars 2018 comme on peut le voir sur ce lien.


À ce propos, Die SDS Linke d'Aix-la-chapelle (Aachen) et les antinucléaires ont organisé une manifestation contre la remise du prix Charlemagne à Macron. Les médias manipulateurs n'en ont pas parlé. 



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