vendredi 29 avril 2011

L'histoire de la paysannerie européenne est encore à traduire

Au XVIe siècle le paysan n'était pas plus considéré comme un être vivant doté d'une sensibilité commune à l'espèce humaine que ne l'est la prostituée du XXIe siècle. Mis à part que l'on ne glosait pas cyniquement sur sa place, entre la balayeuse de rue et la conductrice de moto-crottes*, sur l'échelle de la dignité humaine. Par simple décence, on ne mesure pas le degré d'indignité que représente la condition de corps anonymes que quelques uns asservissent pour se goinfrer sur leur déchéance. (Encore moins si ces corps sont réduits à leurs seuls orifices).
Mais on se disait que le Ciel avait trié. Ceux qui naissaient paysans avaient été touchés du pied par Dieu pour servir ceux qui en avaient été touchés du doigt. D'ailleurs on ne tenait pas compte du paysan. Il était aussi inexistant qu'invisible pour ceux qui l'affamaient. Cela n'a pas beaucoup changé. On n'affame plus la population, certes, on préfère l'intoxiquer avec des produits cancérigènes, des pertubateurs endocriniens, des substances irradiées, de la viande clonée, des conserves assaisonnées au bisphénol A et autres intéressants poisons.

La classe qui ne passe pas le balai elle-même, moins ignorante qu'au XVIe siècle, a maintenant confisqué la nourriture saine.
Autres temps, moeurs semblables, mais sous une autre forme.


[Voilà longtemps que je n'avais pas inséré quelques dessins dans mes billets. Voici donc deux protagonistes de „la guerre des paysans allemands“ avec lesquels j'ai bien rigolé sur le tournage pour lequel ils ont été affublés comme cela!]




Sinon, je fais appel à un.e éditeur/trice francophone qui aurait la gentillesse de nous faire traduire (si le tarif est décent, je prends) le roman de Klemens Ludwig, écrivain et journaliste allemand (spécialiste du Tibet (!)) traitant de "LA JARDINIERE NOIRE", l'unique révolutionnairesse de toute la Renaissance ! C'est pas rien quand même ! Voilà un thème qui mérite largement une édition en langue française !

*(non, je sais, je ne l'ai pas avalé celle-là.)

jeudi 28 avril 2011

Que de la viande !!!!

A propos des Helfenstein dont Margarete Renner (voir billet précédent) voulait utiliser le suint pour graisser les armes des paysans révoltés, j'ai trouvé le menu du repas de (seconde ?) noce de la comtesse, dix-huit ans après le massacre des insurgés. Ce n'est pas exactement ce que je cherchais mais j'ai tout de même eu envie de le traduire :

Menu du mariage de la comtesse Elisabeth zu Helfenstein avec le comte Georg von Rappoltstein en 1543

(Georg Flegel : Grives et chataîgnes)

1er service
Pour chaque convive un pâté de trois perdrix

Des grives rôties à la broche, farcies aux raisins

Un brochet entrelardé

Un rôti de boeuf sauce raifort

Un pâté de poule

Un chapon farci

2e service

Une tour en pain de laquelle coule du vin dans un étang où nagent des poissons

De la carpe bouillie

Une choucroute avec de la saucisse de foie

Du pâté de chevreuil

Des têtes de cochon

Des beignets chauds au lard

Du saumon froid

Un mouton rôti à la broche (rôti en croûte) de la gorge duquel un vin rouge doux et pétillant s'écoule dans une pinte

3e service

Divers pâtés

Un ragoût de gibier en sauce

Une maison en biscuits fins

Un goret à la broche

Des crêpes

Un aigle en gâteaux secs farci de volaille en aspic

De la tarte aux pommes

De la soupe de poisson

Que de la viande !!!!

Le personnage de la comtesse de Helfenstein est uniquement rattaché à cette gravure de Matthias Mérian qui la représente en compagnie de ses deux jeunes garcons, suppliant Jäcklein Rorhbach d'épargner son mari. Or les paysans exécutèrent les nobles dont les Helfenstein (mais pas les femmes et les enfants) en les faisant passer entre deux rangées de lansquenets armés de piques, qui les embrochaient tour à tour jusqu'à ce que mort s'en suive (scène du fond de l'image).

Cette exécution associée au nom du massacre de Weinsberg sema la panique chez les seigneurs. Martin Luther prenant position en faveur de ces derniers publia un texte intitulé : "Contre les hordes meurtrières et pillardes des paysans", écrit dans lequel il réclamait les plus sévères châtiments contre eux. Et en effet on ne leur épargna aucune cruauté pour venir à bout de l'insurrection.

M'est avis que ces armées de paysans, pillards et meurtriers ou pas, n'ont jamais connu un repas de noce comme celui décrit plus haut ! D'un autre côté, cela leur a épargné de souffrir de la goutte comme c'était le cas pour les nobles, ce qui n'est guère étonnant avec un tel régime.

mardi 26 avril 2011

Margarete Renner, révolutionnaire



(Albrech Dürer : La paysanne en pleurs, 1515)


A l'heure où l'on tente vainement d'obtenir la fermeture de la centrale nucléaire de Fessenheim comme on tenta vainement il y a trente ans d'empêcher son ouverture, on peut saluer l'exemplaire solidarité des alsacien.ne.s/badois.es/suisses.ses allemand.e.s (le triangle rhénan dit "Dreyeckland") dans la lutte contre cette monstruosité technoscientiste, la plus mortifère que le capitalisme ait jamais produite.
Cette solidarité suprafrontalière n'est pas neuve. Elle a une très longue histoire, toujours la même, celle de s'unir contre les oppresseurs qui prétendent vous soumettre à des impôts, un fonctionnement et des lois iniques dont l'unique finalité est de s'engraisser à vos dépends et sans égard pour la vie même. La politique nucléaire comme instrument d'oppression ne déroge pas à la règle.
Du XVe siècle à 1525/26, les populations alémaniques de part et d'autre du Rhin se liguèrent en conjurations appelées "Bundschuh" ou "Soulier à lanières" par opposition à la botte que portaient les seigneurs. Les disettes et les épidémies favorisaient beaucoup les soulèvements chroniques, car disette ou pas, le paysan était comme on dit toujours : "taillable et corvéable à merci". Cette guerilla ne fit que s'amplifier en vingt ans et déboucha sur une insurrection féroce qui embrasa l'Empire depuis la Saxe jusqu'en Lorraine, suite au coup d'éclat de Luther et ses 95 thèses dénoncant le commerce des allégeances. En effet, en dénoncant la sélection par l'argent au sein du catholicisme, Luther, sans s'en douter, déclenchait rien moins qu'une véritable lutte des classes avant l'heure, mais qui s'achèva malheureusement par un terrifiant bain de sang orchestré par le duc de Lorraine où 100 à 130 000 paysans laissèrent leur peau.

Margarete Renner (1475-1535) dite "la jardinière noire" (schwarze Hofmännin), d'après l'écrivain Klemens Ludwig une herboriste qui possédait un grand sens de la justice, est la seule femme connue par son nom que l'on ait retenu parmi les protagonistes de la grande guerre des paysans de 1525.
Habitante de Böckingen (auj. un quartier de Heilbronn), elle se plaignit aux seigneurs von Hirschhorn, à qui appartenaient les terres dont le couple Renner était les "serfs passifs", c'est-à-dire obligés de s'acquitter de l'impôt public en cours dans le St-Empire (le Bede et la Schatzung)) des corvées exorbitantes exigées par le conseil de Heilbronn, et tenta d'obtenir leur protection. Le conseil leur interdisait le pré, l'eau, le bois, etc..tant que les Renner ne s'acquittaient pas des fameux impôts et charges.
Les Hirschhorn refusant d'intervenir, Margarete s'engagea dans la révolte des paysans auprès du "Che" souabe du XVIe siècle, Jäcklein Rohrbach. Lors du massacre de Weinsberg où les paysans tuèrent nombre de gens de la noblesse, Margarete Renner aurait suggéré de se servir de la graisse du ventre du comte de Helfenstein pour nettoyer la rouille des piques et des fourches et d'en cirer les chaussures à lanières des insurgés.


(Hans Holbein : Bataille de lansquenets)

Elle harangua et encouragea les paysans au siège de Heilbronn. Elle est représentée sur un tableau (que je n'ai pas trouvé) en train de bénir les troupes armées de piques et de fourches, tout en leur demandant de ne laisser aucune pierre l'une sur l'autre, dans la ville de Heilbronn.
Elle proposa que l'on exécute le procurateur de Heilbronn car il ne faisait rien que, je cite, d'"entuber et d'escroquer" (beschissen und betrügen) tout le monde.

Elle est considérée en Allemagne comme la première révolutionnaire allemande.

Au contraire de Jäcklein Rohbach qui fut brûlé vif, elle fut emprisonnée mais, bien défendue par la seigneuresse locale, elle fut acquittée.
Margarete Renner mourut de mort naturelle en 1535.




Un monument commémoratif (assez moche) d'un certain Dieter Klumpp en hommage à la jardinière noire a été érigé à Heilbronn en 1986.

lundi 25 avril 2011

Nous sommes toutes des "sale putain".


Dernier billet sur le sujet de la nécessaire pénalisation des clients de la prostitution et je passe à autre chose, promis.
À propos de l'affaire olympe, Solveig m'a posé la question suivante : faut-il désormais choisir son camp camarade ?
Or, en admettant qu'il y ait deux "camps", le second serait surtout constitué des courtisanes disgrâciées de la Cour olympienne et de ses dégoûtées qui se sont exilées avant d'en avoir été priées. Que ces deux sortes d'ex-membres de l'amicale finissent par se regrouper un jour ce ne sera, je l'espère, étonnant pour personne.
Utiliser le féminisme pour se hisser à coup de concours de la meilleures bloggeuse de l'histoire des blogs au sommet deladite histoire, comporte l'inconvénient majeure d'avoir à persuader les autres blogueuses à tendance féministe que l'on est le gourou du genre. Or, certaines féministes dans le nombre ont un grave défaut qui ne plaît guère aux olympes du monde c'est qu'elles sont vraiment ...féministes. Ah bon ? Elles ne font pas semblant ? Zut, crotte, caramba et palsambleu. Proxinouchette a été tout à fait agacée par ce caillou qui a enrayé sa belle machine si efficace. Mais l'avarie a été de courte durée. La machine a fumé deux secondes et a fait la grève une demi-minute chrono. Parce que : qu'a fait notre gouroute ? Rien de spécial. Suivant sa logique de base et à défaut de se faire passer pour la féministe n°1, elle a trouvé la parade : se faire passer pour la sécessionniste n°1.
Le mot-clé étant : „n°1“
Et bien non, il ne s'agit pas de choisir son camp camarade. Il n'y a qu'une aspirante au plafond.
Et ce n'est pas moi. Et si j'exclus quelqu'un, ce sont en particulier les pro-prostitution agressifs qui veulent me convertir à tout prix, ce qui vient de se passer sur mes précédents billets.

Qu'ai-je à reprocher à lucia mel, grande amie d'olympe ? Rien. Bien au contraire. Son élégance dans l'affaire est extraordinaire et ne me fait l'aimer que plus. Et puis elle donne un excellent compte-rendu du dernier meeting de blogueuses initié par polluxe en rapportant les propos d'une grande féministe de l'époque épique invitée par madame olympe (uniquement pour soigner son image de number one sans doute puisque cette digne dame, comme le rapporte innocemment lucia mel ici donne les pays nordiques pour modèle en matière d'amélioration de la condition des femmes. Or que préconise les pays nordiques si ce n'est la pénalisation des clients de la prostitution ?).

Pendant que j'y suis, je peux encore citer lolobobo qui ne tient pas non plus de blog dit féministe, donc il ne va pas nous raconter des histoires de conducteur de moto-crottes plus mal lotis que des prostituées et que s'il devait choisir, il aimerait mieux le tapin. Par contre je voudrais signaler sa magistrale découverte d'un virtuose pakistanais de 20 ans dont le talent est renversant. Pour les mélomanes, c'est ici.

Inutile de dire à Paul qu'il n'a pas de camp à choisir, il ne se pose même pas la question et il raison.

JEA dont il faut lire les compte-rendus de deux films à ne pas manquer : ici et ici est libre comme l'air bien entendu, ainsi que Colo grande dispensatrice de douceur et de rêves, loin des passions qui m'agitent. J'aime trouver chez elle ce hâvre de paix auquel j'aspire souvent.

En fait, Solveig, il n'y a pas deux camps égaux. Il y a celles qui se sont pris une beigne et les autres.

Kalista, Hypathie et antisexisme qui ne s'en sont peut-être pas (encore) pris, se promènent selon leur inspiration ; mebahel, par contre, semble éviter la zone autour d'un Tchernobyl qui menace toujours de recracher des rejets radioactifs.
Idem pour Mauvaise Herbe.
Sans parler de Floréale.
Emelire semble avoir fait son baluchon.
Héloise l'a fait à coup sûr.
Voilà ce qu'il en est des fameux camps.

Et pour ce qui est des „luttes de pouvoir“, je les cherche aussi.
En ce qui me concerne, je n'ai pas de prétention à la domination de mes semblables, ni le profil. Je n'ai pas de compte Facebook, ne twitte pas, ne fait pas de pub pour amazon, me fiche d'hellocoton, n'ai pas d'espace sur rue89 que je ne recherche pas et ne cherche aucun allié influent dans la blogosphère. Pourtant voilà qui me donnerait un peu plus de pouvoir si toutefois j'en avais déjà. Mais ma vraie vie n'est pas sur le web. La seule chose que j'ai faite est de m'inscrire sur wikio, conseil lu chez olymproxette et que j'ai cru devoir suivre. Je ne regrette pas puisque deux de mes billets ont été quasiment tout de suite traduits en plusieurs langues, ce qui est toujours sympa. Mais le nuage de tags, par contre, qui filtre les noms cités sur ce blog pour n'en retenir que les masculins me consterne grandement. N'oublions pas que ce blog a pour but de parler des femmes, y compris des blogueuses, s'il le faut.

Pour compléter sur le sexisme dont le socle est la prostitution qui réduit la femme à un morceau de viande, je conseille le blog humoristique d'Insolente veggie qui dénonce l'attitude incohérente d'une société éminemment viandarde face au désir de certain.e.s citoyen.ne.s de manger végétarien.
Car le monde c'est aussi nos amis les animaux ainsi que notre nourrice, la nature et ses plantes que montrent en ce moment Tania du moins celles des serres royales de Bruxelles et Claire Felloni qui les dessine, ainsi que Catherine Delhom. Le chant de l'alouette les photographie avec ses hôtes car les plantes sont souvent habitées.
Sinon pour en revenir à la pénalisation des clients de la prostitution le blog „un petit pas pour l'homme“ qui suit de très prêt le sujet est très bien fait et je le recommande particulièrement aux enragé.e.s qui ont sévi ici même s'ils n'iront pas le lire.

Quant au sexe qui n'a définitivement pas de rapport avec la prostitution est traité de manière rigolote par Maia. (Ajout du 26.4 à 15.03 : mis à par qu'elle vient de publier un billet qui pose cette question très louche : En quoi donc mon sexe est-il tellement moi-même que consentir à le louer reviendrait, logiquement, à me faire volontairement esclave ? Si quelqu'un veut lui expliquer je vous ai donné le lien).

Je finirais sur le célèbre Benvenuto Cellini et sa "sale putain", mots par lesquels ce maître-orfèvre, assassin et pédophile à ses heures (il le raconte dans son autobiographie) désignait une femme qui, pour lui, avait trop de pouvoir : Anne de Pisseleu, duchesse d'Etampes et maîtresse de Francois Ier.
Et pourtant, si on va par là, elle n'avait qu'un "client" (qu'elle n'avait pas choisi car on ne disait pas "non" à un monarque de droit divin).
Comme quoi N°1 ou pas, on est toutes des "sale putain". Eh oui, madame Olympe !

De l'esclave sexuel à la femme de pouvoir, nous sommes donc toutes des sales putains tant que la notion de "putain" existe. Lorsqu'elle disparaîtra nous deviendrons peut-être des femmes, tout simplement.

samedi 23 avril 2011

Les femmes exclues de toute résurrection


Dans la Bible, on ressuscite beaucoup ces congénères surtout quand on est un homme qui ressuscite un autre homme, ou on ressuscite tout seul sans l'aide de personne, comme Jésus-Christ qui revient de chez les morts pile le jour de Pâques, c'est pratique.
Je cherche en vain dans le "livre des livres" une femme que l'on s'efforcerait de ranimer, de ramener à la vie, même si on n'y parvenait pas, comme dans le mythe grec d'Eurydice, je ne suis pas exigeante.
Il n'y en a pas, bien entendu.
Mais le culte chrétien de Pâques, chacun le sait, est inspiré de cultes plus anciens célébrant la renaissance de la nature et plus exactement la résurrection des plantes qui, entre autres, nous nourrissent. Dès lors on se demande ce que font encore les bonshommes là-dedans et pourquoi Jésus-Christ doit se substituer au vivant tout entier. Est-il une plante ? Les hommes sont-ils des plantes ? La vie tout entière peut-elle être symboliser par un unique surhomme ?

Pas plus que par une surfemme, il me semble.

Surtout quand cet unique superman censé "sauver" le monde n'a, semble t-il, guère démontré qu'il en était capable étant donné que d'un autre côté nous sommes entrés dans l'ère de cette fameuse apocalypse prédite à la fin du roman d'un genre à part, cité plus haut, et identique à celui qui nous promettait le grand sauvetage.

Mais qu'est-ce qui sauverait encore le monde aujourd'hui ? Sans conteste la fin de l'arrogance masculine y contribuerait pas mal et aurait pour corollaire la résurrection des femmes prosti...tuées, par exemple, vouées à une mort dans la vie, une mort sans fin.
A l'heure où tant de gens bien pensants continuent encore à gloser sur le bien-fondé ou non de la prostitution et sont près à trouver normal et dans l'ordre des choses de continuer à prosti.........tuer, je vous souhaite, le coeur légèrement au bord des lèvres, excusez-m'en, de

joyeuses Pâques.


(Ill. : "Eurydice mourante", sculpture de Charles-Francois Leboeuf, XVIIIe siècle, musée d'Amiens)

mercredi 20 avril 2011

Quoi ? Proxénète n'est pas une activité hautement féministe?

L'immense majorité des véhicules qui roulent ver le centre de la capitale allemande emprunte l'axe autoroutier Potsdam-Messe Nord et ne peuvent manquer d'apercevoir sur le trajet, l'énorme enseigne au néon rouge "Artemis" qui se détache merveilleusement la nuit sur le ciel avec sa silhouette stylisée de tête de femme qui se pâme au bout des immenses lettres composant le nom de la déesse grecque autrefois virginale.
J'ai voulu me rendre à pied sur place, hier, afin de faire mes propres photos* en extérieur du temple de la consommation de chair féminine que Virginie Despentes envie tant aux allemands, mais l'accès est tellement sécurisée qu'une petite souris ne pourrait s'y glisser. Un oiseau peut-être ?
Il est impossible d'approcher l'endroit même de quelques centaines de mètres sans voiture.
Tiens? Pourquoi tant de précautions ? N'est-ce pas pourtant une "industrie comme une autre" ?
Si se prostituer c'est faire l'amour quand on veut avec qui on veut, le nombre de gens qu'on veut et comme on veut, l'industrie de "l'amour" ne devrait pas tant se montrer pudique et devrait même arborer sans se gêner l'insigne chère aux années de libération sexuelle : "Peace,Love and Freedom" !
Les prostituées d'Artemis devraient se déplacer dans les écoles pour expliquer aux enfants dans quel univers de liberté idyllique elles ba(e)ignent à longueur de journées et bien leur faire comprendre à ces petits qu'il ne faut pas stigmatiser bêtement une profession si honorable, enfin quoi !
D'ailleurs "proxénète" dont d'aucune s'offusque d'être "traiter de", dans ce contexte de joie et de liberté décrite par l'offusquée elle-même pour des femmes qui, je cite "n'ont pas la chance de gagner leur vie en faisant un métier épanouissant" n'est-ce pas une activité hautement féministe? Mettre amoureusement les économies de côté de femmes tellement éprises d'amour qu'elle n'arrête plus de le faire du matin au soir avec tout le monde, n'est ce pas hautement altruiste? Elles font l'amour tout le temps, ces nymphes éprises d'étreintes ininterrompues, alors, qui va s'occuper des basses contingences, paperasses et gestion de l'argent, hein?
Il faut bien que quelqu'UN le fasse !
Bref, dans ce paradis terrestre, le proxénète et le client sont des parfaits serviteurs de ces reines de l'amour que sont les prostituées et de quoi se plaint-on?

Je reviens donc bredouille de photos et vous reparle plutôt de la Diane de Jean Goujon qui a craqué pour le voyeur Actéon. Elle ne lui en veut plus de l'avoir surprise au bain, au contraire. Elle l'a transformé en cerf, certes, mais elle ne l'a plus fait dévorer par ses chiens. Elle lui témoigne maintenant sa tendresse, passe son bras autour de son cou. Car l'homme transformé en bête, c'est tellement érotique. Et les toutous dociles remuent bravement la queue. C'est le règne de la sensualité animale et femelle.
Tiens, il paraît que ce groupe est le premier grand nu de la sculpture francaise. On commence comme ça...

D'ailleurs des reproductions de ce groupe n'ornent-elles pas traditionnellement quelques hôtels de passe par ci par là ?

* j'ai demandé au compagnon habituel de mes safaris photos s'il voulait m'accompagner, mais quand je lui ai indiqué le lieu qui m'intéressait, il a curieusement répondu d'un ton qui n'admettait pas de réplique : "sans moi". J'ai trouvé étrange que la noblesse de ce lieu l'attirât si peu ! Qu'est ce qui peut bien le rebuter tant ? C'est incompréhensible ! Il n'a pas lu Elisabeth Badinter et Virginie Despentes, ça doit être pour ça !

lundi 18 avril 2011

Artémis n'est plus ce qu'elle était

Pour les grecs, Artémis était la déesse de la chasse, la maîtresse de la nature sauvage et des animaux.
Ses attributs étaient la biche l'arc, le carquois, les flèches. On la surnommait "l'archère".
Elle s'engageait parfois dans des conflits humains comme la guerre de Troie où elle utilisait ses talents au tir à l'arc contre les grecs.
Elle ne voulait pas d'homme dans sa vie. Quand Actéon la surprit par hasard dans son bain, elle le métamorphosa en cerf et le fit tuer par ses chiens.

Sur cette figure rouge sur fond noir, Artémis qui porte un vêtement couvrant, bande son arc, prête à tirer sa flèche.

Les latins adoptèrent l'Artémis grecque dont ils firent leur Diane, une déesse qui avait également pour domaine les forêts, les clairières et les sources et tous les lieux en marge de la sauvagerie et de la civilisation.

La Diane de cette sculpture porte une tunique courte qui souligne son corps et fait apparaître épaules et jambes. Elle n'est pas vraiment dangereuse. Elle porte la main à son carquois tout en caressant la tête d'un chevreuil.



Au XVIe siècle, Diane est associée à Diane de Poitiers, la maîtresse du roi Henri II pour lequel Jean Goujon réalisa cette sculpture.

Fini la déesse habillée et debout qui bande son arc et se tient à l'écart des hommes. Voici la Diane nue et couchée. Elle tient son arc mais où est donc le carquois et les flèches sans lesquels elle ne saurait se servir de l'arc ? La biche n'est plus un chevreuil mais un cerf. C'est plus viril.
c'est au XVIe siècle que se situe sans conteste le point de départ du déshabillage et de l'érotisation des femmes dans l'art.





Au XXIe siècle, Artémis n'est plus une déesse du tout. C'est un bordel d'Allemagne. Dans la pub ci-dessous, on ne voit qu'une voiture garée devant le bâtiment comme si un client avait eu la chance d'avoir toute la maison à sa seule disposition. Il faut dire qu'une photo avec plusieurs bagnoles garées devant un lupanar a quelque chose de très répugnant...
En Allemagne, les femmes qui sont dans ce genre de maison, sont bien entendu comme partout où la prostitution n'est pas institutionalisée, des filles pour la plupart issues d'un trafic en provenance de l'est. Elles n'ont pas de papiers. On les a attirées dans ce genre d'établissement par des annonces bourrées d'euphémismes. Lorsque le "patron" (qui n'est plus qualifié de proxénète en raison de la très stupide et criminelle légalisation) veut s'en débarasser, il dénonce la situation de sans-papier de ces femmes et la police les embarque.
La différence avec les pays qui n'ont pas légalisé la prostitution c'est que la police a les mains liées et ne peut plus arrêter quiconque sous l'inculpation de proxénétisme.

Les sé(r)vices de ces femmes sont vendus au rabais parce que les "boîtes" sont en concurrence.

Les riverains qui ne veulent pas avoir ce genre de commerce à proximité de chez eux sont obligés d'entrer dans la résistante parce que les municipalités qui ne pensent qu'à l'argent donnent presque systématiquement leur aval.
Je ne vais pas rédiger une thèse sur la question mais il ne faut quand même pas être grand clerc pour comprendre que ce commerce est une abomination.
Comme le thème fait débat sur d'autres blogs, voici mon point de vue : se déclarer opposé à l'abolition de la prostitution et à la pénalisation des clients, c'est devenir proxénète passif, esclavagiste passif, exploiteur/se et opprimeur/se passif/ve de femmes en grande détresse psychologique.
Pour moi, il n'y a pas de position intermédiaire. Qui défend la prostitution, est soi-même prostitueur/se passif/ve. Donc criminel.le.
Car la prostitution est un crime contre l'humanité.

J'accuse d'ailleurs en passsant les prétendues féministes, olympe et crêpe qui militent toutes deux pour les bordels à l'allemande et s'acoquinent avec les plus vils machos du net sous prétexte qu'ils sont bien placés dans le top wikio sans que cela leur pose le moindre cas de conscience (ils seraient proxénètes dans le privé que cela ne les dérangerait pas le moins du monde), d'utiliser le féminisme pour leurs seuls intérêts personnels : l'égalité des salaires et la parité. J'accuse ces femmes de se servir des aspirations à la fin de l'oppression machiste d'autres femmes pour s'en faire un public de faire-valoir.
Militer pour l'extension à la France des bordels à l'allemande c'est être gynocrate, manipulatrice et avide de pouvoir (sur les hommes comme sur les femmes). Que l'idée soit estampillée "Virginie Despentes" ou "Badinter" ne blanchit en rien celleux qui la reprennent, loin de là.

(Au contraire cela prouve que le pseudoféminisme conduit bel et bien au pouvoir)

20.4.2011, 15.48 h. et scoop de dernière minute : olympe décide de ne plus afficher le terme "féministe" sur son blog parce qu'elle ne veut pas être amalgamée avec "des personnes" qui la traite de proxénète. DES personnes, dit-elle. Il n'y a qu'une personne qui dit considérer que celleux qui sont antiabolitionistes sont des proxénètes passifs/ives, c'est MOI. Or je n'affiche pas le nom de féministe sur mon blog, donc il n'y pas d'amalgame du tout mais comme il faut bien désigner un(e) coupable...ainsi par ma faute de vilaine méchante voilà une grande féministe obligée de prendre injustement le maquis. J'ai les larmes aux yeux.

Une grande femme est une grande femme

Pendant que l'historien Hilarion de Coste (1595-1661) pense séparer le bon grain de l'ivraie lorsqu'il fustige les réformées et encense les bonnes catholiques (alors qu'il ne les a pas connues), le poète Joachim du Bellay (1522-1560) contemporain des grandes femmes qu'il honore de son art, tient si peu compte des affinités spirituelles de l'une ou de l'autre lorsqu'il s'agit de leur rendre hommage qu'il réalise un sonnet réunissant à la fois la très réformée Jeanne d'Albret et la très catholique Anne d'Este.

A Mesdames de Vendôme et de Guise*

Du plus grand heur dont le ciel soit avare
Du plus grand bien que nature ait donné
Le Ciel, Nature et Dieu ont orné
Celle qui est l'ornement de Navarre

Des plus beaux dons du savoir le plus rare
Qui soit encor en notre siècle né,
Ce siècle soit richement couronné
Celle qui est le thresor de Ferrare

Je te salue, ô fleur du Navarrois
Je te salue, ô fleur du Ferrarois
Puis que voz faits, qui ja nous apparoissent

Favorisez des hommes et des Dieux
Croissant pour nous, desmontrent à nos yeux
Qu'à nostre bien et vostre honneur ils croissent

(Jeanne d'Albret est duchesse de Vendôme et reine de Navarre, Anne d'Este, duchesse de Guise et de Ferrare).

jeudi 14 avril 2011

GEO n'a pas trouvé de femme à la Renaissance


Ce matin, j'ai feuilleté à la maison de la presse, le "GEO epoche" (GEO histoire, édit. allemande) sur la Renaissance qui vient de sortir.


C'est une très beau numéro avec de splendides reproductions, une mise en page intelligente et hautement esthétique, des articles extrêmement intéressants. Seule ombre au tableau : on ne trouve pas parmi ces pages la moindre compositrice, peintresse, mécène, femme de lettres, graveuse, sculptrice, poétesse, reine, théologienne, bref, une femme qui aurait laissé son empreinte personnelle (en tant que sujet) sur l'époque.
A en croire ce magazine, les femmes se faisaient mettre en musique, peindre, décrire en vers, sculpter, couronner pour le decorum et puis c'est tout.
Hier comme aujourd'hui et demain, il faut se rappeler que les femmes ne FONT rien.
Elles SONT. Ce sont les hommes qui FONT.
Les seules femmes admises dans le cercle des élus de ce magazine sont des potiches, pardon des modèles, comme la Joconde.
Vous allez me dire : de quoi tu te plains ? Elle figure sur la couverture !


dimanche 10 avril 2011

Antoinette van Roesmals, enterrée vive

Dans l'histoire de la Réformation aux Pays-Bas, on trouve des persécutions "genrées" qui glacent le sang.

En 1520 paraissent les deux premiers édits de Charles Quint, contre l'hérésie de Luther. Ces édits portent le nom de placards, Le premier est du 20 mars ; le second, signé à Worms, le jour même où l'empereur mettait Luther au ban de l'empire, est du 8 mai de la même année. Les menaces du pouvoir deviennent toujours plus sévères : défense de posséder les écrits réformés, défense de se rendre aux prêches. En 1529, un nouvel édit, plus violent encore, interdit la lecture des écrits de Luther, l'assistance aux réunions hérétiques, même la possession d'un Nouveau Testament non autorisé ; le coupable sera condamné à mort : « à savoir les hommes par l'épée, les femmes par la fosse, les relaps par le feu. »

Condamné à mort "par la fosse" signifiait : être enterrée vive. C'était le châtiment que les romains infligeaient aux vestales qui n'étaient pas restées chastes (alors qu'elles n'avaient pas choisi d'être vestales puisqu'elles étaient désignées comme telle vers l'âge de 6 ans).

C'est ainsi que mourut, par exemple, Antoinette van Roesmals, enterrée vivante à Louvain.
Sympathisante des idées de Zwingli, elle réunissait chez elle des réformateurs comme Albert Hardenberg, Paul de Rovere, Goris Stockx, Joos von Honsbergen, Johannes a Lasco (premier prêtre polonais à rompre son voeu de chasteté en épousant la flamande Barbara Lasco), et d'autres encore.
J'aimerais beaucoup en raconter plus sur cette martyre, puis-je dire, mais je ne trouve pas de biographie en francais sur elle.
Ici quelques précisions en flamand où il semble être question des livres interdits qu'elle aurait possédés dont les Postilles de Luther, le Nouveau Testament, un livre de médecine (?) mais je ne tiens pas à faire de traduction erronée.
Il est question d'elle dans deux ou trois paragraphes : l'un s'appelle "Possession de livres", je crois, et l'autre "La "force" (?) souffrante du noyau protestant" et on reparle d'elle dans le "Le procès". Il me semble qu'elle a été exécutée en 1543.
Si quelque flamophone charitable (par exemple Colo Tania ou JEA dont je recommande à tous et à toutes les blogs d'une grande qualité littéraire) passait par là et voulait bien jeter un oeil sur le document, ce serait très sympa !

(Illustration : "Vestale punie" par Gamelin)

samedi 9 avril 2011

Anne d'Este, femme politique


Anne d'Este (1531-1607) était la fille du duc de Ferrare et de Renée de France (petite soeur de la reine Claude qui a donné son nom au fruit).
Si l'historien Hilarion de Coste en parle avec autant de chaleur (voir billet sur Olympe Fulvie Morat) c'est surtout parce que contrairement à sa mère, elle était d'un catholicisme assez fanatique et il n'est pas exclu que Coligny ait été assassiné pour la venger du meurtre de son mari Francois de Lorraine, duc de Guise.
Devenue duchesse de Guise après la mort de son beau-père en 1550, Anne d’Este joua le rôle d’intermédiaire entre la cour de Ferrare et celle de France.
Malgré sa répugnance pour le calvinisme, Anne d'Este aida sa mère Renée de France qui soutenait les protestants et les accueillait à Ferrare lorsqu'ils étaient inquiétés en France. François de Lorraine intercepta leurs correspondances et interdit à son épouse tout contact avec sa mère. Elle finit par pardonner à son mari le massacre de Wassy où elle s'était interposée pour arrêter l'exécution des protestants qui s'étaient tous réfugiés dans une grange. En février 1563, François de Lorraine fut assassiné.L’assassin Jean de Poltrot de Méré fut saisi et condamné à être écartelé. Anne d’Este essaya par tous les moyens de poursuivre juridiquement Gaspard de Coligny, chef des huguenots, qu’elle tenait pour responsable de l’attentat. Pendant trois ans, la veuve pressa le roi et ses juges de lui rendre justice, mais en janvier 1566 le conseil du roi déclara Coligny innocent du meurtre et ordonna „silence perpétuel“ en cette affaire. Nombreux furent ceux qui virent la vengeance de la veuve du duc de Guise dans le coup de feu qui ne rata la poitrine de Coligny que par miracle, au matin du 22 août 1572, et qui fut le signal du départ des massacres de la Saint-Barthélemy. Il est néanmoins difficile de savoir quel rôle exact joua Anna d’Este dans cette affaire, et plus largement dans les massacres de la Saint-Barthélemy.

Le 5 mai 1566, à Saint-Maur-des-Fossés, Anne d’Este se remariait avec Jacques de Savoie, duc de Nemours et de Genevois. Jacques de Savoie avait été épris d'elle il y a fort longtemps et l'avait soutenue lors de la mort de son époux. A partir de cette date, elle passa la plus grande partie de son temps à Annecy, ou en voyage entre le Genevois et la cour de France.

Avec la fondation de la Ligue catholique, dans laquelle les Guise, ses fils, jouèrent un rôle de premier plan, son importance politique augmenta considérablement. En décembre 1588, Henri III fit assassiner ses deux fils Henri le Balafré et le cardinal (Louis de Lorraine) au château de Blois ; Anne d’Este elle-même fut emprisonnée.

Après sa libération dès février 1589, elle regagna Paris où elle joua un rôle actif dans l'organisation de la Ligue. Quelques-uns de ses contemporains la tenaient pour la commanditaire de l’assassinat du roi. Nommée « reine-mère » par la Ligue, la princesse fut l’une des figures principales de la capitale alors assiégée par les troupes d’Henri IV. Après la conversion au catholicisme du Bourbon, elle le reconnut comme roi et tenta de convaincre ses fils rebelles d’en faire autant.

Anne d’Este passa les dernières années de sa vie en tant que « superintendante de la maison » de la reine, Marie de Médicis.
Son second mari, Jacques de Savoie, duc de Nemours est LE duc de Nemours du roman de Marie-Madeleine de Lafayette "La princesse de Clèves".

vendredi 8 avril 2011

Je présente mes excuses à Madeleine et Ielena qui avaient un commentaire en attente dans mon courrier mais je n'avais plus accès depuis quelques jours à ma boîte mail (allez savoir pourquoi) ce qui m'a empêché de les publier et d'y répondre avant aujourd'hui...C'est fait !

jeudi 7 avril 2011

Vittoria Colonna, poétesse

Vittoria Colonna vit le jour à Rome en 1490. Elle était la fille de Fabrizio Colonna, condottiere au service de Ferdinand II le Catholique. Les Colonna était une famille noble romaine remontant au XIe siècle. Vittoria, poétesse, écrivit : "Rime della Vittoria Colonna", s'inspirant du poète et humaniste italien Pétrarque, et de son poème élégiaque "les Rimes et les Triomphes". Comme lui, elle chercha à exprimer le déchirement éprouvé entre l'aspiration à l'ascétisme et l'attirance pour les séductions du monde. Les poèmes de Vittoria furent éditées 4 fois dans le siècle, ce qui est beaucoup pour l'époque. Vittoria, marquise de Pescara, était l'amie de tous les hommes célèbres de l'époque : le peintre Pietro Bembo, Baldassare Castiglione (auteur du "Courtisan"), le cardinal Reginald Pole en exil (fils de la pauvre Margaret Pole, décapitée par Henri VIII), et bien d'autres comme Michel-Ange qui l'aima passionnément. Elle entretint également de bonnes relations avec les protestants italiens comme Juan de Valdés. On suppose qu'elle se convertit au protestantisme mais ce n'est pas sûr. Elle mourut à Rome en 1547 à cinquante-sept ans, célébrée pour ses poèmes mais aussi pour l'amour qu'elle vouait à son époux, Fernando de Àvalos. Malheureusement pas moyen de trouver ses poèmes originaux ni de traduction francaise. J'ai trouvé ceci mais il est probable que ce soit une adaptation en italien moderne. Je ne comprends pas assez l'italien pour en juger ni traduire un poème du XVIe siècle. Néanmoins le voilà : Se con l'armi celesti avess'io vinto me stessa, i sensi e la ragione umana, andrei con altro spirto alta e lontana dal mondo e dal suo onor falso dipinto. Sull'ali della fede il pensier cinto di speme, ormai non più caduca e vana, sarebbe fuor di questa valle insana da verace virtute alzato e spinto. Ben ho già fermo l'occhio al miglior fine del nostro corso, ma non volo ancora per lo destro sentier salda e leggiera. Veggio i sogni del sol, scorgo l'aurora, ma per le sacri giri alle divine stanze non entro in quella luce vera.

Finalement voici une traduction par Dominique historienne (voir commentaires) : «  Si avec les armes célestes j’avais vaincu les sens et la raison humaine, j’irais d’un autre esprit plus haut et loin du monde et de ses faux honneurs
Sur les ailes de la foi, la pensée ceinte d’espoir, désormais ni déchue ni vaine, serait poussée et élevée, par la vraie vertu, en dehors de cette folle vallée.
Eh bien, j’ai déjà arrêté mon œil au meilleur objectif de notre parcours, mais je ne vole pas encore, ferme et légère par le droit chemin.
Je vois les rêves du soleil, je vois l’aube, mais pour [ce qui est de] la visite des divines chambres, je n’entre pas dans cette vraie lumière."
Du fait qu'elle ait inspiré un grand amour à Michel-Ange, il existe beaucoup de représentations de Vittoria Colonna. Celle d'en haut est d'une certaine Maria Longhi et gravée par une certaine Ernesta Bisi. Celle du bas est de Sebastiano del Piombo.

mardi 5 avril 2011

Fukushima au XVIe siècle


Dans "De l'incertitude, abus et vanité des sciences", Corneille Agrippa de Nettesheim dont j'ai déjà parlé ici remet en question toutes les sciences connus de l'époque, les trouvant dangereuses aux mains d'une humanité qui a d'après lui une forte propension à la sottise, un manque total d'humilité et une violente inclinaison à la cupidité.
Ce livre est un long plaidoyer contre la rage de progresser dans la connaissance des choses extérieures en laissant l'introspection et la connaissance de soi en chemin au lieu de les faire passer prioritairement à la recherche scientifique.
Dans le chapitre sur les métaux Corneille Agrippa fait l'inventaire des outils incroyables développés pour piller la nature, sans conscience ni mesure et dénonce ce qu'il en est fait. Extrait :

De cet art [la recherche des métaux] proviennent toutes les richesses de ce monde, la convoitise desquels a incité les hommes si étrangement, qu'ils ne craignent d'entrer tous vifs sous terre et pénétrer jusqu'aux enfers, où par un remuement ruineux des oeuvres de nature cherchent les trésors jusqu'aux manoirs des esprits immondes. dont Ovide chante ces vers :

Mais jusqu’au fond des entrailles allèrent

De Terre basse, où prirent et fouillèrent
Les grands trésors et richesse vaines
Qu’elle cachait en ses profondes veines :
Comme Métaux et pierres de valeur,
Incitements à tous maux et malheurs.
Jà hors de terre était le fer nuisant
Avec l'or trop plus que fer cuisant
Honnête honte et vérité certaine
Avec foi prirent fuite lointaine:
Au lieu desquels entrèrent flatterie,
déception, trahison, menterie
Et folle amour, désir de violence
D'acquérir gloire et mondaine opulence


Celuy doncques pourvurent la vie humaine de grandes occasions de crimes et méchancetés, qui premier trouva les mines d'or et des autres métaux et enseigna la manière de les fouiller, en quoi les hommes ont rendu la terre très périlleuse (...)

Ce n'est qu'un infime extrait mais on ne peut s'empêcher de penser à l'uranium, à l'uranium enrichi, au gaz de schiste, à Fukushima et à ses conséquences ...et dire que Corneille Agrippa répète en partie ce que Pline l'ancien, né en 23 ap. J.-C., disait déjà avant lui !

lundi 4 avril 2011

Biographie d'Olympe Fulvie Morat / Olympia Fulvia Morata, humanistine




- 1526 née à Ferrare (Italie)

- Humanistine italienne, hellénistine, poétesse, „femina docta pia“

- Fille de l'humaniste Fulvius Moratus (Pellegrino Moretto) de Mantoue (1483-1548)

- 1540 : camarade d'étude de la jeune princesse Anne d'Este. Toutes les deux sont élèves du dr. en méd. Johann Senf (Giovanni Sinapius) et de son frère le dr. jur. Kilian Senf (Chiliano Sinapius) de Schweinfurt, apprennent le grec, le latin, la rhétorique, la calligraphie.

- Se tourne avec son père vers le Calvinisme

- 1548 : après la mort de son père et l'influence grandissante de l'Inquisition contre-réformatrice à Ferrare, est poussée à quitter la Cour

- Hiver 1549/50 : Olympe épouse le docteur en médecine de 10 ans plus âgé qu'elle (promu docteur à Ferrare en 1549) Andreas Grundler (Gruendler, 1506/1555) de Schweinfurt, également partisan de la Réforme

- Début de l'été 1550 : part avec son petit frère Emilio âgé de 8 ans et Grundler en Allemagne (ils s'installent à Schweinfurth, Brückenstraße 12)

- Fin 1550 : Grundler est nommé médecin de la ville de Schweinfurt

- Avril 1553 : occupation de Schweinfurt par le margrave Albert Alcibiade de Brandebourg-Kulmbach. Siège par les troupes de ses adversaires.

- 12/13 juin 1554 : assaut, pillage et destruction de Schweinfurt. Grundler, Olympe et Emilio se sauvent sans rien emporter ; les manuscrits d'Olympe sont perdus, ils fuient en Palatinat (à Erbach).

- Juli 1554 : grâce au comte Georg von Erbach, Andreas Grundler obtient la 3e chaire de médecine à l'université d'Heidelberg

- 12 juillet 1554 : Andreas Grundler devient professeur de médecine à Heidelberg. Olympe est invitée par l'hélleniste heidelbergois Jacobus Micyllus (Jacob Moltzer, 1503-1558) à donner des cours privés de grec.

- 26 octobre 1555 : Olympe meurt à 28 ans de la tuberculose (?) à Heidelberg et est enterrée dans le cimetière de l'église Saint-Pierre.

- Décembre 1555 : Grundler et Emilio meurent de la peste.

- 1956 un lycée de Schweinfurt est baptisé "Olympia-Morata-Gymnasium"

- 1978 : exposition sur Olympe Fulvie Morat à la bibliothèque de l'université de Heidelberg

- 26 mars - 8 mai 1998 : Olympe Fulvie Morat – Stations de sa vie : Ferrare – Schweinfurt – Heidelberg (expo au musée de l'université de Heidelberg)

- 7 juin 2002 : inauguration d'une Olympia-Morata-Haus (maison Olympe Morat) dans la Landstraße 2 à Heidelberg.

- 26 octobre 2005 : commémoration de sa mort à l'église Saint-Pierre de Heidelberg

L'historien francais Hilarion de Coste la mentionne en ses termes dans sa biographie d'Anne d'Este :
Entre les filles [le duc de Ferrare] cherit et affectionna Anne son aisnée, laquelle il detourna de voir et de frequenter la susnommée Fulvie Olympe Morat, fille dont les moeurs estoient assez bonnes et la conversation honeste; mais si fort zelée et attachée aux erreurs du Calvinisme, qu'elle quitta pour ce sujet l'Italie et l'agreable sejour de la Cour des Ducs de Ferrare avec un sien frere nommé Emile plus jeune qu'elle, et se retira en Alemagne, où elle épousa André Gruntler Medecin, et mourut à Hildeberg ville capitale du Palatinat l'an 1555 estant âgée de 29 ans. Ceux qui ont leu les lettres Latines d'Olympe fille du sçavant Fulvie Peregrin Morat natif de Mantouë, qui ont esté imprimées à Basle par le soin de Celio Secundo Curione natif de S. Chirico prés de Thurin (lequel avoit aussi quitté l'Italie pour faire librement profession de l'heresie de Calvin) n'ignorent pas les artifices et les charmes dont cette Dame Ferraroise se servoit pour faire embrasser les nouvelles erreurs, et renoncer la foy Catholique à Anne d'Est Duchesse de Guyse, sa lettre est datée d'Hildeberg le premier de Juillet de l'an 1554. mais cette sçavante Princesse qui avoit appris fort facilement les langues Grecque et Latine avec Olympe, méprisa les douces paroles, et boucha ses oreilles aux charmes de cette Syrene, ayant vécu et rendu ses derniers soûpirs dans la vraye Eglise, hors de laquelle il n'y a point de salut, et y ayant soigneusement fait instruire tous ses enfans, comme la France sçait et l'a veu, et nous le rapporterons en cet Eloge.


A titre posthume furent imprimés à Bâle à partir de 1558 plus de 50 lettres ainsi que des poèmes, des traductions et autres écrits d'Olympe Morat dont la publication fut prise en main par l'humaniste Celio Secondo Curione, ami de la famille.


(Illustration : page ouverte d'une publication des écrits d'Olympe Morat).

samedi 2 avril 2011

Pulisena Nelli, peintresse (cette fois vraiment!)


Fille du peintre Luca Nelli, Pulisena est née en 1523 à Florence. Elle fut cloîtrée à 14 ans (âge avancé puisque l'on cloîtrait souvent les filles à partir de 5/6 ans ; sans doute pour des raisons économiques et parce qu'elles n'étaient pas le garcon attendu). Elle passa là le reste de ses jours puisque l'on sortait rarement d'un couvent avant sa mort.
Mais il n'est pas impossible non plus que son père ait voulu lui permettre de développer dans des conditions plus favorables un talent déjà apparant. En effet, on pratiquait assez librement à cette époque les arts dans les couvents et beaucoup de poétesses, de compositrices, entre autres, furent nonnes.

Elle prit le nom de soeur Plautilla et l'abbesse du couvent Sainte-Catherine de Florence confia son éducation à la peinture à un peintre florentin renommé. Après quoi elle enlumina les livres de la bibliothèque du couvent. Puis elle fut autorisée à peindre d'après esquisses de peintres renommés qui, on le voit, ne peignaient pas toujours eux-même les sujets qu'ils avaient projetés sur papier. Combien de Tintoret et de Titien ont été mis en peinture par d'obscures nonnes ? Après avoir fait ses preuves dans ce domaine également, elle eut enfin le droit de peindre ses propres toiles.
On s'arracha bientôt les oeuvres de soeur Plautilla. Il va de soi que les sujets furent exclusivement religieux et ornèrent d'abord les églises, ensuite les palais des nobles.
Ses peintures sont empreintes d'une très grande spiritualité.
Elle devint à son tour abbesse et forma quantité de nonnes à la peinture. Bientôt le couvent Sainte-Catherine de Florence devint une école de peinture réputée dans tout le nord de l'Italie.
C'est en 1588 que soeur Plautilla, la plus célèbre des nonnes peintresses mourut dans son cloître florentin.


Ajout de 19.04 h. : remarquons que d'un siècle à l'autre, chaque fois d'une manière différente, la société est organisée de telle sorte que, dans la grande majorité des cas, pour avoir accès à leur développement personnel les femmes sont contraintes au célibat.

vendredi 1 avril 2011

Annet van de Voort, peintresse


Bon OK c'était un poisson d'avril, il s'agit d'une photographe néerlandaise contemporaine;))