mercredi 28 juillet 2010

Liberté _Seins dénudés_Anonymité



La version sein dénudé d'origine nous vient des sculptures et des bas-reliefs grecs représentant les Amazones, qui se drapaient le corps ainsi, peut-être par commodité. Ci-dessus Hercule et Hippolytè (entre v. 500 et v. 300 av. J.-C.).
L'amazone incarne la femme libre de toute domination masculine. Cependant comme on le voit sur ce relief, elle est sur le point d'être vaincue et tuée.


La version sein dénudé du XVIIe siècle : Clélie, héroine de l'époque romaine, à peu près contemporaine d'Hippolytè (507 av. J.-C.) dévoile, sur cette peinture inspirée de la plastique grecque, un sein, mais "involontairement". Son vêtement n'est pas celui d'une amazone. Cependant Clélie incarne la femme qui reprend sa liberté. De plus, elle est montée sur un cheval. Le peintre veut donc officiellement faire une allusion à Hippolytè, officieusement imprégner le tableau d'érotisme, le meublant essentiellement de jeunes filles vêtues comme dans une chambre à coucher.




Version seins dénudés du XIXe siècle : dans "La Liberté guidant le peuple, Théroigne de Méricourt, le modèle ayant servi à la réalisation de cette allégorie, a perdu son identité. Il est même devenu difficile de trouver un document qui fasse encore le rapprochement entre la femme qui marchait devant, sur les barricades, telle que Delacroix l'aurait "imaginée", et celle qui croyait que la Révolution voulait dire Libération. Il y a pourtant dix ans seulement, c'était encore le cas. Mais le révisionnisme ne s'arrête jamais. Théroigne laisse donc la place à une allégorie sans nom et montre deux seins, cette fois. Pourtant elle n'est même pas à cheval !




Seins dénudés version XXIe siècle : sur cette couverture de magazine, la "Liberté" est un corps de femme faisant allusion à un homme : Cohn-Bendit. Un joli corps complètement anonyme. Ce n'est ni Hippolytè, ni Clélie, ni Théroigne. La seule différence qui existe entre cette parfaite inconnue censée représentée la liberté féminine (n'y avait-il donc aucune féministe en 1968 ?), et Cohn-Bendit sont les seins nus. Plus de figure allégorique. C'est encore trop. Les seins nus comme symbole de liberté, c'est bien suffisant pour les filles. Et puis surtout : c'est tout ce qu'on leur demande !

9 commentaires:

  1. Haha! Super intéressant Euterpe!!!

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  2. Bravo l'analyse ! Causette : trop cher pour ce que c'est !
    Et cette semaine aussi, il y a des seins sur la couverture de Télérama, été oblige, et il faut vendre.

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  3. ;o) c'est juste un hameçon en fait, il faut que les hommes aient cette petite récompense, c'est comme un laisser passer même pour un journal féministe comme Causette, s'il veut avoir le droit de se placer en kiosque, d'être convoyé par des mains d'hommes ... il faut céder ça aux machos (je suppose ?) sinon ben faut accepter de recevoir son journal féministe uniquement sur abonnement... et là aucune raison d'y mettre des seins ou des fesses en couverture.

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  4. Dans les années 70, la poitrine dénudée a été une tentative de désérotiser cette partie du corps. Elle a été rapidement récupérée par le machisme ambiant ...

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  5. A Paule : Merci ! Depuis que je suis toute petite, je me pose des questions sur le concept d'allégorie. Surtout à corps féminin nu.

    A Hypathie et Emelire : le dernier "Emma", journal féministe allemand en vente libre dans les kiosques au prix prohibitif de 9,50 euros, a pour couverture, ce trimestre-ci, le visage en gros plan couvert de rides de Margarete Mitscherlich, 92 ans. Il se vend très bien.
    J'espère qu'aucune de vous ne croit sincèrement à l'argument de la "nécessité" d'exhiber des seins pour vendre ! C'est bidon à mort. Ces magazines coulent autant que s'ils n'exhibaient rien du tout. Je crois au contraire que cet excès de complaisance les coule encore plus sûrement mais ce n'est pas la vente qui les motive. C'est totalement irrationnel et complètement machiste.

    A Héloise : Normal : la directrice de ce journal n'est-elle pas un directeur ? D'où le message féministotartuffe de première classe ! Il mériterait un prix de tartufferie. Je suis pour décerner un prix de tartufferie féministe. C'est tellement dans l'air du temps !

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  6. A Hypathie et Emelire : Juste pour ajouter les smileys manquants !
    J'ai quand même saisi la part d'ironie de vos commentaires, si, si ! ;-)

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  7. Oui, bien vu... un même symbolisme de liberté à travers le temps et les époques...

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  8. Je vous rend la politesse et je ne suis pas déçue. Le sujet et son traitement valent le détour. Le sein n'est pas seulement érotique, symboliquement c'est aussi la mamelle nourricière. C'est dire si les grands petits garçons s'y intéressent. Quant à celles qui en possèdent, leurs "attributs" ne sont jamais à "la bonne taille" (trop petits, trop gros). Les exhiber, les cacher, de toute façon ils nous organisent.

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  9. A Fille du Midi : merci à vous. C'est un sujet qui ne risque pas de perdre de son actualité.

    A zoé lucider : voilà. Et ils passent de plus en plus par dessus notre pudeur sans se gêner.
    Merci de votre intérêt pour ce billet.

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